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Bienvenue sur le blog des communistes de Villepinte

devoir de memoire

70ème anniversaire de la fusillade de Chateaubriant

21 Octobre 2011, 06:50am

Publié par PCF Villepinte

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Numéro spécial de l’Humanité vendredi : 70ème anniversaire des fusillades de Châteaubriant

20 Octobre 2011, 20:09pm

Publié par PCF Villepinte

Médias - le 20 Octobre 2011

 

L’Humanité du vendredi 21 octobre comportera un supplément de 8 pages consacré au 70ème anniversaire des fusillades de Châteaubriant. Des historiens et des personnalités reviendront sur ces tragiques exécutions du 22 octobre 1941.

Ce numéro spécial contiendra :

  • Deux entretiens  avec Pierre Laurent et Bernard Thibault, qui prendront la parole aux commémorations à Châteaubriant
  • Un article sur les valeurs de la Résistance toujours actuelles
  • L’historien Roger Bourderon revient sur la signification de cette fusillade par rapport à la Résistance et à la collaboration
  • La réédition du superbe texte d’Aragon publié dans la clandestinité et qui informait le peuple français des exécutions
  • La publication des 27 photos et des biographies des otages fusillés
  • Un portrait de Guy Môquet
  • Un dialogue entre le secrétaire général de la Jeunesse Communiste  Pierric Anoot et Raymond Aubrac

Ce numéro peut-être commandé en nombre chez les marchands de journaux jusqu’au jeudi 20 octobre à midi

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Henri Malberg : "on a sous-estimé la portée du 17 octobre 1961"

17 Octobre 2011, 11:38am

Publié par PCF Villepinte

Politique - le 16 Octobre 2011

 

 

Militant communiste depuis la Libération, Henri Malberg était présent à Paris au moment de la tragédie. Il revient notamment sur le traitement par l’Humanité de l’époque. « Honneur à ce journal », nous déclare-t-il.

Vous étiez militant communiste parisien à l’époque du 17 octobre 1961. Quel souvenir gardez-vous de ces années de guerre ?

Henri Malberg. J’avais 16 ans au moment de la guerre du Viêt-Nam, 24 ans lors du déclenchement de ce qu’on a appelé les événements d’Algérie, et 32 ans à Charonne. Donc ma génération, celle qui est venue très jeune au communisme au sortir de la guerre, a passé seize années de sa vie à mener le combat anticolonialiste. N’étant pas historien, j’évoque cette période à partir de mes propres souvenirs de cette époque et de tout ce que j’en ai lu depuis. Quand je regarde en arrière, j’ai un sentiment d’honneur en tant que militant, et l’impression d’avoir servi les intérêts de la France qui n’avait rien à gagner à cette guerre. On a du mal à imaginer aujourd’hui ce que furent ces années de la guerre d’Algérie. Des années de lutte farouche du peuple algérien et de leurs dirigeants, mais aussi de résistance du système colonial et impérialiste français allant jusqu’à la barbarie. On a du mal à imaginer ces gouvernements qui furent tour à tour centristes, socialistes, gaullistes, et qui ont nié la réalité de l’aspiration du peuple algérien à l’indépendance, et ont cru pouvoir y faire face par la répression. Ce furent des années très dures, dures aussi politiquement pour les communistes et les gens de progrès  nombreux, intellectuels, étudiants, policiers, soldats, qui ont longtemps souffert de l’isolement au milieu d’un peuple qui, dans sa masse, a longtemps pensé qu’il fallait faire des réformes en Algérie mais sans accepter l’indépendance.

 

Comment avez-vous vécu la soirée du 17 octobre 1961 et les jours qui suivirent ?

Henri Malberg. Quand la journée du 17 octobre 1961 commence, j’ignore que le soir 20 000 Algériens, hommes, femmes, enfants endimanchés vont marcher dans Paris pour protester contre le couvre-feu. Cette manifestation était clandestine, si bien que la masse des Algériens eux-mêmes ignoraient le matin où ils iraient le soir. Les dirigeants du FLN n’avaient pas prévenu la direction du Parti communiste, en tout cas je n’en ai eu aucun écho. Donc, de la journée elle-même, je n’ai pas de souvenir précis. Avec le recul, un regret me vient : peut-être qu’un rassemblement commun du peuple français et des Algériens contre le couvre-feu auraient fini différemment. Mais on ne réécrit pas l’histoire. Les événements du soir, je les apprends donc le lendemain matin, en lisant l’édition spéciale de l’Humanité imprimé dans la nuit. La prise de conscience de la gravité des événements est immédiate : le 17 octobre est un massacre des innocents, un événement rare dans la capitale, une sorte de Commune des travailleurs algériens qui, dans leur masse, étaient des ouvriers accourus des banlieues et des quartiers populaires de Paris.

 

On conteste souvent au Parti communiste et à son journal l’Humanité, son engagement aux côtés des Algériens réprimés le 17 octobre et dans les jours qui suivirent. Partagez-vous cette lecture de l’histoire ?

