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tribunes et idees
republique
201 personnalités appellent à marcher
contre la loi immigration
L’Humanité et Mediapart publient une tribune de personnalités de tous bords - de Sophie Binet à Jacques Toubon, en passant par Josiane Balasko, Fabien Roussel ou encore Marina Foïs -, appelant à manifester le 21 janvier pour exiger la non-promulgation de la loi immigration.
Des manifestants à Rennes, suite au vote de la loi immigration, le 20 décembre 2023.
AFP/Sébastien Salom-Gomis
Il serait faux de dire qu’Emmanuel Macron ne coalise pas. Seulement, le chef de l’État agrège contre lui, ses choix politiques et ses compromissions avec une droite qui n’a plus de républicaine que le nom et une extrême droite revendiquant sa « victoire idéologique ».
Preuve en est avec l’appel à manifester, le 21 janvier prochain, contre sa récente loi immigration, que l’Humanité copublie avec le site d’informations Mediapart. Au total, ce sont plus de 200 personnalités qui entrent ainsi en résistance devant ce « tournant dangereux de notre République » et un texte rédigé « sous la dictée des marchands de haine qui rêvent d’imposer à la France leur projet de « préférence nationale » ».
Un « appel historique », selon le secrétaire national du PCF Fabien Roussel, signataire du texte, puisqu’il rassemble amplement, au-delà des frontières de la gauche. Ce front du rejet unit du coordinateur de la France insoumise Manuel Bompard à l’ancien ministre de Jacques Chirac et ex-défenseur des droits, Jacques Toubon, en passant par Marine Tondelier (Les Écologistes), Olivier Faure (PS), Benjamin Saint-Huile (Liot) ainsi que la députée apparentée Renaissance, Cécile Rilhac.
Mais il s’étend aussi en dehors des sphères politiques partisanes avec les représentants des principales centrales syndicales, dont Sophie Binet (CGT) et Marylise Léon (CFDT), des responsables associatifs comme Dominique Sopo (SOS Racisme), Henri Masson (Cimade) et Véronique Devise (Secours Catholique), des artistes (Josiane Balasko, Nicolas Mathieu, Marina Foïs…), des universitaires et intellectuels émérites (Valérie Masson-Delmotte, Cédric Villani, Pierre Rosanvallon…), et même des personnalités des trois grandes religions monothéistes.
« Si on veut mener le combat prioritaire des valeurs, contre l’extrême droite, il faut un large rassemblement, dépassant les différences politiques et d’engagement. Nous condamnons cette loi parce qu’elle porte atteinte à beaucoup de fondamentaux de notre République et de notre devise », rappelle Patrick Baudouin, président de la Ligue des droits de l’Homme.
L’initiative, née au lendemain du vote de la loi immigration à l’Assemblée nationale le 19 décembre, aboutit autour d’un objectif : rassembler un maximum de personnes dans les rues pour demander à Emmanuel Macron la non-promulgation du texte. « Le président de la République a tout fait pour que cette loi soit « adoptée » avant les fêtes de fin d’année pour qu’on n’en parle plus, explique Fabien Roussel. Mais beaucoup de gens m’ont interpellé pour savoir comment nous allions réagir contre cette loi votée par le RN et qui n’apporte pas les réponses aux grands enjeux liés à l’immigration. »
« C’est un moment de clarification : cette loi est un révélateur, une frontière claire entre celles et ceux prêts à basculer et renier le programme du Conseil national de la Résistance jusqu’à reprendre les thèses de l’extrême droite, et les autres », estime la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet.
