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Bienvenue sur le blog des communistes de Villepinte

art et cuture

Oscar Niemeyer, créateur, communiste

30 Novembre 2022, 11:09am

Publié par PCF Villepinte

Publié le 30/11/2022 par PCF

L’architecte Oscar Niemeyer, qui a conçu le bâtiment du PCF, est décédé le 5 décembre 2012, voici 10 ans. Il avait presque 105 ans.

De son vrai nom Oscar Ribeiro de Almeida de Niemeyer Soares, il aimait à dire : « Dans mon nom il y a quatre origines différentes... Je suis un métis et j’en suis fier. » Il portait en lui une ouverture sur le monde.

Au cours de sa vie, il a réalisé plus de 600 projets, aux quatre coins de la planète ; certains d’entre eux se matérialisent encore aujourd’hui comme à Brasília (2012), Leipzig (2020), Aix-en-Provence (2022).

Fidel Castro avait dit de lui en 1999 : « On se souvient de Michel-Ange, des grands peintres du monde, on se souviendra d’Oscar Niemeyer avec la plus grande admiration, un Niemeyer éternel pour son œuvre et ses nobles idées. »

De fait, il a été honoré, distingué dans une dizaine de pays (et d’académies). La France l’a élevé au rang de commandeur de la Légion d’honneur en 2007. Et le monde entier a rendu hommage à l’architecte et à son engagement communiste indéfectible, soulignant à la fois la sensualité des courbes de ses réalisations et la droiture de ses convictions.

Quelques citations. Dilma Roussef, ex-Présidente de la République du Brésil, déclara à l’annonce de sa mort : « C’est un jour de deuil. C’est un jour pour saluer sa vie. Niemeyer était un révolutionnaire, le mentor de la nouvelle architecture qui était belle, logique et, comme il l’avait définie lui-même, inventive. »

Pour Sergio Magalhaes président de l’Institut brésilien des architectes, « Niemeyer était un homme en avance sur son temps, il était solidaire des autres et il a été aimé comme peu de gens. »

Sergio Cabral Filho, gouverneur de Rio, a parlé de « génie de l’architecture mondiale, ferme dans ses convictions et aimé du peuple brésilien ».

Et Lula assura : « La monumentale Brasilia, où il a laissé la marque de son art et concentré ses rêves d’une ville qui puisse abriter avec tendresse et confort pauvres et riches, hommes communs et ordinaires, sera toujours l’expression maximum de son génie et de sa générosité. »

Architectes, artistes, journalistes, hommes et femmes politiques ont salué son engagement. Lucien Clergue, photographe, a pu dire : « Comme Picasso, Oscar avait ce sentiment de communisme, c’est-à-dire de confraternité, généreux et le sens du partage. »

Ils ont insisté sur le caractère novateur de son œuvre. Pour l’architecte Jean-Maur Lyonnet qui participa à la construction de notre siège : « Son architecture a apporté sur la scène européenne et nord-américaine vraiment un souffle tout à fait nouveau. » Paul Chemetov, qui contribua également à la construction du siège, insistait : « Il croyait en une architecture capable de transformer le monde. » Et Pierre Laurent notait : « Son œuvre est révolutionnaire parce qu’il aimait l’humanité et la vie qui n’a de sens que dans la solidarité et la fraternité du genre humain. »

Le siège du PCF était, avec la cathédrale de Brasilia, l’œuvre préférée de son créateur. Quarante-deux ans après l’inauguration de l’immeuble de la place Colonel-Fabien, et dix ans après la mort d’Oscar Niemeyer, ce siège, classé au patrimoine national, reçoit sept mille visiteurs aux journées du patrimoine.

Le bâtiment reste quasiment le seul siège politique d’origine à être encore la propriété de son parti. Construit vers la fin de la guerre froide par nombre d’architectes et d’ingénieurs communistes, il opposait fièrement son rideau de verre au rideau de fer. Il doit aussi beaucoup à l’implication militante des communistes, qui ont participé à la grande souscription nationale qui a permis l’achèvement des travaux, mais aussi aux nombreuses gardes pendant les travaux. 