Henri Malberg. Il est de bon ton aujourd’hui, à la télévision ou dans certains journaux, de dire que le Parti communiste n’a pas fait ce qu’il fallait lors de cette journée et dans les jours qui suivirent, qu’il est coupable, que son journal l’Humanité est coupable. C’est profondément injuste et inexact. En relisant les journaux de cette semaine cruciale, l’émotion m’étreint. Chaque fois, je suis frappé du courage, de l’intelligence politique qui s’exprime dans ces colonnes, et je peux dire, dans cette semaine là : honneur à ce journal. Ainsi, dans la seconde édition imprimée la nuit même, l’Humanité, qui n’avait pu rédiger qu’un encadré dans la une de sa première édition, consacre cette fois une page intérieure entière sous le titre : « Par milliers, les algériens ont manifesté hier dans Paris », avec une photo de la mobilisation prise sur les Grands boulevards. « Il y a des morts », écrit le journal sans pouvoir annoncer de chiffre, « certainement plus élevé » que deux comme annoncé par les dépêches d’agence. Les seuls journaux qui condamnent le gouvernement sont l’Humanité et le Libération de l’époque, celui de d'Astier de la Vigerie. Les autres s’interrogent selon leur ligne politique sur les responsabilités. Le 19, l’Humanité publie deux articles importants. L’un porte sur les «  débrayages hier dans plusieurs usines contre la répression qui frappe les Algériens », qui donne écho aux protestations des salariés de Thomson, Saviem, Renault. L’autre est la publication de la déclaration du bureau politique du PCF, écrite au matin de la nuit tragique, et qui dénonce  la « gravité des événements du 17 octobre », la « brutalité sans précédent » de la « répression contre les Algériens » et « la politique colonialiste du pouvoir gaulliste, illustrée une fois de plus par les sanglants événements d’hier ». Le PCF parle d’un « gouvernement en train d’élargir le fossé creusé entre Français et Algériens par sept années de guerre » et qui favorise la "discrimination et la haine" et compromet « les relations futures entre la France et l’Algérie ». Il en appelle à « la solidarité indispensable des travailleurs français et algériens » pour "en finir avec la guerre d’Algérie". Le PCF conclut en insistant « sur la nécessité de développer l’action unie pour imposer une véritable négociation avec le Gouvernement provisoire de la République algérienne sur la base de l’application du principe de l’autodétermination dans le respect de l’unité du peuple algérien et de l’intégrité du territoire de l’Algérie ». Quelle force politique peut dire qu’elle a tiré dans les vingt-quatre heures un tel enseignement de cette manifestation ? Le 20, l’Humanité rapporte l’interpellation du ministre de l’Intérieur Frey par le député communiste Jacques Duclos : « Qui a donné l’ordre de tirer ? » lui demande-t-il, tandis que le journal mène l’enquête et pose les questions qui dérangent : « Combien y a-t-il eu de morts au cours des nouvelles manifestations d’Algériens » du mercredi 18 ? « Est-il exact que 12 Algériens ont été, la semaine dernière, précipités dans la Seine ? » Toute la semaine qui suit et au-delà, le journal relate sans relâche les débrayages dans les usines, les manifestations de protestation d’Algériens, d’étudiants, de la Jeunesse communiste rassemblant « plusieurs milliers de jeunes » tenant « des meetings, des assemblées », organisant des « délégations à l’Elysée ». Et continue les révélations et les témoignages directs de violences, de brutalités, de gens morts. De cette lecture, il ressort que le 17 octobre, contrairement à ce que j’ai lu, n’a pas provoqué d’indifférence dans la partie la plus avancée du peuple français. Au contraire. Et au sein de la réaction de masse des communistes, les élus communistes se sont montrés particulièrement actifs. Lors d’une séance extraordinaire du Conseil de Paris qui suit le massacre, les élus communistes interrogent brutalement le préfet de police en lui demandant des comptes sur les noyés, les gens tués, les gens matraqués, les Algériens expulsés. C’est un moment dramatique, durant lequel le préfet accuse les Algériens de tirer sur les policiers, et prétend qu’il n’y a à déplorer que deux morts la nuit du 17. A l’Assemblée nationale, Robert Ballanger, au nom des communistes, dénonce les « brutalités sauvages » des forces de répression.

Cette journée s’inscrit dans une période d’affrontements durs, cet automne-là, à vous entendre, comme si la violence avait atteint son paroxysme après sept ans de guerre. Pourtant, il faudra moins de cinq mois, à partir de cette date, pour en finir avec la guerre d’Algérie. Peut-on parler alors du 17 octobre 1961 comme d’un « tournant » ?

Henri Malberg. On ne peut pas appréhender le 17 octobre comme si c’était un acte isolé, une tragédie incompréhensible dans ses origines, et sans prendre en compte son devenir. Nous sommes en 1961, la guerre dure depuis sept ans, la France et les pouvoirs qui se sont succédé ont tout essayé pour briser la résistance du peuple algérien. Ils se sont accrochés farouchement à ce morceau d’Empire, à ce pays qui comptait un million d’européens sur dix millions d’habitants. Ce conflit a connu plusieurs phases. En 1954, au début de la guerre, on traite l’insurrection algérienne par le mépris, comme un groupe de terroristes minoritaires, fanatiques, qui ne représente pas le peuple algérien, et on prend des « mesures d’ordre » qui cache une sauvagerie sans nom, c’est le temps des massacres du Constantinois. Pour le  gouvernement de Pierre Mendès-France, l’Algérie ce n’est pas le Viêt-Nam. Le ministre de l’Intérieur, François Mitterrand, déclare : « L’Algérie, c’est la France ». Mais cette politique de répression échoue, alors que monte en France la volonté de ne pas s’engager dans une nouvelle guerre : les premiers envois du contingent provoque des manifestations, des casernes se révoltent et refusent de partir en Algérie. Cette volonté de paix débouche, aux élections du 2 janvier 1956, sur une victoire du Front républicain mené par le Parti socialiste et un grand succès du Parti communiste qui, avec 25,36 % des voix,  fait élire 150 députés. L’idée majoritaire est alors qu’il faut éviter la guerre en Algérie en privilégiant la recherche d’une solution politique. Une chance historique se présente, qui aurait pu, si elle avait été saisie, épargner les vies de centaines de milliers d’Algériens et de 30 000 jeunes soldats français. Que de souffrances, que de deuils, que de honte auraient ainsi été évités. L’histoire en a décidé autrement : le premier ministre socialiste Guy Mollet chassé d’Alger sous les tomates des partisans de l'Algérie française, engage le contingent, avec un mot d’ordre en apparence de gauche : celui du combat de la République laïque de liberté, d’égalité et de fraternité contre les forces obscures. C’est terrifiant. Ce sont ces mêmes arguments que l’on retrouvera plus tard chez Reagan et sa lutte contre "l’Empire du Mal ". Mais Guy Mollet aussi échoue, avec le coup de force d’Alger du 13 mai 1958 qui ramène De Gaulle au pouvoir. Pendant deux ans, ce dernier fait tout pour gagner la guerre. Il propose la paix des braves en exigeant la capitulation des Algériens qui la refusent, et c’est à l’issue de ces trois temps que s’annonce 1961, année centrale parce que c’est durant cette année que De Gaulle arrive à la conclusion que la France ne pourra pas gagner la guerre et que le principe de l’autodétermination du peuple algérien est adopté. Rappelons-nous le contexte : le 23 avril 1961, le coup de force des généraux d’Alger est brisé par la résistance de De Gaulle et le soutien à la République qu’affirment les communistes, les syndicats, la majorité du peuple et du contingent, qui refuse de suivre les ultras de la guerre. Simultanément naît l’OAS, organisation fasciste, tandis que les négociations se poursuivent avec le gouvernement provisoire de la République algérienne, et qu’un véritable front hostile à la guerre s’est mis en place, comprenant les intellectuels, les syndicats, les communistes, qui s’élargit sans cesse au rythme effréné des manifestations. C’est dans ce contexte de tensions et de violences que survient le 17 octobre, mouvement de révolte des Algériens de métropole qui refusent la chasse au faciès et le statut de citoyen de seconde zone, malgré la violence de la répression. C’est ce mouvement que Papon et le gouvernement choisissent de briser, parce qu’il contribue à la recherche d’une solution pacifique en Algérie, en montrant la force des Algériens de France. Le 17 octobre 1961, c’est donc une répression sauvage, mais ce n’est pas que cela : c’est aussi un moment politique majeur, d’autant plus que dans l’appareil d’Etat une partie des gens qui soutenaient De Gaulle l’ont lâché. Après l’année cruciale 1961, on s’approche de la semaine cruciale, celle qui entoure la manifestation de Charonne, en février 1962.