Fin de l’universalité des droits, introduction de la préférence nationale, remise en cause du droit du sol, restriction de l’accès au séjour… La députée de l’aile gauche de la Macronie Cécile Rilhac a tranché : « Ce texte grandement issu du Sénat est allé trop loin. J’ai beaucoup réfléchi et je voulais être en cohérence avec moi-même (en signant la tribune – NDLR). Il me paraissait important qu’au sein de la majorité à laquelle je suis toujours attachée, des gens continuent à dire que la loi n’est pas celle du gouvernement pour laquelle nous voulions légiférer. »
« Sous une apparence banale, ce texte me paraît, pour l’une des premières fois, mettre en cause des principes importants, des libertés et des droits sociaux dont tout le monde doit pouvoir jouir sur notre territoire, qu’ils soient nationaux ou étrangers. Savoir si nous allons installer un système de préférence nationale me paraît valoir une prise de position », justifie Jacques Toubon.
« Il faut que nous soyons nombreux le 21 pour faire en sorte de protéger les potentielles victimes de ce texte », espère Marine Tondelier. Il s’agit là d’un enjeu important « pour remettre des points de repères dans le débat public face à l’obsession ethnicisante d’une partie du monde politique », selon Dominique Sopo, président de SOS Racisme. D’où le mot d’ordre de la manifestation du 21 janvier : « Marchons pour la Liberté, l’Égalité, la Fraternité ».
Deuxième convention du PCF pour l’art, la culture et l’éducation populaire.
Quelle humanité voulons-nous être ?
1er et 2 décembre 2023 – Espace Niemeyer. Place du Colonel Fabien Paris
BATAILLE CULTURELLE
Quelle humanité voulons-nous être ? – Deuxième convention du PCF pour l’art, la culture et l’éducation populaire.
Vendredi 1er décembre
18H – 20H - SÉANCE INAUGURALE
IMAGINAIRES, REPRÉSENTATIONS ET POLITIQUE, QUELLE BATAILLE POUR PARTAGER UNE CULTURE ÉMANCIPATRICE ?
« L’unique et la plus belle chose qu’une œuvre d’art puisse accomplir, c’est d’éveiller un autre état du monde » Heiner Müller
Tout concourt à fonder l’espérance du dépassement d’un capitalisme de plus en plus morbide : la misère qui s’étend, le dérèglement climatique, la guerre qui fait rage.
Mais c’est l’imaginaire réactionnaire, conservateur, nationaliste et xénophobe qui occupe la sphère médiatique et politicienne, tandis que les nombreux mouvements contestataires et alternatifs peinent à se faire entendre et à se coordonner dans une dynamique authentiquement révolutionnaire.
Les discours politiques dominants accompagnent ou attisent une profonde crise des représentations symboliques. Il n’est en revanche plus souvent question d’art ou d’éducation populaire, sauf sous l’angle de la crispation identitaire. À mesure que le langage est privé de crédibilité rationnelle et de puissance poétique, les lieux et temps du partage de la métaphore se raréfient.
Comment les artistes, les acteurs et actrices, les militantes et militants de l’action culturelle peuvent-t-ils contrecarrer leur paradoxale invisibilisation du champ de l’action publique et réenchanter les imaginaires ?
Cette convention, qui n’épuisera pas tous les sujets tant ils sont nombreux, a vocation à remettre l’enjeu culturel au cœur des combats communs. Il y a urgence.
Samedi 2 décembre
TROIS TABLES RONDES
9H30 - 10H30
LE TRAVAIL ET SA TRANSFORMATION : UN DÉFI CULTUREL
Les questionnements sur le travail n’ont jamais été si nombreux. Le travail est en crise. Il connaît une crise de sens. Il est trop souvent gâché, abîmé, méprisé.
Malmené par les injonctions à la compétitivité, à la productivité ou à la rentabilité, par le management toxique, il est entravé dans sa puissance émancipatrice. Pour continuer à s’en servir, les forces néolibérales nous servent le discours de la « valeur travail », ce fameux « goût de l’effort » et de la docilité.
La crise environnementale impose de repenser le rapport de l’homme aux activités humaines articulant des exigences sociales et écologiques. Libérer le travail est un gigantesque défi culturel.