Gérard Pellois

 

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Rock. Bruce Springsteen, soul man dans l’âme

27 Novembre 2022, 08:52am

Publié par PCF Villepinte

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Les vieux sont-ils responsables de tous les malheurs du monde ou les jeunes sont-ils une génération d'ingrats ?

15 Novembre 2022, 10:21am

Publié par PCF Villepinte

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Bob Dylan

5 Novembre 2022, 10:13am

Publié par PCF Villepinte

La chanson au miroir du siècle

Édition Avare en paroles publiques, le chanteur légendaire revient sur ses influences avec Philosophie de la chanson moderne. L’artiste y livre son regard sur un répertoire musical parfois méconnu. Et sur les mythes qui ont fait l’Amérique.

L'Humanité Clément Garcia

 

Vendredi 4 Novembre 2022

 

La chanson, art majeur ou mineur? On sait la querelle tenace, mais plus grand monde ne se risquerait aujourdhui à dénier à cet instantané évocateur la légitimité acquise au cours du dernier siècle. Robert Zimmerman, alias Bob Dylan, aura certainement contribué, de sa place de démiurge, à élever cette expression artistique et musicale en décloisonnant les genres et en absorbant les influences pour construire au fil des décennies une œuvre d’une actualité toujours recommencée.

Caméléon, brouilleur de pistes et maître en contre-pieds, le lauréat 2016 du prix Nobel de littérature publie donc un livre – le troisième seulement – au titre académique, Philosophie de la chanson moderne   (Fayard). Encore une fois, ne nous y laissons pas prendre. Nul pensum ici, mais une embardée personnelle dans un répertoire choisi qui puise dans un patrimoine largement méconnu dans nos contrées, à de notables exceptions près: du blues, de la country, du rock obscur, de la soul, de la variété chantés par des personnages parfois illustres, souvent mal compris, mais toujours hantés.

défricheur d’un vaste continent

C’est évidemment l’œuvre de Bob Dylan qui gagne en perspective, s’éclaire d’inspirations décisives, mais c’est encore la musique populaire anglo-saxonne, vaste continent dont il fut le défricheur en chef, qui apparaît dans sa grande richesse et sa complexité. Déjà, de 2006 à 2009, Bob Dylan animait le Theme Time Radio Hour, émission dans laquelle il exhumait quelques titres cardinaux.

Trois volumes de ce florilège d’influences, publiés par le label ACE, pénétraient l’intimité du maître. Philosophie de la chanson moderne y revient sous une forme nouvelle. Ni essai ni livre d’art, mais un ouvrage qui joue habilement le jeu des correspondances entre des textes qui alternent entre digressions littéraires et réflexions et, en contrepoint, des images et photos soignées, puisées dans la culture pop. Soit, donc, 66 chansons du dernier siècle désossées, à partir desquelles Dylan prolonge le propos initial, sonde les sentiments humains et s’interroge sur ce que peut une chanson, en apostrophant le(s) lecteur(s) d’un «tu» ou dun «vous», à la manière de «Mr Jones» dans Ballad of a Thin Man.

la violence, la guerre, l’amour

L’ouvrage nous rappelle combien les États-Unis furent – et restent – une usine à mythes, avec leurs héros et leurs démons, leur divinisation de la violence, de la guerre, de l’amour, de l’argent. La chanson absorbe l’époque, nous explique-t-il: «Quand les auteurs-compositeurs sinspirent de leur propre vie, le résultat est parfois si particulier que personne ne s’y reconnaît.» Lorsqu’il aborde Money Honey, morceau figurant sur le premier album d’Elvis Presley, en 1956, Dylan s’autorise une longue digression: «Lart est un dérangement, largent un arrangement.» 

