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Bienvenue sur le blog des communistes de Villepinte

CONVERGER

31 Août 2020, 06:16am

Publié par PCF Villepinte

 

L'Humanité.

Les partis de gauche, PCF, FI et EELV, qui tenaient leurs universités d’été ce week-end, ont pris la mesure du mécontentement qui monte face aux attaques du gouvernement Macron. Et esquissent leur avenir.

 

«Laddition des mécontentements est flagrante. Elle se mesure à des niveaux impressionnants dans toutes les catégories de la population», analyse dans le JDD Frédéric Dabi, de lIfop. Cette chute de confiance des Français envers le président de la République, les communistes réunis à Angers (Maine-et-Loire) pour leur université d’été l’ont pleinement intégrée. Contre la réforme du Code du travail, les coupes budgétaires, la baisse des APL et la hausse de l’ISF, ils ont répondu à l’appel à la mobilisation de leur secrétaire national (lire page 6).

«Si on reste chez nous et qu’on se contente de se plaindre sur Facebook, rien ne changera. Faut mettre la pression dans la rue», assure Aziza, jeune communiste. Sur le campus, nombreux sont ceux qui estiment quil ne suffira pas de sopposer aux réformes annoncées pour renverser les rapports de forces. «On ne doit pas seulement protéger les 35 heures, mais convaincre que le vrai progrès cest de permettre à tous de travailler moins en vivant bien», insiste Yann. «Il faut riposter mais aussi être à loffensive, car le macronisme continue de travailler les consciences», abonde Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF.

 «Être en toutes circonstances des bâtisseurs de commun»

 

Quant aux relations avec le reste de la gauche, si certaines blessures ont du mal à cicatriser, le dirigeant du PCF Pierre Laurent a appelé à «être en toutes circonstances des bâtisseurs de commun». Reste que la France insoumise na pas répondu à linvitation du PCF à Angers, contrairement à Ensemble!, EELV et au PS. Au nom de ce dernier, le député Luc Carvounas a dit croire que «la gauche est forte quand elle se rassemble». Mais il en a pris pour son grade: «Tous les jours je côtoie la misère humaine alimentée par votre politique daustérité des cinq dernières années. Aujourdhui vous parlez de la gauche, on a le même mot mais pas la même définition», reproche un communiste du Doubs, avant de lancer quil faut «reconstruire à partir des vraies valeurs de gauche».

Un chantier qui prendra du temps, selon Pierre Laurent. «Le PCF et notre projet de transformation sociale concrète ne sont pas solubles dans le populisme de gauche. Je ne dis pas cela pour créer je ne sais quelle polémique. Je dis cela pour souligner l’atout que représente le Parti communiste et l’originalité de sa démarche», assure-t-il. «La tentation de s’ignorer ne durera pas longtemps» «Notre point de départ, cest que les gens subissent les coups du pouvoir Macron. On va construire la riposte», estime celui qui invite toutes les forces de gauche à la Fête de lHumanité pour y travailler.

Les écologistes aussi, bien qu’empêtrés dans leurs débats de lignes, ont dessiné des pistes de rassemblement à gauche (lire page 7). À Dunkerque, où se tenait leur rassemblement, ce qui se passe du côté de Benoît Hamon est plutôt regardé avec bienveillance. Mais la portée de ce que propose l’ancien candidat du PS est encore floue, estiment-ils. «Ça peut finir en un nouveau PSU comme en vraie fédération de la gauche», ironise Jean-Louis, quand Sébastien souligne des relations «plus compliquées avec la France insoumise».

Le mouvement fondé par Jean-Luc Mélenchon tenait, lui, ses universités à Marseille. «Nous sommes la grande force d’opposition à Emmanuel Macron, affirme le député FI  contre-société, un modèle alternatif, et de prendre le pouvoir dans cinq ans. D’ici là, on va se battre pour que le gouvernement ne puisse pas pourrir la vie des gens et détruire le Code du travail. C’est le sens de notre appel à manifester le 23 septembre.» Soit six jours après la mobilisation du 17 à lappel de la CGT et SUD, dont Jean-Luc Mélenchon na pas dit un mot durant son discours de clôture, hier, quand il a appelé à ce que «le peuple déferle à Paris contre le coup d’État social».

«Le clivage peuple contre oligarchie est le plus audible», selon la FI.