11H - 12H30
LA CRÉOLISATION DU MONDE : UN ATOUT DE L’HUMANITÉ POUR UNE AMBITION COMMUNE
Face aux grandes peurs agitées par les droites extrêmes, les nationalismes racistes et guerriers partout dans le monde, il est primordial d’affirmer une humanité plurielle faites de cultures partagées et d’imaginaires ajoutés.
Pour cela il est Indispensable de construire les ponts qui relient les archipels plutôt que les murs qui isolent, enferment, empêchent les circulations, les échanges, les conversations.
Affirmer la créolisation du monde c’est tenter de mettre fin aux imaginaires de dominations et aux imaginaires impérialistes, aux fantasmes identitaires qui infusent dans les représentations du monde et hypothèquent l’avenir. C’est oser la fraternité et la sororité, l’égalité et la liberté.
C’est oser, en assumant les blessures de notre histoire coloniale, sortir de tous les néo colonialismes. C’est oser inventer un nouvel universalisme qui promeut des valeurs humanistes communes en valorisant le multiple, la relation et la coopération durable, solidaire et pacifique.
13H30 - 15H
L’HUMANITÉ FACE À SES LIMITES ET SES DÉFIS, QUELLE PLACE POUR L’HUMAIN DANS L’HUMANITÉ DE DEMAIN ?
L’humanité est confrontée à des défis vertigineux, angoissants parfois, qui placent l’idée même de progrès au cœur d’une discussion incontournable, entre fuite en avant et retour à la terre. Et qui travaillent nos imaginaires.
Le défi écologique nous confronte à la finitude de la planète et aux ravages que lui impose le capitalocène. Nous ne pouvons plus penser le progrès de la même façon. Et pourtant, il faut imaginer l’avenir.
La révolution numérique et son corollaire, l’intelligence artificielle, sont en train d’entrer dans nos vies sans même que nous en ayons totalement conscience. Il ne s’agit pas simplement d’une question technologique, c’est aussi et peut-être d’abord une question anthropologique.
Quelle place pour l’humain dans l’humanité de demain ?
15H30 – 17H SÉANCE DE CLÔTURE
QUEL RÉCIT, QUEL CHEMIN, QUELS HORIZONS POUR DEMAIN ?
Citoyennes et citoyens de monde, artistes, intellectuels et intellectuelles, acteurs et actrices du secteur culturel, comment faire ensemble pour aller vers un monde de Paix, de Démocratie, de Liberté ?
Comment faire face à la montée des nationalismes et des populismes qui travaillent à imprégner les consciences ? Comment enclencher un mouvement pour inventer un monde des communs ? Quelles politiques publiques de la culture, de l’art, de la création et de l’éducation populaire ? Quels mouvements populaires ?
CHRONIQUE
Machine(s)
Vendredi 28 avril 2023
Révolution
L’année 2023 file vite et l’IA, depuis l’apparition dans nos vies quotidiennes de ChatGPT, observe un bond en avant qui effraie autant qu’il fascine. Jusqu’à un certain point. L’Intelligence artificielle sort de la brume, malgré son concept encore flou pour le commun des mortels. Chacun a bien compris désormais, à la lumière de ChatGPT, que les robots en ligne allaient bouleverser l’agencement de nos intelligences au point que certains évoquent déjà une « révolution anthropologique ». Pensez donc.
L’ IA dépasse dans nos fantasmagories tout ce que nous imaginions et permet à n’importe qui de rédiger à la vitesse d’un clavier au galop un poème, un devoir scolaire, une recette de cuisine, un rapport, une histoire pour endormir vos enfants, des lignes de code, de la musique, des photographies sorties de nulle part, bref, tout ce dont vous avez besoin. Ajoutons sans plaisanter : même un article…
Photo
Deux exemples dans l’actualité viennent littéralement de nous stupéfier. Évoquons, d’abord, le dernier lauréat 2023 du prestigieux concours Sony World Photography Awards. L’œuvre récompensée dans la catégorie « création » s’appelle, en français, Pseudomnésie : l’électricienne. Ce magnifique cliché montre deux femmes l’une contre l’autre, de deux générations différentes. Unanimité du jury.