L’argent que l’on retrouve aux fondations de l’empire Motown avec le premier titre édité par le label des musiques noires du Nord – Money (That’s What I Want) –, auquel il rend un hommage appuyé à travers le couple d’auteurs-compositeurs maison, Barrett Strong et Norman Whitfield. Ce sont eux qui écrivirent War, hymne antimilitariste chanté par Edwin Starr, qui nous vaut une divagation passionnante sur la guerre, indissociable de l’histoire de son pays: «Quand nos élus envoient des troupes au casse-pipe, à l’autre bout du monde (…), et que nous ne faisons rien pour les en empêcher, ne sommes-nous pas aussi coupables qu’eux? Si nous voulons voir un criminel de guerre, il ny a qu’à se regarder dans une glace.»

Le mythe est souvent plus trivial. Blue Suede Shoes, de Carl Perkins, rappelle l’importance des chaussures dans une culture populaire chantée qui en compte «de toute sorte: vieilles, neuves, crottées, et des baskets, et des chaussures de danse, et une fille aux talons rouges devant le drugstore». C’est encore le mythe de l’imposteur (pretender) chanté par les Platters comme par Jackson Browne, et l’amour enfin, souvent déçu, qui reste la grande affaire d’un répertoire qui l’associe volontiers à l’alcool, aux illusions, à la dépression. 

Dans ce vaste panorama, la focale est placée sur une Amérique où les frontières qui séparent la variété des mondes pop-rock n’ont cessé d’être discutées, déplacées, effacées. Certes, il faut savoir se plonger dans les paroles pour en extraire le miel, mais Dylan nous rassure: «Il y a quelque chose de libérateur à écouter une chanson dans une langue quon ne comprend pas.» On conseillera toutefois aux lecteurs anglophones de se procurer l’édition originale de cet ouvrage, dont la traduction, certes peu aisée, semble faire perdre quelque densité au propos. 

 

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Femmes sous plusieurs angles aigus

1 Novembre 2022, 07:55am

Publié par PCF Villepinte

LA JOCONDE AVOUE

ÊTRE UN PEU ROUILLÉE.

Jean-Pierre Léonardini L'Humanité

Lundi 31 Octobre 2022

L’imagination, cette «folle du logis» selon Pascal, a poussé Claire Couture et Mathilde Le Quellec à écrire les Muses (1). Il fallait y penser. La nuit, dans le musée enfin déserté, la petite danseuse de Degas descend de son socle, la Joconde et la Vénus de Botticelli sortent de leur cadre et la Marylin d’Andy Warhol reprend corps à son tour. Les voilà candidates à un concours de beauté par-delà les époques… Vous voyez le tableau?

Sur le mode vif de la revue chantée et dansée, c’est un joyeux festival de chamailleries, de coq-à-l’âne, d’embrassades et de saillies hardiment troussées. Le gardien du musée, avec sa casquette et sa lampe électrique, n’en peut mais, d’autant que la petite danseuse de Degas (14 ans) raconte avoir rendez-vous avec lui. Stanislas Grassian, valeureux metteur en scène de cette pochade culturelle endiablée, tient ce rôle subsidiaire. Chaque figure est parfaitement dessinée.

La Vénus (Sophie Kaufmann) est boulimique. La Joconde en liberté (Mathilde Le Quellec) avoue être un peu rouillée (elle a 500 ans!) et ne supporte plus d’être selfiée par des milliers de Japonais. Marylin (Tiffanie Jamesse), en robe rouge plissée, avec ses mimiques et sa voix denfant délicieuse, semble telle que l’éternité l’a changée et la petite danseuse (Amandine Voisin) se dit naïvement travaillée par la puberté…

Ce sont celles que j’ai vues ce soir-là, car il y a alternance dans la distribution. Chaque séquence chantée et dansée est applaudie, comme au music-hall. Vers la fin, les spectateurs sont conviés à reconnaître quelques chefs-d’œuvre patentés simulés en tableaux vivants. Le tout, spirituellement pédagogique, à la fois comique et touchant, témoigne d’une belle maîtrise des métiers de la comédie musicale. La grande Colette aurait aimé les Muses.