 Reste la façon de s’adresser à ce peuple pour emporter son adhésion. «Le problème cest comment on parle aux gens», estime le député FI François Ruffin. Selon la sociologue Chantal Mouffe, théoricienne d’un «populisme de gauche» à la française, «il y a une partie des classes sociales qui narrivent plus à sexprimer dans la représentation politique et dans le clivage gauche-droite». «Ce qui compte, cest d’être efficace. Le clivage peuple contre oligarchie est aujourd’hui le plus audible», mesure Bastien Lachaud. Liem Hoang Ngoc va lui encore plus loin: «Le peuple associe une partie de la gauche à loligarchie. Ceux qui défendent une unité entre le PS, le PCF et EELV représentent quelque chose que les électeurs ne veulent plus. Il faut que l’on remplace encore plus la vieille gauche, et que le PCF rejoigne la FI s’il veut être utile.»

L’effacement des partis, terme qui «renvoie à la bureaucratie, à une absence de liberté, à une obligation de discipline», selon Cédric, militant, au profit de mouvements qui font «tomber toutes les barrières qui empêchent les citoyens de sinvestir», est toujours en ligne de mire. Mais dautres cadres de la FI composent, dans la perspective des luttes sociales qui s’annoncent. «On ne part jamais de rien. Il y a des traditions, des repères, des attachements, des cultures et je les respecte», estime la députée FI Clémentine Autain, qui appelle à des passerelles et dont le mouvement, Ensemble!, doit déterminer en octobre sil intègre la FI.

 «On nexclut pas de travailler avec les autres à chaque fois que c’est possible, comme on le fait avec les communistes à l’Assemblée nationale, explique le député Ugo Bernalicis. On n’est pas sectaires, on a signé un recours constitutionnel contre la loi travail avec le PCF et le PS…» Quand les intérêts à se battre ensemble convergent, comme ce sera le cas sur la loi travail XXL, le rapprochement s’imposera naturellement.

Julia Hamlaoui, Grégory Marin, Aurélien Soucheyre et Lionel Venturini

 

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"On les a condamnés avant même qu'ils ne soient contaminés"

2 Août 2020, 06:45am

Publié par PCF Villepinte

Dans la chambre d'une maison de retraite, une personne des pompes funèbres ferme le cercueil d'une victime du coronavirus, le 7 avril 2020 à Paris. (ALEXIS SCIARD / MAXPPP)

"On les a condamnés avant même qu'ils ne soient contaminés" : ces résidents d'Ehpad qui ont été privés d'hôpital au plus fort de l'épidémie de Covid-19

Plus d'un tiers des personnes décédées du coronavirus en France sont mortes au sein d'Etablissements pour personnes âgées dépendantes. Les difficultés d'accès aux hôpitaux pour les résidents les plus âgés, au plus fort de l'épidémie, alimentent la polémique sur la gestion de la crise par les autorités.

Juliette Campion Guillemette JeannotFrance Télévisions

Mis à jour le 28/07/2020 | 18:29
publié le 28/07/2020 | 07:01

"On a clairement arbitré : ma grand-mère de 96 ans, en parfaite santé avant d'attraper le Covid, a été placée d'office en soins palliatifs." Olivia Mokiejewski ne cache pas sa colère. Son aïeule, Hermine, résidente à l'Ehpad Bel Air de Clamart (Hauts-de-Seine), est morte le 4 avril des suites du coronavirus, qui frappe lourdement les personnes âgées. Plus de la moitié des victimes du Covid-19 ont 80 ans et plus. Ce taux monte jusqu'à 93% si la tranche d'âge est élargie aux 60 ans et plus, selon les dernières données de Santé publique France.

Mais pour cette petite-fille endeuillée, la seule explication de l'âge ne suffit pas. "Au-delà du tri opéré par les urgences, qui ne pouvaient pas accueillir tout le monde, les protocoles sanitaires d'urgence n'ont pas été appliqués de la même façon dans tous les Ehpad", estime Olivia Mokiejewski. A la tête du Collectif 9471, en référence au nombre de morts recensés dans les Ehpad le jour de la création de l'association, le 5 mai dernier, elle entend porter la voix des familles meurtries qui veulent connaître la "chaîne des responsabilités" dans le décès de leurs proches. Car pour ces familles comme pour certains professionnels de santé, "des morts auraient pu être évitées", résume Olivia Mokiejewski.

Des critères objectifs pour éviter une discrimination par l'âge

"Les gens de 95 ans sont parfois en bien meilleure forme que ceux de 60 ans. Or, on les a condamnés avant même qu'ils ne soient contaminés." C'est un constat sans appel pour Olivia Mokiejewski. Selon elle, les résidents des Ehpad seraient morts parce que jugés trop vieux. Cette possible discrimination a été soulevée par l'Académie nationale de médecine. Dès le 18 avril, elle a alerté sur les risques d'un "âgisme", une discrimination du fait de l'âge, dans un contexte épidémique où "la limitation des ressources [dans les hôpitaux] fait le lit de tensions intergénérationnelles". L'institution recommande "de ne jamais utiliser le critère d'âge pour l'allocation ou la répartition des biens et des ressources" et, s'il doit y avoir un rationnement des moyens thérapeutiques, qu'il soit basé sur "des critères physiologiques, cliniques et fonctionnels".