Le massacre de Charonne s’inscrit-il dans le prolongement de la nuit du 17 octobre ?

Henri Malberg Le 17 octobre 1961 est le prélude à ce que j’appelle la semaine décisive, parce que c’est elle qui donne le signal que, cette fois, on va en finir une bonne fois pour toutes avec cette guerre, et aller vers le droit à l’indépendance du peuple algérien. L’OAS, qui sent le vent tourner, installe la guerre en France. C’est en réaction à ses agissements qui choquent l’opinion que la  manifestation de Charonne a lieu, sous le mot d’ordre : « A bas le fascisme, OAS assassin, paix en Algérie ». Après le crime de Charonne, la cause est entendue parce que converge un mouvement populaire irrésistible en France. Charonne reste une grande date dans l’Histoire de France. Les obsèques de Charonne sont à la fois un acte de douleur et de souffrance mais aussi l’une des plus grandes manifestations politiques de l’histoire d’après guerre. Les grèves et ce million de gens qui viennent crier leur peine au Père Lachaise, c’est immense et, objectivement, c’est ce qui donne les forces à De Gaulle pour conclure la paix, parce que le peuple a dit assez, parce que De Gaulle veut mettre fin à cette guerre, et puisque l’OAS est isolée. Les obsèques ont lieu le 13 février, les accords d’Evian sont signés le 18 mars. Il y a donc bien une année de basculement, et le 17 octobre en est un moment.

 

Des questions subsistent sur la ligne du PCF durant toutes ces années de guerre. On lui a souvent reproché de ne pas avoir donné de mot d’ordre clair en faveur de l’indépendance algérienne, lui préférant celui de paix en Algérie, souvent perçu comme une marque de distance vis-à-vis de l’aspiration nationale algérienne. Selon vous, le PCF a-t-il failli à son engagement anticolonial concernant l’Algérie, ou sa position a-t-elle été caricaturée ?

Henri Malberg Que l’on ait été caricaturé, c’est clair, puisque, dans tous ses textes fondamentaux, le PCF est tout à fait convaincu que l’indépendance est au bout du chemin. Cela vient de très loin : Maurice Thorez parlait déjà, avant la guerre, de l’Algérie comme d’une nation en formation. La position s’infléchit certes après la guerre, où le PCF soutient, en 1946-1947, la création de l’Union française, que même Ho Chi Min, à un moment donné, a considéré comme une voie possible dans le contexte d’après-guerre, avec la poussée des forces progressistes, le programme du CNR et la présence des communistes au gouvernement, qui ont fait espérer une union de peuples permettant à ces pays de trouver un chemin d’émancipation. Mais la Guerre froide, la passion impérialiste de la bourgeoisie française et le profit qu’elle tirait de la colonisation ont fait rapidement de cette issue une utopie appartenant à l’Histoire. Reste que le mot d’ordre de paix en Algérie est une question très complexe, qui nous a fâchés avec des gens. C’était bien plus dur que pour le Viêt-Nam. Parce que l’Algérie est de l’autre côté de la Méditerranée, parce qu’elle comptait un million d’Européens sur dix millions d’habitants. Nous étions tenaillés par l’idée de ne pas demeurer un petit groupe isolé de la majorité du peuple, et de gagner cette majorité à nos vues. Dans cette optique, l’idée arrêter cette guerre, de faire la paix et de ramener le contingent était le mot d’ordre le plus juste. Et pendant longtemps, nous avons été quasiment les seuls à agir en ce sens. Lorsque le mouvement a gagné en force, des intellectuels et des communistes ont alors monté le réseau Jeanson d’aide au FLN. En tant que parti politique, nous avons considéré que ce type d’actions ne menait nulle part et contribuerait à nous isoler. Avec le recul, je regrette ce que j’ai pensé de ces gens. C’était leur conscience, nous étions du même côté de la barricade, même si je persiste à penser que nous aurions commis une erreur historique en les imitant, car l’évolution décisive dont j’ai parlé n’aurait peut-être pas eu lieu. Alors bien sûr, les communistes n’ont pas toujours eu, à la minute près, le bon mot juste, le bon éditorial, la bonne attitude. Mais j’observe qu’il est quand même insupportable que, alors que toutes les grandes formations politiques, droite comme PS, ont été au-dessous de toute dignité dans cette histoire, on ne parle jamais de leur attitude : eux ont tous les droits de se tromper, les communistes aucun. Mitterrand a quand même laissé guillotiner plusieurs dizaines d’Algériens quand il était Garde des Sceaux de Guy Mollet ! Et on voudrait nous dépeindre comme inhumains, dans le sens d’une intelligence supérieure qui à chaque moment doit deviner la suite de l’histoire ? Non, cela ne se passe pas ainsi.