L’amitié et le goût du travail partagé ont concouru à la création de Babette, texte de Philippe Minyana mis en scène par Jacques David, interprété par Dominique Jacquet (2). Elle est, alternativement entre ombre et lumière (Charly Thicot), une femme qui parle d’elle-même dans la journée où elle retrouve sa fille disparue depuis l’enfance, voit son fils et son mari échanger des horions, après qu’un forcené, dans la rue, a tiré dans le tas…

Elle distille, avec un art subtil du dire volubile, sur le ton du constat, cette partition superbement composée sur la vie quotidienne d’une femme ordinaire qui ne l’est pas. Les gens simples, par bonheur, sont toujours compliqués.

LA JOCONDE AVOUE ÊTRE UN PEU ROUILLÉE.

(1) Jusqu’au 8 janvier, au Théâtre Le Ranelagh, 5, rue des Vignes, Paris 16e, métro La Muette, du jeudi au dimanche. Tél.: 0142886444, www.theatre-ranelagh.com (2) Du 6 octobre au 8 décembre, le jeudi, à 19 heures, au Théâtre La Flèche, 77, rue de Charonne, Paris 11e. Tél. rés.: 0140097040, theatrelafleche.fr

 

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Des frites

31 Octobre 2022, 13:31pm

Publié par PCF Villepinte

Maurice Ulrich L'Humanité

Lundi 31 Octobre 2022

Mais qu’a donc fait François Bayrou pour que Paris Match lui consacre un portrait en quatre pages? On apprend dès la première phrase quil sait tout, «sur tout, toujours». On se demande si c’est ironique, mais non.

La preuve, il parle de géothermie avec des ingénieurs, puis d’un concours d’équitation, puis des palombes fumées au miel, puis d’Henri IV au point qu’il semble l’avoir connu… En plus de ça, il relit Nietzsche, la classe, et déteste Annie Ernaux, «dont il connaît peu l’œuvre». C’est plus sûr. Il mange avec les doigts des frites à la graisse de canard.

(Avec des protèges-doigts) 

Tout ça. Ah oui, on allait oublier. Président du Modem, il est aussi haut-commissaire au plan depuis 2020 et vient d’être nommé au poste prestigieux de secrétaire général du Conseil national de la refondation… Mais, surtout, on apprend à quel point Emmanuel Macron l’épate. Qu’il a pour lui un «immense respect» en raison de «sa capacité de lecture et danticipation, de ses intuitions formidables». Il est «hors normes». Quatre pages, c’est peu.

 

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Jean Ferrat - la Commune

16 Octobre 2022, 07:58am

Publié par PCF Villepinte

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Littérature 

7 Octobre 2022, 09:12am

Publié par PCF Villepinte

Annie Ernaux, le singulier universel

Récompensée pour «le courage et lacuité clinique avec laquelle elle découvre les racines, les éloignements et les contraintes collectives de la mémoire personnelle», lautrice est la 17e femme à obtenir le prix Nobel.

Sophie Joubert L'Humanité

Vendredi 7 Octobre 2022

©Camille Millerand

On n’osait y croire, même si le nom d’Annie Ernaux, marraine des Amis de l’Humanité depuis septembre, figurait dans la liste des favoris. «Très heureuse» et «fière», comme elle l’a déclaré aux journalistes venus l’attendre devant chez elle, à Cergy, elle a confié à la télévision suédoise qu’il était de sa «responsabilité» de «témoigner () dune forme de justesse, de justice, par rapport au monde»

Rarement l’annonce d’un prix Nobel de littérature aura autant ému. Parce que son œuvre de mémorialiste subtile, initiée en 1974 avec les Armoires vides, fait entrer dans la littérature les classes populaires, explore l’injustice, la honte, l’appartenance sociale et la trahison. Parce que, à l’heure où le droit à l’avortement est remis en question dans plusieurs pays, dont les États-Unis, ce prix met en lumière le courage d’une femme, féministe, qui a toujours écrit depuis son expérience sur le corps des femmes, leurs désirs et les violences qu’elles subissent.