De son côté, Olivia Mokiejewski a récemment porté plainte pour "mise en danger de la vie d'autrui", "non-assistance à personne en danger" et "homicide involontaire". Une enquête préliminaire est en cours. Selon elle, il y aurait eu des "manquements" dans l'établissement du groupe Korian où résidait sa grand-mère

On a bradé la vie de ces gens. On a nié les symptômes de ma grand-mère.Olivia Mokiejewski, famille endeuilléeà franceinfo

La direction de l'Ehpad, contactée par franceinfo, confirme les difficultés pour la prise en charge à l'hôpital de certains de leurs résidents. "Nous avons eu plusieurs refus du 15, notamment pour la grand-mère de madame Olivia Mokiejewski. Ils nous ont clairement dit qu'ils ne viendraient pas." Dans cet établissement, onze résidents sont décédés et Hermine a été "la première personne testée positive, résidents et personnel confondus, à décéder du Covid", précise Jean-Pierre Corre, le directeur régional en charge de l'établissement Korian de Clamart.

Déterminée, Olivia Mokiejewski s'est également rapprochée de l'association Coronavictimes, créée le 19 mars. Cette association conseille et accompagne toute personne en France qui souhaite porter plainte. "Nous avons vu arriver cette catastrophe dès le mois de février", explique son président, Michel Parigot, à franceinfo. "Cela devenait de plus en plus évident car aucune mesure n'était prise. J'avais l'impression de voir un crime être commis sous mes yeux et de ne rien pouvoir faire pour l'empêcher." Après avoir déposé, le 2 avril, une procédure d'urgence sous forme de référé-liberté demandant à l'exécutif d'agir contre la rupture d'égalité dans l'accès aux soins hospitaliers, dans le traitement de la fin de vie et l'accès aux soins palliatifs (une requête rejetée le 15 avril), l'association s'apprête à déposer une plainte collective au pénal, d'une douzaine de familles, concernant la "sélection" effectuée au détriment des personnes âgées. "Nous sommes en mesure de prouver le fait que ça a été organisé", assure Michel Parigot.

Des portes fermées par le ministère ?

Ils ne sont pas les seuls à vouloir savoir ce qui s'est réellement passé au sein des Ehpad ces derniers mois. Les syndicats de retraités de l'Aude (Occitanie) ont récemment interpellé la préfète de région, Sophie Elizéon. "Nous voulons savoir si les résidents d'Ehpad ont tous eu accès à des soins délivrés à l'hôpital lorsqu'ils ont été atteints du Covid-19", précise Jacques Vieules, syndicaliste FO retraités, contacté par franceinfo.

Je comprends que l'hôpital fasse des choix, décidant pour qui la réanimation sera bénéfique. Mais là, ce n'est pas une question de choix, c'est une discrimination : les résidents des Ehpad n'ont pas été emmenés à l'hôpital.Jacques Vieules, syndicaliste FOà franceinfo

"Si c'est avéré, cela irait à l'encontre du Code de la sécurité sociale", précise le syndicaliste. Selon l'article L111-2-1 de ce Code, "la protection contre le risque et les conséquences de la maladie est assurée à chacun, indépendamment de son âge et de son état de santé." Faute de réponse précise de part de la préfète – également sollicitée en vain à plusieurs reprises par franceinfo –, les syndicats de retraités de l'Aude se disent prêts à enquêter eux-mêmes auprès du personnel des Ehpad de la région, des résidents et de leurs familles, au sujet de l'absence de prise en charge par les établissements de santé. 

Cette "quasi-inaccessibilité à l'hôpital pour les personnes âgées n'est pas tombée du ciel", estime auprès de franceinfo Astrid Petit, déléguée CGT Santé. Elle en veut pour preuve les consignes et recommandations du ministère de la Santé, communiquées le 31 mars. Dans cette note ministérielle, il est précisé que "la prise en charge des cas suspects et confirmés ne présentant pas de critères de gravité doit être assurée en priorité au sein des Ehpad afin de ne pas saturer les établissements de santé, en respectant les mesures d'hygiène et de protection." Il est également clairement signifié dans ce document que "seuls les patients présentant des formes sévères et critiques sont pris en charge dans les établissements de santé habilités Covid-19", la décision de transfert revenant au médecin du samu. Selon Astrid Petit, cette circulaire aurait fermé la porte des hôpitaux aux personnes âgées. Contactée de nombreuses fois pour répondre à cette mise en cause, la direction générale de l'offre de soins (DGOS), qui dépend du ministère, n'avait toujours pas répondu à nos demandes au moment de la publication de cet article.