Les critiques se cristallisent sur un moment particulier : celui du vote des pouvoirs spéciaux à Guy Mollet, le 12 mars 1956, qui sert d’exemple pour affirmer que, finalement, le Parti communiste ne s’est pas distingué des autres partis ou, pour le moins, n’a pas été plus vertueux. Qu’en pensez-vous ?

Henri Malberg L’épisode des pouvoirs spéciaux n’a duré que trois mois. Des camarades pensent aujourd’hui que c’était une erreur, car selon eux, la suite était inscrite, et donc, en réfléchissant bien, nous n’aurions pas dû voter les pouvoirs spéciaux à Guy Mollet. Je continue à penser quant à moi qu’il fallait le faire, pour des raisons simples : le peuple avait voté massivement pour une politique de paix en Algérie, Guy Mollet se présentait non pas comme un ultra mais comme un homme qui voulait les pleins pouvoirs pour trouver des solutions politiques. Je préfère endurer le reproche que nous avons eu tort au regard de la suite des événements, plutôt que celui de n’avoir pas saisi la chance de mettre fin à cette guerre, quand bien même il n’y en avait qu’une sur mille. Le vote des communistes n’avait rien à voir avec une carte blanche accordée à Guy Mollet : au contraire, notre vote était conditionné à l’application d’une politique bien définie. Et on peut relire cette explication de vote un demi siècle après avec honneur. Ceci étant dit, nous ne sommes pas à chaque instant comptable de l’avenir du monde, l’histoire nous a montré d’ailleurs que c’est lorsqu’on croit cela que l’on commet les erreurs les plus lourdes.

Comment expliquez-vous le relatif silence qui entoure les événements d’octobre 1961 au regard des intenses commémorations de Charonne ?

Henri Malberg Je pense que, pendant longtemps, on a sous-estimé la portée du 17 octobre 1961. Pendant des années on s’est tu là-dessus. Tenant compte que Charonne s’est produit à la toute fin de la guerre d’Algérie, il est logiquement devenu le moment clé, historiquement. Mais cela commence à changer. Avec le retour de l’intérêt pour l’histoire dans la vie politique française, les langues se délient autour de la signification du 17 octobre 1961. Cinquante ans après, au lieu de se concentrer uniquement sur le dénouement, apparaissent aujourd’hui plus clairement les points forts de cette histoire. Ceci dit, il ne faut pas en rajouter, on ne découvre quand même pas aujourd’hui ce que fut cet événement. Il n’y a qu’à lire l’Humanité Dimanche d’il y a vingt ans pour s’en convaincre, où j’ai retrouvé une page tout à fait remarquable. Mais le lien entre le 17 octobre et Charonne s’établit davantage aujourd’hui à mes yeux comme l’une des « arêtes » de cette histoire.

Que s’est-il passé exactement la nuit du 17 octobre 1961 ? De Gaulle y a-t-il joué un rôle ? Ou s’agit d’une répression déclenchée par les ultras pour contrecarrer le chemin vers l’indépendance ? Et dans ce cas, ce massacre n’a-t-il pas desservi d’abord la cause des assassins en créant un basculement dans l’opinion en faveur de la fin de la guerre ?

Henri Malberg Sur le dernier point, je pense que oui, car à cette époque, je le répète, les assassins tuaient tous les soirs. Le 17 octobre manifeste le sentiment massif de la population et des travailleurs algériens, et il a des conséquences profondes sur l’opinion française malgré les manipulations médiatiques et les mensonges du gouvernement. Plusieurs écrivains et historiens ont tenté de dresser un bilan des morts. Ils continuent de diverger, l’écart allant de 50 à 200 tués. Mais la certitude est qu’il s’est agi d’un vrai carnage. Quant aux responsabilités, Papon a assumé la répression, le ministre de De Gaulle, Roger Frey, a couvert Papon, lequel Papon avait clairement donné carte blanche à ses policiers dans la semaine précédant le massacre en promettant de les couvrir. Il a fait passer cette consigne dans les commissariats en s’appuyant sur le ressentiment créé par l’exécution de policiers par le FLN. Quant à De gaulle, ma conviction  personnelle est que je ne l’imagine pas disant : « Tuez deux cents arabes ». Mais je pense qu'il ne voulait pas être sous la pression de la rue au moment où les discussions se poursuivaient avec les Algériens. Je pense, mais je n’en ai aucune preuve, que sa volonté était de faire régner l’ordre pour avoir les mains libres dans ses négociations avec les Algériens. Comme déjà durant la Résistance, il n’a jamais aimé l’intervention populaire, se réservant sa liberté de choix politique. Et puis il n’appréciait pas dans ce moment l’action des communistes, même s’il en tenait compte. En tout cas, l’instruction est venue d’en haut, on ne déplace pas des milliers de policiers sans ordre du pouvoir.

 

A lire :

Entretien réalisé par Sébastien Crépel

 

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Le besoin d'apprendre, un texte de John Berger

28 Août 2011, 07:24am

Publié par PCF Villepinte

Monde - le 27 Août 2011

 

Mots clés : Affaire DSK,

 

 

 

John Berger revient sur l'affaire Strauss Khan, en passant par le prisme plateau des Glières. C'est un écrivain engagé, romancier, auteur de nouvelles, peintre, critique d'art et scénariste britannique.