Dans les Années Super 8, le film qu’elle a écrit et réalisé avec l’un de ses fils, David Ernaux-Briot, on la voit jeune femme, mariée à Philippe Ernaux et mère de deux garçons. Sa mère, veuve, vit avec eux dans une maison près du lac d’Annecy. Si les images paraissent anecdotiques, elles disent à quel point Annie Ernaux a su capter ce que vivaient toutes les femmes de sa génération, l’aliénation et l’ennui dans le couple et la maternité.

On devine, derrière les sourires tristes et les regards fugaces à la caméra, l’abîme qui se creuse entre la vie et les désirs. Derrière l’épouse et la jeune professeure de lettres, se cache la «femme gelée», titre du roman qui signera la fin de son mariage et labandon prochain des doubles de fiction.

Car, depuis la Place, en 1984, Annie Ernaux a cessé d’écrire des romans et trouvé une forme singulière qui restitue au plus près le réel, à la croisée de l’intime et du collectif. «Quand mon père est mort (en 1967), jai ressenti un sentiment de trahison. Jai exploré la déchirure avec les Armoires vides, puis j’ai voulu parler. J’ai travaillé pendant dix ans sur la Place, le livre sur mon père, sorti en 1984.

Je voulais creuser l’injustice que j’avais vécue par mes origines. Le roman n’était plus possible et toute mon écriture en a été bouleversée, j’ai abandonné la fiction. (…) J’ai eu l’impression que l’écriture elle-même était une façon de me rapprocher du monde de mes origines. La réalité a un poids particulier quand on naît dans ce monde, on n’a pas sa place d’entrée de jeu», nous confiait-elle en 2016 .

Légitimer des mondes exclus

Ce monde, c’est celui du café-épicerie de ses parents, à Yvetot, en Normandie. Née Annie Duchesne en 1940, élevée comme fille unique (sa sœur aînée est morte avant sa naissance), elle grandit auprès d’une mère catholique pratiquante qui lui fait découvrir Margaret Mitchell et John Steinbeck. À 20 ans, après une première expérience sexuelle traumatique qu’elle racontera dans Mémoire de fille , elle commence à regarder son enfance avec une «certaine distance», à s’intéresser aux souvenirs comme matériau d’écriture. Tout se joue dans ces années où, après avoir quitté l’École normale d’institutrices, elle suit un double cursus de philosophie et de lettres. «Après ces deux années, il y aura dautres événements dans ma vie, dont l’avortement que j’ai raconté dans l’Événement, mais tout s’est joué là: mon désir d’écrire, d’être professeur de lettres», se souvient-elle. Irriguée par le thème de la mémoire, l’œuvre d’Annie Ernaux se divise en deux branches: dune part, les récits d’enfance et d’adolescence comme la Place et l’Événement ; d’autre part, les livres de l’âge adulte comme Passion simple et l’Occupation, descriptions cliniques et crues de la passion amoureuse et de la jalousie.

Écrire, pour Annie Ernaux, c’est légitimer des mondes exclus de la littérature, mettre au jour des tabous, le viol dans Mémoire de fille, l’avortement dans l’Événement, exhumer des secrets comme la mort de sa sœur aînée, dans l’Autre Fille. C’est aussi s’intéresser à la société de consommation, arpenter les allées des centres commerciaux (Regarde les lumières, mon amour), faire de Cergy, où elle vit depuis le début des années 1980, un matériau littéraire.

Un livre, peut-être, les contient tous: les Années (2008), où s’entremêlent les événements de sa vie personnelle et l’histoire collective en une traversée de la deuxième moitié du XXe siècle. Les Années, a écrit l’écrivain américain Edmund White dans le New York Times, «est un livre sincère, courageux, une Recherche du temps perdu  de notre époque contemporaine dominée par les médias et le consumérisme, pour notre époque de fétichisme absolu envers les produits de confort».