"Médecine de guerre" et "stratégie de priorisation"

Dans les Ehpad, les refus de prise en charge vers les hôpitaux ont été difficiles à vivre. "La grosse claque a été du 5 mars au 15 avril. Ce fut une période terrible", se remémore Eric Lacoudre, directeur de deux Ehpad associatifs à Sillingy et Cervens (Haute-Savoie), contacté par franceinfo. Dès le 2 mars, l'établissement de Sillingy, situé proche d'un cluster, a été fermé au public. Puis les résidents ont été isolés dans leur chambre le 9 mars et six sont partis à l'hôpital. Seuls deux en sont revenus. "Pendant un mois, les autres résidents malades n'ont pas été accueillis à l'hôpital et 13 sont morts à l'Ehpad", se désole le directeur. "Le samu était débordé, il ne répondait plus en Haute-Savoie", relate-t-il. "Nous avons vécu des instants terribles, avec quatre décès dans la même journée." A Sillingy, 19 résidents sont morts des suites du Covid-19. A Cervens, ce sont 23 personnes qui sont décédées.

Quand on donnait le nom de notre établissement aux urgences, on nous faisait comprendre implicitement que nous étions un ‘Ehpad Covid'. Pour eux, à partir de deux ou trois personnes contaminées, l'effet cluster est lancé et c'est à l'établissement de le gérer.Eric Lacoudre, directeur d'Ehpadà franceinfo

Le cas de ces deux Ehpad savoyards n'est pas isolé. "Les difficultés de transferts des Ehpad vers les hôpitaux ont surtout été fortes en Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est, puisque que ce sont eux qui ont pris la vague d'une violence inouïe avec des cas multi-symptomatiques, forts et rapides", constate Florence Arnaiz-Maumé, déléguée générale du Synerpa, le premier syndicat national des maisons de retraite privées. "Entre fin février et début mars, quand nous appelions le 15 aussi bien à Strasbourg qu'à Mulhouse, c'était des heures d'attente. Il y a eu un vrai problème d'explosion des urgences à ce moment-là et nous avons eu beaucoup de refus de transferts vers les hôpitaux."

Au plus fort de la crise sanitaire, le corps médical a dû faire face à des situations extrêmes, les ressources humaines et matérielles en milieu hospitalier n'étant pas suffisantes pour permettre de traiter tous les patients en état critique. Il a donc fallu appliquer une "médecine de guerre". Pour ce faire, une "stratégie de priorisation" des traitements de réanimation a été établie conjointement par la Société française d'anesthésie-réanimation (Sfar) et le Service de santé des armées (SSA), ce qu'atteste un document mis à jour le 15 avril"Pleinement éthique", écrivent la Sfar et le SSA, cette logique de priorisation, "classiquement appelée 'triage', comme en médecine de guerre ou de catastrophe", s'appuie, pour garantir l'équité dans l'accès aux soins, sur des critères objectifs qui écartent toute discrimination, notamment sur l'âge, "même si l'âge, comme l'existence d'un handicap, sont nécessairement intégrés à une réflexion sur le pronostic".

"Ce n'est pas notre métier de gérer les épidémies"

Conscient du caractère tout à fait inédit de cette épidémie et du manque de moyens, Eric Lacoudre comprend le "choix imposé" aux régulateurs du samu. "Pour avoir beaucoup travaillé avec eux, ils ont fait ce qu'ils ont pu, précise-t-il. L'épidémie est montée en puissance dans la région et ils ont donné la priorité à ce qu'ils savaient faire : les urgences". Car le personnel des Ehpad, comme celui des hôpitaux, sait qu'"une personne de 90 ans est dans l'impossibilité d'être intubée". Dans les cas les plus graves, le coronavirus provoque un syndrome de détresse respiratoire aiguë nécessitant de placer les malades sous respirateur artificiel en service de réanimation, unique façon de les sauver, mais pas sans conséquences sur la santé des patients.

Nous ne blâmons pas la décision qui consiste à prendre en charge les malades ayant le plus de chances de s'en sortir. Mais au moment où nous vivions cette situation, c'était la panique à bord. Nous étions dans l'angoisse.Florence Arnaiz-Maumé, Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées à franceinfo

Car la question de l'éthique s'est imposée tous les jours au sein des équipes soignantes. "Nous faisions un point quotidien, à la fois pour entendre le malaise et la difficulté liés aux choix crucifiants que les soignants devaient faire", relate Damien Le Guay à franceinfo. Philosophe, il intervient auprès des équipes médicales à l'Espace Ethique d'Ile-de-France et de Picardie. "La difficulté, dans cette période de 'médecine de guerre', est que vous êtes dans une gestion de la pénurie qui oblige à choisir. Et l'autorité supérieure qui décide incontestablement s'est retrouvée, par la force des choses, sur les épaules des médecins. C'est un retour quarante ans en arrière."