Problème, son auteur, l’Allemand Boris Eldagsen, a immédiatement refusé le prix. Avez-vous deviné pourquoi ? L’homme a reconnu que rien n’était réel dans cette image trompeuse mais d’une illusion parfaite. Elle n’était que le travail d’une intelligence artificielle.
Même les plus avisés peuvent tomber dans le panneau, la preuve, puisque, selon les spécialistes, rien ne « laissait supposer que cette photo n’en était pas une », les coiffures, les vêtements, et surtout la plastique de l’image, au ton sépia, tout cela ressemblait à un document capté dans les années 1950 par un appareil photo argentique. Ayant minimisé l’ampleur de l’aide de l’IA, l’auteur a déclaré vouloir susciter « un débat ». L’image primée a depuis été décrochée en toute hâte d’une exposition officielle. Polémique.
Musique
Arrêtons-nous maintenant sur le second cas, non des moindres. Depuis le 14 avril, un clip musical posté sur le réseau TikTok connaît un succès retentissant : plus de 10 millions de vues. Attribué dans un premier temps aux artistes canadiens Drake et The Weeknd et intitulé Heart On My Sleeve , le morceau fait référence à la chanteuse et actrice Selena Gomez, avec laquelle The Weeknd a entretenu une brève relation sentimentale.
Nouveau problème, aucune des deux stars n’a participé à l’enregistrement de ce titre. Elles aussi sont tombées de haut : l’« œuvre » est le fruit d’une intelligence artificielle, qui a réussi, et plutôt magistralement, à imiter leurs voix et leur style. Derrière la supercherie, un pseudonyme, Ghostwriter977.
Cet épisode montre à quel point le secteur musical, lui non plus, n’est pas à l’abri des technologies d’IA générative, ce qui pose des questions quasi existentielles quant au sacro-saint respect de la propriété intellectuelle et les possibilités inouïes de contrefaçons. L’usage de l’IA doit-il être prohibé pour la création musicale ? Mais comment, et à quel titre ?
L’ineffable David Guetta a déjà utilisé ce genre d’outil pour écrire une chanson dont les paroles reproduisaient le style et la voix du rappeur américain Eminem. De nouveaux styles naissent-ils – aussi – par les nouvelles technologies ? Vaste débat. Information importante : avant d’être retiré, le morceau Heart On My Sleeve avait été publié sur plusieurs plateformes musicales et consulté des centaines de milliers de fois…
Cerveau Devons-nous avoir peur, ou non, de ces machines capables d’influencer nos comportements comme notre capacité à réfléchir, sans parler de notre libre arbitre ? Avons-nous raison de craindre que cette technologie n’octroie aux développeurs du capitalisme une puissance potentiellement démiurge sur toutes les sociétés de l’humanité ?
Précision : inspirée de faits réels mais toutefois alimentée par quelques écrits, cette chronique a bien été pensée par un seul cerveau humain. Le bloc-noteur entre en résistance.
1er Mai un grand rendez-vous social et populaire
Plus personne n’écoute le président
L'Humanité Samedi 22 avril 2023
Concert de casseroles, à Marseille, pour protester contre l'allocution de Macron
AFP
Le Conseil constitutionnel a donc rendu ses avis vendredi 14 avril à 18 heures. L’instance y a relégué les « avancées sociales », gadgets de la droite, que sont l’index senior ou le contrat dernière embauche. On se demande même si ces mesures n’avaient pas été laissées exprès dans le texte, sachant que les « sages » allaient se charger de les supprimer – durcissant le texte au passage. Il ne reste donc que le volet le plus dur, c’est-à-dire l’âge de départ à la retraite à 64 ans, promulgué à 3 h 29 comme une ultime provocation présidentielle.