De son écriture, on a souvent dit qu’elle était blanche, sèche. Qu’elle raconte la maladie d’Alzheimer de sa mère dans Je ne suis pas sortie de ma nuit ou sa liaison avec un étudiant de trente ans de moins qu’elle dans le Jeune Homme, son dernier livre, elle n’élude rien, assume la frontalité, cherche la précision, la densité. «Jimporte dans la littérature quelque chose de dur, de lourd, de violent même, lié aux conditions de vie, à la langue du monde qui a été complètement le mien jusqu’à 18 ans, un monde ouvrier et paysan. Toujours quelque chose de réel. J’ai l’impression que l’écriture est ce que je peux faire de mieux, dans mon cas, dans ma situation de transfuge, comme acte politique et comme don», confiait-elle à Frédéric Yves-Jeannet dans l’Écriture comme un couteau.

Influencée par la pensée de Bourdieu, Annie Ernaux met au jour les silences et les mécanismes des dominations, au carrefour du genre et des classes sociales. «Jai toujours voulu que les mots soient comme des pierres, quils aient la force de la réalité. Tout le monde sait que cest une illusion mais les mots font agir», nous disait-elle encore.

Ces dernières années, elle est intervenue pour soutenir les gilets jaunes et ceux qui se battaient contre la réforme des retraites, pour les services publics ou, pendant l’épidémie de Covid, critiquer l’état d’urgence. Elle a évidemment accueilli le mouvement MeToo comme une «grande lumière, une déflagration». «On ne peut plus écrire de la même façon après Annie Ernaux», disait Édouard Louis, à l’occasion de la parution du Jeune Homme. «Quel grand jour pour la littérature de combat! » a-t-il réagi, ce jeudi. Une littérature de combat et une grande voix féministe qui résonnera à Stockholm, le 10 décembre, lors du discours de réception du prix Nobel.

Bibliographie sélective

Les Armoires vides, Gallimard, 1974; la Femme gelée, Gallimard, 1981; la Place, Gallimard, 1983; Passion simple, Gallimard, 1992; la Honte, Gallimard, 1997; l’Événement, Gallimard, 2000; lOccupation, Gallimard, 2002; les Années, Gallimard, 2008; l’Écriture comme un couteau. Entretien avec Frédéric-Yves Jeannet, Stock, 2003; Écrire la vie, Gallimard, collection «Quarto», 2011, rassemble onze œuvres suivies dextraits de son journal intime, de photos et de textes; Mémoire de fille, Gallimard, 2016; le Jeune Homme, Gallimard, 2022.

 

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Opex, bouleversant hymne à la vie d’Arno

2 Octobre 2022, 09:28am

Publié par PCF Villepinte

Musique Le dernier album du chanteur belge sort ce vendredi, cinq mois après sa mort. Un disque rock qui conjugue irrévérence et lucidité. Et transpire l’urgence et l’amour.

Fara C. L'Humanité

Vendredi 30 Septembre 2022

Le 23 avril, à l’âge de 72 ans, le chanteur s’est définitivement tu. Dans son dernier album, il regarde la vérité les yeux dans les yeux. danny willems

Dans le sillage de son superbe disque en duo avec le prodigieux pianiste Sofiane Pamart, Arno continue, d’outre-tombe, de chanter pour nous, toujours mû par cette irrévérence pétrie de générosité qui le caractérisait. Avec son album posthume, Opex, qui sort ce vendredi 30 septembre, il offre un bouleversant hymne à la vie.

À ces agapes poétiques il n’hésite pas à convoquer la Faucheuse, comme pour l’apprivoiser ou, selon son humeur, la défier, avec humour. Il se savait condamné. Opex transpire l’urgence. «  Malgré la fatigue et la douleur, Arno voulait coûte que coûte faire ce disque, il avait conscience que ce serait le dernier, nous confie le bassiste Mirko Banovic, musicien de longue date du chanteur belge qui a coréalisé Opex avec lui. Arno était encore en studio, en mars, pour peaufiner le projet mis en route en 2021. Le 23 avril, il est définitivement parti à l’âge de 72 ans, soulagé d’avoir accompli son ultime mission.