Conséquence de ces "choix" : pendant quelques semaines, les cas les plus âgés, les plus contagieux et les plus graves ne sont plus partis à l'hôpital. "Ils nous ont renvoyé la responsabilité de les soigner. Mais ce n'est pas notre métier de gérer les épidémies. Nous, nous gérons la vie quotidienne des gens âgés", justifie Eric Lacoudre. La prise en charge des cas les plus lourds par l'hôpital aurait permis de "baisser la charge virale dans nos Ehpad et de stabiliser les autres malades avec un apport en oxygène", détaille Florence Arnaiz-Maumé. "Côté timing, l'Etat a mis deux à trois semaines à réagir. C'est anormalement rapide et c'est tant mieux. Mais comparé au 'timing Covid', qui était très virulent à ce moment-là, c'était beaucoup trop lent", estime-t-elle.

Un modèle inadapté à des crises d'ampleur

Des "filières gériatriques" Covid ont été mises en place fin mars. Elles sont décrites dans la note ministérielle qu'Astrid Petit dénonce. Il y est annoncé la mise en place d'une "hotline gériatrique" et d'une prise en charge locale des résidents d'Ehpad. Ces filières sont gérées par les agences régionales de santé (ARS), qui identifient les établissements de santé (hôpitaux, cliniques, cliniques privées) susceptibles d'accueillir ces malades. "Depuis ce moment-là, nous ne passons plus par le 15. Nous avons des numéros dédiés", explique Florence Arnaiz-Maumé. "Et nous constatons que nous pouvons transférer beaucoup plus facilement nos malades, ce qui a permis de baisser la charge virale des établissements."

Mais trop tard, selon la plupart des professionnels interrogés. Plus d'un tiers des victimes du Covid-19 sont ainsi mortes en Ehpad, selon les derniers chiffres officiels communiqués le 23 juillet (10 516 personnes, sur les 30 182 décédées depuis le début de l'épidémie). Même si les établissements adoptent aujourd'hui des protocoles adéquats et disposent du matériel de protection nécessaire, "le modèle français a du plomb dans l'aile depuis la crise", estime auprès de franceinfo Marie-Anne Montchamp, présidente de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie. "Il est défaillant et inadapté à faire face à des enjeux sanitaires de cette ampleur." S'il doit changer, il faut faire vite. Car l'éventuelle seconde vague de la pandémie pourrait, elle aussi, faire de nombreuses victimes.

 

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Hommage à Jean Jaurès pour le 106ème  anniversaire de sa mort, au Café du Croissant, 31 juillet 2020.   

1 Août 2020, 06:50am

Publié par PCF Villepinte

 

L'Humanité Vendredi, 31 Juillet, 2020

Le discours de Patrick Le Hyaric, directeur de l'Humanité.  

Mesdames, Messieurs les élus, 

Chers amis,

Chers camarades,

Merci à chacune et chacun d’avoir répondu à cette invitation à nous réunir pour ce moment d’hommage et de recueillement en la mémoire de Jean Jaurès, homme de combat, homme de lumière et de paix assassiné ici même, il y a 106 ans, par une incarnation du nationalisme et de l’obscurantisme.

Jaurès attablé ici même et assassiné d’une balle tandis que les puissances continentales peaufinaient, dans le secret des chancelleries, les plans du carnage fondateur de ce siècle de fer et de sang dont Jaurès pressentait, bien seul en France avec quelques camarades socialistes, le cruel avènement. 

Une fois l’horrible besogne accomplie, il n’y avait pour le gouvernement qu’à attendre quelques heures pour faire sonner clairons et trompettes et envoyer toute une génération mourir au champ d’honneur. Ce qui advint et valut à cette élite bourgeoise et militaire, coupable et corrompue, l’éternel déshonneur.

Se souvenir de Jaurès, c’est essayer de comprendre, encore et toujours, comment l’impensable fut possible, comment des peuples pétris de culture et de progrès technique, embarqués dans la grande aventure moderne, purent se prêter à un tel massacre. Comment la raison qui prétendait guider les pas des grandes nations put abdiquer si facilement pour laisser place à une épreuve dépassant alors tout entendement.

Le jour de son assassinat, Jaurès publiait dans l’Humanité un éditorial intitulé « Sang-froid nécessaire ». Ce fut sa dernière trace écrite. 