Commentez sur le besoin d’apprendre et l’ignorance irresponsable. L’intitulé ressemble à un sujet d’examen dans quelque établissement pédagogique. Mais ici, c’est celui du récit d’événements qui se sont produits le même week-end.

Vendredi 13 mai 2011, la pleine lune luit au-dessus des Alpes françaises. L’air est très clair, on voit ses cratères à l’œil nu. A New York, Dominique Strauss-Kahn, le président du Fonds monétaire international (FMI) et candidat probable du Parti socialiste aux élections présidentielles françaises, a réservé une suite à 3 000 dollars la nuit à l’hôtel Sofitel de Manhattan.

Samedi 14, dans la petite ville de Thorens-Glières, en Haute-Savoie, plus d’un millier de personnes venues de toute la France participent à un Rendez-vous citoyen pour débattre et réfléchir sur les stratégies de Résistance, armée et politique. D’anciens résistants français ayant combattu l’occupation allemande évoquent sereinement leur expérience d’il y a soixante-dix ans. L’heure n’est pas à lancer une campagne politique, mais à s’interroger ouvertement, entre générations, sur le comportement à adopter, sur les moyens de protester face à l’inacceptable.

L’après-midi de ce même samedi, des policiers new-yorkais font descendre Dominique Strauss-Kahn d’un avion qui s’apprête à décoller pour Paris. Le directeur du FMI voyage en classe affaires et sa réservation a été effectuée plusieurs jours auparavant. Son arrestation fait suite à une plainte déposée contre lui pour tentative de viol.

Tôt le matin du dimanche 15, cinq mille personnes entament leur montée, la majorité en voiture, jusqu’au plateau des Glières, situé à 1 500 mètres au-dessus de la ville de Thorens.

C’est un matin venteux, nuageux et froid. Sur le plateau, un monument se dresse en hommage à la Résistance armée française des années 1943-1944 contre les nazis allemands, les fascistes italiens et le gouvernement collaborationniste de Vichy. Les gens s’y rendent en pèlerinage ou pour visiter ce site historique.

La route qui monte aux Glières, longue et étroite, comporte de nombreux virages en épingle à cheveux. Le pays est sauvage – au sens géologique du terme– escarpé, accidenté, rocheux, massif. La montée oblige à changer continuellement de direction. Elle fait penser aux pistes tortueuses de l’Histoire.

La Savoie est la seule région de France qui s’est libérée de l’occupation allemande sans l’aide de forces extérieures. Cette libération fut le fait de résistants appartenant à des groupes de tendances politiques différentes, et équipés en majorité d’armes et de munitions parachutées sur le plateau des Glières par des avions de la RAF, sous la direction du général de Gaulle, à Londres. Un bataillon de 400 maquisards était alors chargé de récupérer les armes et de les distribuer. Plus d’un quart d’entre eux n’ont pas survécu, victimes de messages confus, d’actions contradictoires, d’informateurs et de la neige. Beaucoup d’hommes furent torturés avant d’être assassinés par la Milice– la police de Vichy.

Le mémorial ne rend pas hommage à une brillante victoire, mais à une détermination farouche à résister. Ce dimanche-là, le soleil fait de brèves apparitions, mais la plupart du temps, des nuages de brume glacée réduisent la visibilité à quelques centaines de mètres, et le monument est invisible.

A côté d’un bâtiment en pierre qui sert de refuge aux skieurs de fond et aux pèlerins occasionnels, une petite tribune en bois, au toit de fortune fait d’une toile, a été installée à l’intention des intervenants qui vont s’adresser aux cinq mille personnes – à peine plus grande qu’un théâtre de marionnettes. Elle est munie de deux micros, la toile claque dans le vent, et, un peu plus loin, des haut-parleurs fixés sur de grands mâts font face au versant où les gens s’installent, assis dans l’herbe, les anoraks zippés jusqu’en haut. Certains, préférant être plus près de la tribune, restent debout. Les anoraks sont de toutes les couleurs, et les gens d’âge différent.

Qu’est-ce qui les a amenés là ?

Après la libération, en 1944, le Conseil national de la Résistance élabora un texte esquissant dans ses grandes lignes la France qu’il espérait désormais voir naître : un pays bénéficiant de la sécurité sociale, d’un enseignement gratuit de qualité, de services de santé publique, de garanties sur les conditions de travail et les salaires, et de médias indépendants du gouvernement et des grandes entreprises.

Ce programme, qui suscita des controverses et des débats permanents, fut mis en œuvre, bon an mal an, entre 1946 et 1952. La France devint un pays où s’exerçait un certain niveau de justice sociale et de responsabilité démocratique, et où la question de maintenir ou d’améliorer cette justice faisait l’objet d’un débat continuel, parfois tumultueux. Elle tint bon jusque dans les années 1980.

Puis le nouvel ordre économique de la mondialisation, des multinationales et de l’hégémonie du capitalisme financier, basé sur la spéculation et la dette, amorça sa marche en crabe planétaire, et atteint la France. Les partis politiques de gauche et de droite tentèrent de marchander et de biaiser, avant de céder. Le vocabulaire politique changea. La Flexibilité chassa la Solidarité. La France d’une certaine justice et fraternité commença à s’effondrer et rien ne fut fait pour la réparer.

Après l’élection de Nicolas Sarkozy à la présidence en 2007, les perspectives économiques et sociales connurent un changement dramatique. Le système tout à la fois chaotique, passionné et dilapidé de la sécurité sociale et de la justice allait être systématiquement démantelé aussi vite que possible. Selon Sarkozy et ses conseillers, tout ce qu’il représentait était devenu obsolète.