À vrai dire, nous n’attendions pas grand-chose de la décision du Conseil constitutionnel ; mais il nous a quand même déçus. Il s’agit de juger en droit évidemment, mais l’interprétation par cette instance est foncièrement politique. Il aurait été possible par exemple de se référer aux principes du préambule de 1946 reconnaissant « aux vieux travailleurs la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ».
Pire, ce jugement conforte la méthode d’un exécutif qui est passé par une loi de finances, qui n’écoute pas la majorité du peuple refusant de travailler deux ans de plus pour satisfaire les marchés financiers, qui humilie et bâillonne le Parlement en détournant des articles de la Constitution, qui piétine l’avis des syndicats unis et rassemblés.
Après le refus du premier référendum d’initiative partagée et dans l’attente du deuxième déposé par les parlementaires de gauche, la crise démocratique s’amplifie. Malgré une mobilisation historique, la loi passerait sans avoir été votée à l’Assemblée nationale et par un vote bloqué au Sénat.
Les idées majoritaires portées par les forces du travail, de la création, de la jeunesse ne trouvent aucun débouché dans les institutions. Si le gouvernement pense un instant qu’après quelques jours tout reviendra à la normale et qu’il pourra continuer le train des réformes, il se trompe. Sans changement d’orientation politique profond, le pays restera fracturé.
En plus d’avoir menti sur les chiffres et le montant des pensions, ce qu’a reconnu le Conseil constitutionnel, et refusé de répondre aux attentes populaires, le gouvernement s’est évertué à entretenir la division entre les travailleurs et un climat délétère en jouant la matraque dans un schéma de répression.
Des jeunes humiliés et violentés dans les manifestations, des violences policières légitimées au sommet de l’État, des menaces à peine voilées contre des organisations syndicales, la Ligue des droits de l’homme et l’opposition de gauche : le pourrissement est devenu la norme pour imposer un retour à « l’ordre » et discréditer toute critique. Mais, cette fois-ci, le ressort est cassé. Plus personne n’écoute le président et surtout plus personne ne le croit !
Trop de mépris, trop de provocations, comme cette invitation présidentielle aux forces syndicales pour discuter de l’après et poursuivre le « chemin démocratique ». Cette première année de mandat sonne déjà comme une fin de quinquennat. Dès lors, que faire ? Attendre la prochaine échéance présidentielle et suivre les points d’étape balisés ? Assurément non, d’autant que cela profitera surtout à Marine Le Pen.
La bataille actuelle contre la réforme des retraites doit se poursuivre, évoluer dans ses formes pour ne pas laisser retomber l’élan extraordinaire. Le projet de loi peut être retiré et le référendum instauré pour permettre de faire entendre l’expression populaire. L’unité syndicale, la majorité populaire en sont de précieux atouts.
Faisons du 1er Mai un grand rendez-vous social et populaire historique pour imposer un rapport de force populaire, seule issue démocratique à ces crises qui menacent notre pays.
CHRONIQUE
Isolement(s)
La charge de Pierre Rosanvallon
contre Mac Macron II.
L'Humanité Jeudi 20 avril 2023
Barricade Attention, moment d’Histoire.
Quand les « modérés » prennent soudain la parole et se laissent guider par une forme de « radicalité » – non par effraction intempestive mais par intense réflexion –, il n’est pas inutile de relayer ce qu’ils ont à nous dire par temps de crises.
Ci-devant, Pierre Rosanvallon, historien et sociologue, éminent professeur au Collège de France, toujours directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et membre du très sélect club le Siècle, qui réunit représentants et pontes des milieux dirigeants de notre pays. N’en jetez plus ! Ces derniers jours, Pierre Rosanvallon a ainsi décidé de s’exprimer, d’abord dans Libération, puis dans l’émission de télé Quotidien, sur TMC.
Du brutal, du sévère et, à la vérité, du réjouissant.