Immédiatement après Vivre, disque acoustique et pudique mis en œuvre alors qu’il venait d’apprendre qu’il avait un cancer, et qu’était survenue la pandémie, Arno a tenu à parachever sa discographie en brandissant, haut et fort, l’oriflamme rock. «Dès lenfance, il s’était reconnu dans ce style musical, rappelle Mirko Banovic. Arno a voulu que figure, dans Opex, une reprise de One Night With You. Gamin, il avait découvert ce morceau popularisé par Elvis Presley et avait aussitôt su que, plus tard, il ne voudrait rien faire d’autre que de la musique. Depuis longtemps, il voulait l’enregistrer. À l’issue de la session, il était fier de l’avoir enfin fait.»

«embrasse le passé, il nexiste plus»

Sur One Night With You, grondent de grosses guitares hard rock, alors qu’elles se font plutôt folk, entre ombre et lumière comme un soleil couchant, dans le morceau  Take Me Back que l’Ostendais a signé avec Mirko Banovic. On a l’impression qu’il s’adresse à la maladie aux «baisers mortels». «Sil te plaît, ramène-moi et mets-moi en accord avec moi-même », psalmodie-t-il, rejoint par la supplique nostalgique d’un hautbois lointain.

En introduction d’ Opex ( la Vérité), puis en conclusion ( I’m Not Gonna Whistle), il a convié, pour la première fois, son fils Félix Hintjens, qui a imprimé un subtil cachet électro et qui a cosigné la musique des deux titres avec Mirko Banovic et Bruno Fevery (lui aussi fidèle musicien du leader). Dans le premier, Arno regarde la vérité les yeux dans les yeux: «Je vais me marier avec le vent/Je prends le soleil comme mon amant () Embrasse le passé, il nexiste plus/Hier, c’était le passé, aujourdhui la vérité.»

Dans I’m Not Gonna Whistle, comme dans Mon grand-père, Arno se saisit de son harmonica, dont il extirpe une complainte qui nous serre les entrailles. Pour I’m Not Gonna Whistle (« Je ne vais pas siffler»), il a également fait appel à son frère, le saxophoniste Peter Hintjens. « Pour cet album, Arno a souhaité réunir sa famille et ses proches compagnons de musique, souligne Mirko Banovic. Nous avons enregistré la majeure partie d’Opex ensemble, en condition live. Nous avions à cœur de l’entourer avec autant d’amour que celui qu’il nous donnait sans réserve.»

Arno a baptisé ce quinzième opus Opex en hommage au quartier populaire où il a grandi, à Ostende. «Mes grands-parents y tenaient un bar populaire et cest là que je suis allé à mes premiers bals avec mon grand-père», nous avait-il confié, en 2015, à l’occasion d’un concert au Festival Jazz Musette des Puces.

Le regretté troubadour manie avec maestria le paradoxe. Dans Boulettes, il célèbre jouissance et réjouissance. Un peu plus loin, dans Court-circuit dans mon esprit (déjà gravé pour le disque Santeboutique, 2019), composé par Mirko Banovic et magnifiquement interprété au piano par Sofiane Pamart, ses couplets crève-cœur parlent sans ambages de la vie qu’il a brûlée par les deux bouts et qui s’en va. « Maintenant je paie les conneries du passé/Il y a un court-circuit dans mon esprit/Save me save me…  »

 Inattendue, la seconde reprise du CD ( la Paloma adieu) invite Mireille Mathieu. Là encore, Arno donne la chair de poule, quand il formule, à la façon d’un slam: « Ma vie s’en va mais n’aie pas trop de peine/Oh mon amour adieu. » Un duo avec Mireille Mathieu, c’était un rêve de gosse. À sa sortie de studio, la chanteuse apprit que, pendant qu’elle enregistrait sa piste vocale, l’éternel enfant avait rendu son dernier souffle. 

Albums chez Pias Label/Pias Distribution: Arno, Opex (2022)  ; Arno & Sofiane Pamart, Vivre (2021).

 

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Souffle(s) Jean-Luc Godard et « nous ».

16 Septembre 2022, 09:22am

Publié par PCF Villepinte

 

Jean-Emmanuel Ducoin "La roue tourne"

Vendredi 16 Septembre 2022

Impensé Trop en dire – ou pas assez.