La moitié des gens aux Glières s’étaient munis de parapluies. Certains en avaient apporté deux. Quand il commença à grêler, ils en ouvrirent un et offrirent l’autre à ceux, assis ou debout à leurs côtés, qui n’en avaient pas.

Pendant sa campagne électorale pour les présidentielles, Nicolas Sarkozy avait effectué un déplacement hautement médiatisé au plateau des Glières, où il avait annoncé que s’il était élu président, il s’y rendrait une fois par an pour honorer les héros de la Résistance. Il avait remarqué en passant que le lieu était empreint d’une “sérénité” particulière.

Au lendemain même de cette visite, d’anciens résistants et porte-parole de la Résistance, ainsi que des défenseurs plus jeunes de la justice sociale créaient une association, Citoyens Résistants d’Hier et d’Aujourd’hui. A une date donnée en mai de chaque année, l’association appelle à un rassemblement aux Glières afin de manifester son opposition au démembrement de la France que la Résistance s’est battue pour réaliser.

C’est ainsi que cinq mille personnes se sont retrouvées aux Glières un dimanche matin, à écouter, à poser des questions, à réfléchir.

Pas de bannières ni de slogans. Seulement des mots, des phrases, qui s’échappent des haut-parleurs dans l’air de la montagne et les rafales de vent. La grêle s’arrête. Un rayon de soleil réchauffe l’assistance. S’abattent alors des grêlons plus gros encore, puis l’averse cesse. Entre les discours, il règne le genre de silence attentif qu’observent les animaux qui ont lancé un appel et attendent qu’une réponse leur parvienne du lointain.

Les mots dépeignent des expériences. Ceux de Walter – arrêté par les Allemand à l’âge de 17 ans et envoyé au camp de concentration de Dachau –racontent ce que l’on ressent quand on pense aux camarades qui ne sont jamais revenus.

Ceux de Jean-Pierre, le sort réservé en France aujourd’hui aux travailleurs étrangers sans papiers.

Ceux de Didier, le prix du lait payé par les multinationales aux éleveurs bovins, et la clause obligatoire figurant dans leur contrat, qui leur interdit de protester.

Ceux de Radhia, les tortures subies par les combattants de la liberté en Tunisie aux mains des forces de sécurité encore au pouvoir.

Tous ces mots, comme ceux qui les écoutent, ont les pieds sur terre.

Corinne est caissière dans un supermarché de la ville voisine d’Albertville. Elle est là avec cinq de ses collègues, et ses mots racontent leur refus de travailler le dimanche matin afin de pouvoir passer la journée avec leurs enfants. Toutes les cinq risquent d’être licenciées.

Tous ces mots posent une question : comment dire Non ? Avec le temps, comment dire Non ?

Le même après-midi, à Madrid, des jeunes occupent la Puerta del Sol pour protester contre les ravages des mesures d’austérité imposées au gouvernement espagnol par le FMI. Cette occupation est suivie par d’autres, dans d’autres villes d’Espagne. Ce mouvement spontané de jeunes réfractaires a pris le nom de M-15, en référence à la date du 15 mai.

A New York, plus tard dans la même journée, Dominique Strauss-Kahn, défait, sort d’un commissariat de police de Harlem, menotté, placé en détention provisoire avant d’être jugé. Ce scandale a déjà suscité d’innombrables commentaires. La lumière ne sera probablement jamais faite sur ce qui s’est passé exactement entre lui et la femme de chambre dans la suite du Sofitel. Pourtant, personne ou presque n’a relevé qu’indépendamment du fait qu’il soit innocent ou coupable, indépendamment de ce qu’il a fait ou n’a pas fait, si l’on pense au lieu, aux circonstances et au moment historique où s’est déroulée l’affaire, DSK a fait preuve d’une ignorance incroyable des conséquences probables ou possibles de tout geste de sa part. L’ignorance et l’innocence sont deux choses très différentes. Mais parfois, elles prennent la même expression faciale. Comment expliquer cette ignorance ?

L’explication ne relèverait-elle ni de la morale ni de la pathologie, mais de l’idéologie ? Le FMI, dont DSK était le directeur, procède suivant une logique complexe qui est irréelle, concentrée sur le virtuel, sur la spéculation quant au risque, sur les tendances et l’estimation de la profitabilité, sur la constante d’une confiance jamais acquise de la part des investisseurs. Dans une perspective aussi irréelle, ce qui se passe sur le terrain, comme toute autre forme de dommage collatéral, est secondaire et ne porte pas vraiment à conséquence. En général, selon cette logique, c’est quelque chose que l’on peut ignorer.

Le dernier intervenant aux Glières est un jeune homme dont les mots – c’est certainement la première fois de sa vie qu’il s’adresse à une assemblée si nombreuse – racontent son travail à Paris avec les sans-abris qui squattent les immeubles inoccupés.

Il termine son récit, aussi modeste que le trolle d’Europe – une fleur qui pousse dans les alpages à cette altitude : si on la cueille pour la mettre dans un verre, elle penche la tête très rapidement – en reprenant les mots d’un ancien combattant : « Créer, c’est résister, résister, c’est créer. »

La grêle est passée. On a refermé les parapluies. Le vent est encore glacé. Des écharpes sont proposées à ceux qui veulent en emprunter une. On éteint les haut-parleurs. L’herbe est boueuse. Une grand-mère met en garde : attention à ne pas glisser ! Et, prenant leur temps, les gens discutent par petits groupes de ce qu’ils ont appris. De ce que leur ont appris des expériences sur le terrain.

Traduit de l’anglais par Claude Albert, ce texte, envoyé par l’auteur à Humaginaire et publié avec son autorisation, est paru aussi dans Le Monde diplomatique en español, La Jornada (Mexique) etClarín (Argentine).

 

Thomas Lemahieu

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"Ne pas taire l'indicible"

23 Août 2011, 06:45am

Publié par PCF Villepinte

 Allocution de Cécile Goutmann à l'occasion de la cérémonie de la cascade du bois de Boulogne, le 21 août 2011.