Alors que le tourbillon de la haine alimenté par le poison nationaliste faisait tourner la tête des millions de Français et d’européens, le député et journaliste en appelait au « sang-froid ». Quelle incroyable sagesse, alors que nul autre n’avait autant conscience que lui du gouffre qui menaçait d’avaler la civilisation européenne ! 

« De grâce, écrivait-il, qu’on garde partout la lucidité de l’esprit et la fermeté de la raison. » 

« Pour résister à l’épreuve, il faut aux hommes des nerfs d’acier ou plutôt il leur faut une raison ferme, claire et calme. C’est à l’intelligence du peuple, c’est à sa pensée que nous devons aujourd’hui faire appel si nous voulons qu’il puisse rester maître de soi, refouler les paniques, dominer les énervements .»

C’est une grande constante chez Jaurès que de vouloir, en toute occasion, laisser la raison, l’analyse, l’intelligence présider à l’action. Toujours dans ce dernier éditorial, il résumait cette ambition par le jumelage de l’« héroïsme de la patience et l’héroïsme de l’action ».

Ce refus de se laisser étourdir par « le venin de la polémique » était déjà inscrit dans l’éditorial fondateur de l’Humanité, rédigé en 1904.

C’est une leçon, un fil conducteur que nous nous attachons à tisser dans un monde où l’obscurantisme et la vaine polémique s’entretiennent l’un l’autre.

Dans un monde dominé par les pulsions morbides d’un capitalisme mondialisé qui fait de l’argent la fin et le commencement de toute chose, une valeur et un but en soi.

Dans un monde arrimé à la course au profit généré par des marchés financiers, complètement disjoints de l’économie réelle, de la production, des besoins humains et du respect de la nature. Un monde où l’individualisme asséchant et la compétition brutale règnent en maitre et écrasent les aspirations individuelles comme collectives.

Un monde, enfin, où l’invective tient lieu de morale, l’opinion de vérité, le raccourci de pensée, et l’hallali de procès. 

Oui le capitalisme dans sa phase actuelle enfante des monstres obscurs qui peuplent les palais présidentiels à travers le monde des Etats-Unis à l’Europe, de la Turquie au Brésil. Et toute la perversité du moment tient aux faux choix imposé aux peuples de choisir entre cette peste et un prétendu moindre mal qui n’a pour seule fonction que de sauver le système. 

D’autres monstres naissent là où les êtres humains n’ont d’autre horizon que la guerre et la pauvreté, n‘opposant à la misère que l’archaïsme religieux et ses dogmes imposés par la violence. D‘autres, enfin, infiltrent les consciences en propageant sur les réseaux sociaux ou les chaines d’information continue, ces médias aux mains des puissances numériques et financières, la haine de l’autre.  

Chers amis, 

Jaurès eut l’idée de baptiser son journal, avant que son ami Lucien Herr ne lui propose heureusement pour titre l’Humanité, « Lumière ». « Lumière » car il voulait indiquer la filiation de son entreprise éditoriale avec la longue tradition philosophique et politique par la force de laquelle s’écroula le monde d’ombres de l’Ancien Régime et qui combattit ses survivances après la grande Révolution pour fonder, contre les préjugés et sur l’universelle raison, la liberté, l’égalité et la fraternité des hommes et des femmes qui composent notre humanité, quel que soient leurs nations, leurs origines ou leurs couleurs de peau.

Cette tradition sur laquelle vint se greffer le socialisme puis le communisme, espérances universelles qui prolongeaient le combat pour une humanité réconciliée en l’inscrivant dans le mouvement réel, celui d’un antagonisme fondamental instauré par le mode de production et de développement capitaliste.   

C’est encore cette volonté de forger l’action collective sur la raison qui présida aux débats sur la loi de séparation des Eglises et de l’Etat et aux combats pour  une éducation universelle et laïque. «  La République, écrivait-il en 1906, est le seul gouvernement qui convienne à la dignité de l’homme, car elle seule met en jeu la raison et la responsabilité de tous ».

De cet héritage, nous sommes toujours comptables. Le faire fructifier aujourd’hui est l’une des conditions pour redonner à la politique, c’est à dire à la possibilité même d’une action collective, sa grandeur et ses potentialités. C’est faire échouer l’éclatement des sociétés aussi bien que leur unité guerrière, versants d’une même pièce frappée du sceau de puissances d’argent. C’est donner à la classe des travailleuses et des travailleurs la possibilité de fonder une société enfin débarrassée des dominations et des illusions qui les emprisonnent et les divisent. 

Oui, temps obscurantistes quand un nationalisme purulent essaime sous toutes les latitudes, prospère sur les injustices, les dépossessions, la négation de la démocratie et de la souveraineté populaire instruits par la mondialisation capitaliste. Temps obscurantistes quand ce nationalisme prétend s’affirmer comme alternative, parfois maquillé en « souverainisme », cette version rabougrie et frelatée de la souveraineté.  