Selon lui, « Emmanuel Macron se barricade dans le château fort de sa position statutaire » conférée par l’élection présidentielle. Le spécialiste de la question sociale invite notre prince-président à « rompre » avec cet isolement, « faute de cela », prévient-il, « le temps des révolutions pourrait revenir ou bien ce sera l’accumulation des rancœurs toxiques », qui ouvrirait « la voie au populisme d’extrême droite ». Voilà pour le constat de base, annonciateur d’une aggravation de la situation.
Crise
Sur le fond comme sur la forme, sur la réforme des retraites comme le (mal)traitement de la démocratie républicaine ou l’exercice du pouvoir depuis le palais, Pierre Rosanvallon ne prend pas de gants avec Mac Macron II, à tel point que le bloc-noteur signerait volontiers nombre de ses propos.
« Le président ne voit pas la crise démocratique, pour lui il n’y en a pas », assure-t-il, avant de déplorer que le chef de l’État ait perdu de vue « l’esprit des lois », essentiel pour garder « l’esprit de la démocratie ». Cet « esprit est bafoué ! » assène-t-il.
Et il enfonce massivement le clou : « Nous sommes en train de traverser, depuis la fin du conflit algérien, la crise démocratique la plus grave que la France ait connue. Ce que nous vivons là, c’est la répétition des gilets jaunes, mais en beaucoup plus grave. Aujourd’hui, il y a ce même sentiment de ne pas être écouté. Nous sommes entrés dans une crise qui peut être gravissime parce que c’est une pente glissante. »
Arrogance
Le grand problème de Mac Macron II ? « Il n’a qu’une expérience sociale et politique limitée, étant passé directement de l’ombre à l’Élysée », poursuit Pierre Rosanvallon, ce qui expliquerait son incapacité à trouver des « points d’arrêt ». Plus grave encore : « Il lui a manqué la connaissance et l’expérience qui enseignent une chose importante : la modestie. Et lui, il n’en a pas. Il est empreint d’une arrogance nourrie d’ignorance sociale et de méconnaissance de l’histoire des démocraties. »
Concernant les retraites, pas de doute.
« Il est clair qu’il doit faire demi-tour, reconnaît M. Rosanvallon. Nous vivons une situation de blocage démocratique relativement inédite dans l’histoire de la V e République. Rarement un projet de réforme gouvernementale aura été aussi mal préparé et envisagé sur un mode aussi technocratique et idéologique. (…) La retraite, c’est le rétroviseur de la vie. Cette dimension existentielle n’est pas prise en compte dans le projet actuel. »
Souvenons-nous par ailleurs que Mac Macron II avait déclaré que « la foule qui manifeste n’a pas la légitimité » face « au peuple qui s’exprime à travers ses élus ». Réplique cinglante du sociologue : « Si cette formule avait été prononcée par un étudiant en histoire ou en sciences politiques, celui-ci n’aurait probablement pas eu une bonne note. Le professeur lui aurait expliqué qu’il n’a pas compris ce à quoi renvoie le terme de peuple. (…) Le peuple n’existe qu’au pluriel, et nul ne peut s’en prétendre le propriétaire. Il n’est donc pas “la foule”, une masse que l’on présuppose informe. »
Jugeant que, depuis 2017, « les contre-pouvoirs démocratiques ont fini par être atrophiés par le fait majoritaire », Pierre Rosanvallon espère l’activation d’une « démocratie plus délibérative ». Et il s’interroge, pessimiste : « Encore faut-il que le pouvoir accepte le principe de l’interaction avec la société. » À bon entendeur, salut et merci ! À ceux à qui il reste des yeux pour voir, des oreilles pour entendre et un esprit logique pour comprendre.