 

Madame,

Monsieur,

Voilà plus de soixante ans, que des femmes et des hommes se réunissent chaque année, devant cet arbre qui porte encore les stigmates du drame qui s'est déroulé ici même dans la nuit du 16 au 17 août 1944.

Nous nous réunissons pour rendre hommage aux trente cinq résistants victimes de la barbarie nazie à quelques jours seulement de la Libération de Paris et de sa banlieue.

Pour comprendre l'enchainement historique des faits ayant conduit à ce drame, de vastes travaux de recherches ont été menés, inlassablement, notamment par le regretté Adam Raysky, qui fut l'un des personnages importants de la Résistance. Malheureusement, encore aujourd’hui, des zones d'ombre subsistent.

Mais voilà ce que nous pouvons dire avec certitude :

Informés d’une possible livraison d'armes qui leur permettrait de prendre part activement aux combats qui pressent au cœur de la capitale, plusieurs groupes de résistants se sont trouvés pris dans un sinistre piège orchestré par le dénommé Marcheret qui, se faisant passer pour un envoyé de Londres, s’est avéré être un agent de la Gestapo.

Arrêtés à leurs différents lieux de rendez-vous, dans un garage rue d’Armaillé dans le XVIème et à la Porte Maillot, ces hommes sont torturés dans divers sièges de la Gestapo à Paris (Rue de Saussaie, Avenue Foch et Rue Leroux)

Le 17 Août au matin, on retrouvera les corps inanimés de sept résistants au pied de l'immeuble de la Gestapo au 10 de la Rue Leroux.

Les autres, au nombre de trente-cinq, seront emmenés au cours de cette même nuit du 16 au 17 Août, dans cette clairière où nous nous trouvons, et exécutés au fur et à mesure qu'on les fera descendre des camions, à la grenade et à la mitraillette.

Les corps affreusement mutilés sont découverts le 17 au matin par un moniteur de l'École des Cadres de Bagatelle.

Dès les premiers jours suivant la Libération, l'épisode tragique de la Cascade émeut la France entière par l'horreur des faits bien sûr mais également par le symbole qu'il porte de la froide sauvagerie de l'occupant jusqu’aux derniers jours de sa défaite.

En effet, ce massacre n'a pas pris pour victimes des civils innocents, non plus des hommes en armes, cela ne s'est pas produit de manière inopinée. Bien au contraire, ce massacre a été théâtralisé, mis en scène pour liquider de la manière la plus ignoble l'intention libératrice de résistants impatients de participer par eux même à la libération de la capitale.

Ce n'est donc pas un hasard si précisément les survivants de la Résistance l'ont particulièrement retenu pour leur hommage.

Années après années, nous continuons donc de nous souvenir de ces hommes qui sont entrés dans nos vies, qui ont marqué notre histoire et l'Histoire, de manière indélébile et profonde.

Nous devons alors nous interroger sur le sens à donner à rendez vous et sur la conception au fond, que nous avons du devoir de mémoire.

Puisque ce n’est pas une victoire militaire que nous honorons, puisque ce n’est pas non plus l'atrocité de leur mort même si le froid calcul de ce piège est particulièrement choquant, alors pourquoi sommes nous ici ?

Ce que nous honorons au fond, c’est le courage et la détermination de ces hommes, jeunes et moins jeunes, qui ont payé de leur vie, leur engagement dans la résistance, leur volonté de bouter dehors l’occupant, d’affranchir l’humanité de l’idéologie nazie.

D’ailleurs, pourquoi parler, comme on le fait souvent, des « jeunes » de la cascade, alors que parmi eux, il y avait des résistants aguerris au fonctionnement des réseaux de la résistance. Mais nous le savons bien, la question essentielle ne se situe pas dans leur degré de maturité supposé mais bien de tenter de comprendre l’essence même de leur engagement.

Comme nous le suggère Stéphane Hessel, l’indignation a du être un moteur puissant et en l'occurrence leur indignation face à l’idéologie nazie qui annihile tout part d’humanité dans l’Homme et dans la société.

Mais il y a eu aussi l’engagement : c’est à dire l’action et dans l’action, la certitude du risque et donc la possibilité de la mort.

Au delà de l’admiration que nous devons à cet engagement, à ce courage, il nous faut donc tenter de comprendre pourquoi au péril de leur vie, ces hommes ont placé l’avenir commun avant leur propre devenir.

Ont-ils eu conscience que la liberté individuelle, l’émancipation de chacun ne peut exister que dans le cadre d’une société commune, que la destinée des hommes n’est pas l’addition de trajectoires personnelles mais mérite bien une construction collective ?

C’est d’ailleurs à ce prix que s’est construit la Résistance dans sa diversité mais également dans son unité. A ce titre, l’épisode de la Cascade est une illustration de la pluralité des courants de la résistance puisque l'on trouve aussi bien le groupe « Francs-Tireurs et Partisans» d'obédience communiste de Chelles, qu'un groupe de «Jeunes Chrétiens Combattants» de l'O.C.M., de même qu'un groupe des «Forces Françaises de l'Intérieur» de Draveil.

Ce rassemblement au sein de la résistance, s'il peut nous paraître hétéroclite, n’était pourtant pas dénué de cohérence. Ces hommes ont partagé ensemble le goût de la liberté et de la dignité, un idéal emprunt d’humanisme.

Parce que l’indignation appelle l’engagement, que l’engagement appelle l’action et que l’action induit nécessairement la responsabilité, ils ont porté l’espoir d’une société nouvelle et en ont montré les pistes.

Cet engagement dans le combat libérateur, a ainsi été conjugué avec la construction d’un programme partagé au sein du Conseil National de la Résistance, sous la houlette de Jean Moulin depuis 1943 et adopté le 15 mars 1944.