Aux esprits tentés par la propagande chauvine, Jaurès écrivait en 1898 : « Lorsque des échauffés ou des charlatans crient : “ La patrie au-dessus de tout ”, nous sommes d’accord avec eux s’ils veulent dire qu’elle doit être au-dessus de toutes nos convenances particulières, de toutes nos paresses, de tous nos égoïsmes. Mais s’ils veulent dire qu’elle est au-dessus du droit humain, de la personne humaine, nous disons : Non ! 

Non, elle n’est pas au-dessus de la discussion. Elle n’est pas au-dessus de la conscience. Elle n’est pas au-dessus de l’homme. Le jour où elle se tournerait contre les droits de l’homme, contre la liberté et la dignité de l’être humain, elle perdrait ses titres. Ceux qui veulent faire d’elle je ne sais quelle monstrueuse idole qui a droit au sacrifice même de l’innocent, travaillent à la perdre. »

C’est à cette conception de la nation que nous en tenons toujours. Une nation qui ne se définit pas seulement par ses frontières, pas seulement par son histoire, encore moins par le sang de celles et ceux qui le peuplent, mais avant tout par les principes universels qu’elle édicte et proclame, par l’égalité et la souveraineté qu’elle garantit au peuple qui la compose, et la liberté qu’elle entend laisser aux  peuples qui l’entourent. 

Quelle honte d’en appeler à la nation française pour refuser l’accueil des réfugiés qui fuient guerre et misère jusqu’à risquer leurs vies dans les eaux de notre mer commune ou dans les cols de nos montagnes.

Quelle bêtise d’en appeler à la nation pour défendre je ne sais quelles racines religieuses, je ne sais quel antique terroir opposé aux rivages inconnus.

Quel contresens d’invoquer ses mannes pour refuser l’égalité à celles et ceux qui n’ont pas la couleur de peau ou la religion de ses ancêtres. 

Quel sinistre détournement, encore, que de vider le 14 juillet de toute sa signification révolutionnaire pour en faire la fête du prince et de son armée. 

« On sait ce que signifie pour eux le patriotisme et la patrie : réaction sociale au dedans, violence hypocrite au dehors » prévenait Jaurès. 

On comprend aisément ce qui effrayait et continue d’effrayer les classes possédantes et qu’elles ont parfaitement saisi : oui, la nation française porte dans ses fondements mêmes le dépassement du capitalisme. Jaurès l’avait bien saisi qui, toute, sa vie, travaillât à faire éclore ce qu’il nommait indistinctement socialisme ou communisme dans le sillage des conquêtes révolutionnaires et républicaines, empruntant à Marx et Engels le concept si fécond d’ « évolution révolutionnaire ». 

« Les grands ouvriers de révolution et de démocratie qui travaillèrent et combattirent il y a plus d’un siècle ne nous sont pas comptables d’une œuvre qui ne pouvait s’accomplir que par plusieurs générations. Ils ont donné à la France et au monde un si prodigieux élan vers la liberté que, malgré la réaction et les éclipses, le droit nouveau a pris définitivement possession de l’histoire » écrivait-il en 1904. 

Et en portant le dépassement du capitalisme, la nation porte son propre dépassement: «  [La patrie] n’est pas le but ; elle n’est pas la fin suprême. Elle est un moyen de liberté et de justice. Le but, c’est l’affranchissement de tous les individus humains. Le but, c’est l’individu » précisait Jaurès. 

Oui, la nation française dans ses fondements révolutionnaires porte en elle le progrès social et démocratique, comme l’internationalisme. Les citoyens qui la composent supportent d’autant moins que le capital financiarisé impose sa mainmise sur son destin comme sur celui du monde.

Une mainmise que la crise sanitaire aura révélée dans toute sa crudité et cruauté. L’épreuve que nous traversons est de celles qui poussent autant à la réflexion qu’à l’action. Car c’est toute la construction des sociétés en classes antagonistes que la crise sanitaire et les mesures de confinement auront révélé.  C’est toute l’absurdité d’un mode de production arrimé à la recherche du profit à tout prix et qui écrase autant les hommes que la nature qui nous a sautés aux yeux. 

Comment accepter qu’un système économique ne puisse fonctionner qu’au prix excessivement élevé d’une démultiplication de marchandises qui, pour bon nombre d’entre elles, ne répondent à aucun besoin social et n’ont d’autre fonction que de gonfler le profit des entreprises fondé sur la surexploitation des êtres humains et de la nature.

Comment se satisfaire  qu’un brusque coup d’arrêt de cette machine infernale ait pour conséquence de faire basculer dans la misère des millions de travailleurs, que le sort de l’immense majorité soit lié aux impératifs d’un système dirigé par une infime minorité ? 