La tête dans le flux
Macron, la matraque et le mensonge
Retraites ou démocratie : le gouvernement doit choisir
CHRONIQUE
Bombe(s)
L'Humanité Vendredi 10 mars 2023
Nasse
Les mensonges éhontés comme les ruses politiques de bas étage laissent toujours des traces. Même le quotidien du soir le Monde, dans un éditorial assez cinglant, le notait ainsi cette semaine : « Qui comprend encore la finalité du projet de réforme des retraites qui a été tour à tour présenté comme le moyen de financer les grands chantiers du quinquennat, puis comme la condition sine qua non pour sauver le régime par répartition, puis comme une façon de renforcer “la justice sociale” et “l’équité” ? »
Ironique, le journal ajoutait : « Au point d’incompréhension où il est arrivé, le mieux que peut espérer l’exécutif est que “Les Républicains” acceptent de lui sauver la mise la semaine prochaine à l’Assemblée nationale. Il n’en est même pas sûr. » Mac Macron et sa Première sinistre sont dans la nasse, d’autant que, par une malice délicieusement orchestrée, la majorité sénatoriale de droite débutait l’examen du report de l’âge légal de départ à la retraite (le fameux article 7) au lendemain même où les syndicats réussissaient une nouvelle démonstration de force dans la rue (plus de 3 millions de manifestants) et par les grèves (massives), une journée qui constituera, quoi qu’il arrive, l’un de ces moments historiques de notre Histoire sociale.
Rejet
Nous voilà donc « aux jours d’après », assurément les plus décisifs, sachant que la bataille de l’opinion paraît définitivement perdue pour Mac Macron. Une passionnante enquête d’opinion réalisée par le collectif de chercheurs Quantité critique conforte ce qui n’est plus une impression, mais bien une réalité. « L’opposition à la réforme, qui ne cesse de s’intensifier, touche toutes les catégories d’actifs et est majoritaire chez toutes les personnes en activité », signale d’emblée l’étude.
Ce rejet massif, certes plus fort dans les professions intermédiaires, les employés et les ouvriers, reste ultradominant aussi chez les cadres : 64 %. Vous avez bien lu ! Signalons que cette opposition est moins nettement dominante chez les 65 ans et plus (43 % favorables, 44 % opposés) et évidemment chez les personnes déclarant un niveau de revenus nets supérieur à 4 000 euros par mois (51 % favorables, 42 % opposés). Le collectif Quantité critique précise : « Le soutien aux manifestants, aux grèves et aux blocages atteste de la perte de légitimité du gouvernement et de la possibilité d’un élargissement de la contestation dans les jours à venir. » La seule vraie interrogation, en vérité.
Tournant
L’étude nous apprend par ailleurs un fait qui n’a rien d’anodin : le rejet de la réforme est très proche dans le privé (69 %) et le public (74 %). Le collectif reconnaît que, « loin de se concentrer dans des foyers de contestations classiques, le combat touche toutes les catégories d’actifs à des niveaux très élevés », ce qui renverrait directement à « la détérioration des conditions d’emploi et de travail ».
Personne ne montrera son étonnement de savoir que l’opposition atteint 82 % chez celles et ceux qui ont choisi quatre qualificatifs négatifs parmi les quatre suivants ( « stressant », « dangereux », « répétitif » et « fatigant ») pour décrire leur propre activité professionnelle. Selon le collectif, pas de doute : « La volonté de s’émanciper de la marchandisation du travail est au cœur du débat », bien qu’il ne faille pas confondre secteurs d’activité (fortement syndicalisés) et individus.
Ces derniers, souvent isolés et pas toujours armés pour se mobiliser, alimentent l’opposition dans les sondages mais, sans surprise, constituent dans le même temps une sorte de frein à l’action. Dès lors, nous le savons tous, le mouvement se situe à un tournant entre « la grève par procuration », dont témoignent 46 % d’actifs soutenant la contestation sans y participer, et le recours à la grève (40 %), à la manifestation (43 %) ou aux actions de blocage (35 %).
Le bloc-noteur n’oublie pas deux autres chiffres. Le premier vient lui aussi de l’enquête de Quantité critique : 15 % des actifs n’ont pas encore participé à la mobilisation mais se disent « prêts à le faire ». Le second est issu du sondage Ifop réalisé pour l’Humanité : 65 % des Français se déclarent « favorables » à la grève reconductible. Une véritable bombe sociale et politique.