Il eût été commode pour le bloc-noteur, en cette semaine si particulière d’après Fête de l’Humanité, d’évoquer en mode «incarné» la richesse des moments partagés comme autant de joies profondes et despérances collectives. Sauf que, à peine les jours d’allégresse vécus, le monde de la culture – et de la politique – accusa l’un de ces deuils qui affaissent la volonté mais rehaussent nos consciences.

Jean-Luc Godard est mort: la phrase en elle-même, par son absurdité symbolique, contresigne l’impensé et dispense d’y croire vraiment. Le cinéaste en personne, à la question «Quelle est votre ambition dans la vie?», répondait: «Devenir immortel et mourir.» Pas donné à tout le monde.

Dès lors, que peut-on encore «écrire» sur l’insurgé du cinéma au génie subversif qui n’ait été déjà suggéré ou verbalisé depuis quelques jours? Attention, sil y a danger à parler des morts qui comptent aux yeux du plus grand nombre, il y a un danger tout aussi sérieux à parler de son propre rapport avec eux en offrant l’hommage en forme de témoignage personnel, toujours un peu réappropriant et qui risque toujours de céder à cette façon indécente de dire «nous», ou pire «moi».

Conscience

 L’oraison funèbre est un genre guetté de tous côtés par la mauvaise foi, l’aveuglement, et, bien sûr, la dénégation. Quand il ne s’agit pas de sombrer dans le pathos, qui ne peut être tempéré que par l’éventuel refus de parler de son rapport au disparu en faisant abstraction de toute différence et de tout conflit, de toute admi­­ration.

Comme pour se prémunir, et pourquoi pas l’appliquer à Godard pour en saisir le sens profond, voici ce qu’écrivit et lut Jacques Derrida aux obsèques de Louis Althusser: «Ce qui prend fin, ce que Louis emporte avec lui, ce nest pas seulement ceci ou cela, que nous aurions partagé à un moment ou à un autre, ici ou là, c’est le monde même, une certaine origine du monde, la sienne sans doute mais celle aussi du monde dans lequel j’ai vécu, nous avons vécu une histoire unique.» 

La disparition de Jean-Luc Godard, à l’instar des morts exceptionnels qui ont accompagné nos vies, emporte avec elle quelque chose qui s’arrache à la plus profonde conscience collective. La perte suscitée par l’un des plus grands cinéastes de tous les temps, avec ces secousses inouïes d’images et de sons que son œuvre réactive dans la mémoire de ses contemporains, avec une amplitude internationale incomparable, et une influence qu’aucun autre cinéaste français n’a jamais atteinte.

Romantique et révolutionnaire, moderne et classique, le réalisateur fut l’un des rares qui repoussèrent les limites esthétiques et narratives du 7e art. Créateur génial, provocateur et autodestructeur, adulé et honni, Godard apparaît comme celui qui entretenait le mieux ce feu sacré de la révolution permanente… poussant l’exigence jusqu’à imposer – à lui-même et aux autres – une rupture non moins permanente. Du grand art. Sans compromission.

Pensée

 Homme sans vraie descendance cinématographique ni véritables héritiers, Godard eut pourtant une influence essentielle, unique dans l’histoire du genre. On en voudra au bloc-noteur de cette tautologie ronflante, mais il n’est pas exagéré de prétendre qu’un seul film lui aura suffi pour se hisser à cette hauteur, À bout de souffle. Un avant, un après. Et une date, 1960, qui situe précisément le coup de tonnerre et la fulgurance du génie en plein surgissement imprévisible.

Le choc absolu.

Godard disait de ces temps immémoriaux de la nouvelle vague: «Nous étions des clichés ambulants, mais nous avions découvert un continent, où tous les gestes de la vie trouvaient leur place.» Un jour, il déclara dans le Monde: «Le cinéma, ce nest pas une reproduction de la réalité, cest un oubli de la réalité. Mais si on enregistre cet oubli, on peut alors se souvenir et peut-être parvenir au réel. C’est Blanchot qui a dit: Ce beau souvenir quest l­oubli.» L’artiste total de «la» pensée.

 

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