La crise sanitaire aura, malgré les drames et les morts, montré une chose fondamentale : toute l’importance des protections collectives et des conquêtes du salariat par la classe ouvrière et ses organisations syndicales et politiques, et grâce auxquelles nous avons évité de bien plus grands drames : assurance publique contre le chômage, sécurité sociale, contrat de travail et protections sociales : voilà l’antidote, voilà le vaccin contre le virus capitaliste !

C’est bien dans la coopération, la solidarité, la mise en commun et le droit social que se situe la République et non dans ces rappels à l’ordre, ces violences policières qui frappent les classes populaires et les mouvements sociaux, cette précarité, cette concurrence. 

La pandémie aura tout autant montré la terrible inversion instituée par le capital : à l’inverse de la promesse bourgeoise de 1789 selon laquelle « Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l'utilité commune », la crise nous a montré que les travailleurs les plus essentiels au fonctionnement de la société, celles et ceux qui furent appelés en première ligne et au sacrifice pour soigner, éduquer, assurer la production et l’acheminement de nos biens et services sont les plus mal considérés et rémunérés. Et dans bon nombre de ces métiers, c’est sans étonnement que les femmes et les travailleurs immigrés ou enfants d’immigrés sont les plus représentés et par conséquent les plus exploités. 

Alors que la crise redouble d‘intensité à la faveur de la crise sanitaire, l’Humain doit pouvoir gagner la souveraineté sur son travail. « Tout individu humain a droit à l’entière croissance. Il a donc le droit d’exiger de l’humanité tout ce qui peut seconder son effort. Il a le droit de travailler, de produire, de créer, sans qu’aucune catégorie d’hommes soumette son travail à une usure et à un joug » écrivait Jean Jaurès en 1901. Il ajoutait, quatre ans plus tard : « La société d’aujourd’hui, qui met le travail d’un côté, le capital de l’autre, enfante le désordre et l’agitation. Elle ne trouvera son équilibre que dans la souveraineté du travail organisé ».

Souveraineté du travail organisé, voilà ce que nous devons collectivement gagner contre la jungle libérale, le détricotage des protections collectives et l’affaiblissement du salariat.

Nous refusons l’infâme projet de mise en concurrences des jeunes avec les travailleurs. Nous refusons la casse de l’assurance chômage comme nous refusons la destruction du système solidaire de retraites par répartition. Toutes ces entreprises ne visent qu’à renforcer les privilèges de la grande propriété et des actionnaires, faisant stagner la République dans sa préhistoire.  

Quand la plupart des titres de presse s’évertue toujours à couvrir non pas le travail mais le capital, à raconter par le menu les mouvements capitalistiques, les destinées de puissants, les fusions et les acquisitions ou la valse des actionnaires, le journal que Jean Jaurès nous lègue continue de sonder les réalités du travail, « par le bas », à éclairer le quotidien des travailleuses et des travailleurs manuels et intellectuels, celui des créateurs , leurs luttes comme leur savoir-faire, l’aliénation qu’il subissent comme l’émancipation qu’ils conquièrent.

Les importants mouvements en cours à travers le monde, appellent l’égalité réelle, le respect de chacune et de chacun, une véritable sécurité humaine dans un monde harmonieux, une sécurité du vivant, une sécurité de vie émancipée. Bref une société et un monde qui doivent se préparer au post-capitalisme.

Chers amis, ce que Jaurès appelait socialisme, coopératisme ou communisme  n’est autre que la réalisation de la promesse révolutionnaire et républicaine, l’extension des droits politiques au champ économique et la prolongation de l’universalisme humaniste par sa mise en question permanente.  Prenons garde à ne devoir, à nouveau, nous attacher à rétablir les droits politiques alors que l’abstention culmine de scrutins en scrutins et que les discriminations entravent l’exercice de la citoyenneté. 

Cet horizon, chers amis, n’est atteignable que par l’organisation politique des producteurs. Elle n’est possible qu’en remplaçant la guerre économique  par la coopération, qu’en conjurant le spectre des guerres militaires que l’incroyable prolifération des armes sur l’ensemble du globe rendrait insoutenables.

Travail souverain, paix, coopération, nature préservée, continuation et perfection de l’idée républicaine, tels sont les enjeux et les combats que l’Humanité, son journal, notre journal, continue, fidèle à sa mémoire, de mettre à la disposition de ses lecteurs chaque jour et chaque semaine. De toutes les œuvres et réalisations de Jean Jaurès, l’Humanité reste la seule vivante et palpable chaque jour. Et comme sa pensée et son action, ce journal ne demande qu’à être investi par vos espoirs et vos combats...

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