Ce sont ces valeurs que nous honorons aujourd’hui et le fol espoir qu'ils formulaient que l’avenir des hommes appartienne aux hommes. Ce n’est donc pas le passé qui nous fascinerait ici de manière morbide, notre volonté de porter aux nues des icônes dont l'éclat s'affaiblirait immanquablement avec le temps, a fortiori au moment même où les survivants sont de moins en moins nombreux, mais bien notre volonté faire vivre ici, maintenant, et pour toujours ces exigences universelles.

Aujourd'hui, alors que tout nous enserre dans l'entonnoir de la fatalité : fatalité de la crise, fatalité des reculs sociaux, fatalité des inégalités entre les peuples, fatalité de la guerre de part de le monde, je crois que les héros de la Cascade nous ont appris à ne jamais renoncer, à ne jamais transiger avec la dignité qui est l'essence même de chaque être humain.

Le bonheur des hommes est ainsi au cœur du programme du Conseil National de la Résistance validé le 15 mars 1944.

D’ailleurs, comment ne pas illustrer ce propos en en reprenant quelques passages pour en saisir l'ambition profondément humaniste, solidaire et progressiste.

Il prônait ainsi « l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l’éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l’économie. »

Il concevait également « une organisation de l’économie assurant la subordination des intérêts particuliers à l’intérêt général. »

Il jugeait nécessaire le « retour à la nation des grands moyens de production monopolisée. »

Quel décalage avec l'idéologie actuelle de performance, de rentabilité, de compétitivité entre les hommes tout autant qu'entre les territoires.

Concernant la jeunesse et la conception de l'éducation, il portait « la nécessité d’offrir la possibilité effective pour tous les enfants français de bénéficier de l’instruction et d’accéder à la culture la plus développée, quelle que soit la situation de fortune de leurs parents, afin que les fonctions les plus hautes soient réellement accessibles à tous ... et que soit ainsi promue une élite véritable, non de naissance mais de mérite, et constamment renouvelée par les apports populaires."

Les choses auraient-elles tellement changées en 67 ans, qu'il nous faille renoncer à tout visée progressiste ? Au nom de quel dogme sacrifie-t-on aujourd'hui le bonheur des hommes ?

Plus grave, sur le terreau de reculs sociaux et de fatalisme, de perte de repère dans une société qui isole, qui précarise et qui divise, la bête immonde dont personne ne doit douter qu'elle sommeille encore, se revigore et attend son heure.

Les débats sur l'identité nationale en sont une illustration. Ceux-ci ont, en effet, permis de faire ressurgir, de redonner voix aux discours éculés où l’on cherche à se doter de règles pour définir de la pureté d’une filiation comme seul élément de la nationalité. C'est bien le concept fallacieux de race qui refait surface.

Parce qu'un peuple qui ignore son histoire est condamné à réitérer sans cesse les même erreurs, nous devons sans discontinuer expliquer la folie du nazisme qui a cru pouvoir faire le tri entre les Hommes en prônant la Haine de l'Autre, quel que soit cet Autre.

A l'antithèse de cette idéologie, l'un des ciments de l'engagement dans la résistance était bien celui de l'humanisme et de la générosité. Ce sont bien ces valeurs que nous honorons aujourd'hui.

 

 

Ainsi, le creuset de la Résistance n'a pas pas été seulement la Patrie, ou la Nation française, mais bien l'adhésion aux idées et aux valeurs qu'elle défendait. Dans ce cadre, il ne faut pas oublier le lourd tribut payé par la section Main d'œuvre Immigrée au sein des Francs Tireurs et Partisans. Il ne faut pas oublier non plus, la contribution à la résistance d'étrangers, illustres ou inconnus, pour une certaine idée, non de la France mais bien de l'humanité.

A ce titre, je voudrais évoquer et rendre un hommage appuyé ce jour à un écrivain exceptionnel qui est mort cette année. Illustre résistant espagnol de l'Yonne qui a connu l'horreur des camps, cet homme a fait le choix de combattre en France l'occupant nazi. Il s'agit de Jorge Semprun pour qui « l'indicible c'est ce qu'on ne peut pas taire».

Nous ne pouvons alors taire ici, aujourd'hui, et chaque année, l'indicible dignité, l'indicible courage, l'indicible foi en l'humanité qu'éclairaient ces hommes et qui doit nous éclairer aujourd'hui pour continuer à construire une société de progrès pour tous et toutes.

Gloire aux martyrs de la Cascade.

Merci

 

Cécile Goutmann

Conseillère municipale déléguée de la ville de Chelles (PCF)

 

 

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l’histoire sociale a-t-elle la place qu’elle mérite dans les dictionnaires ?

20 Août 2011, 07:33am

Publié par PCF Villepinte

Une bonne nouvelle : Ambroise Croizat est enfin dans le Larousse
 
 

Bernard LAMIRAND, Animateur du Comité d’honneur National pour la reconnaissance de Croizat, Ministre du travail et de la Sécurité sociale de 1945 à 1947.

 

C’est à mettre à l’actif de ces militants et militantes CGT qui sont intervenus depuis des années, en écrivant aux éditions Larousse, pour que le nom d’Ambroise Croizat figure dans le dictionnaire.

C’est donc chose faite.

C’est une bataille menée de longue date par la Fédération CGT de la métallurgie, son institut d’histoire sociale et le comité d’honneur pour la reconnaissance d’Ambroise Croizat comme l’artisan de la mise en place en 1945 de la Sécurité sociale.

En même temps, nous apprenons, par Michel Etiévent, son biographe, que les éditions Robert en feront tout autant pour la prochaine édition de leur dictionnaire.

Après l’inauguration d’une place Croizat à Paris, de multiples inaugurations de rues, stades, lycées, jardins publics, maisons de la culture ces dernières années, la parution du nom de Croizat dans les dictionnaires papier mais aussi électroniques, avec Wikipédia notamment, montre que ce combat engagé valait la peine d’être mené.

Nous allons le poursuivre et même l’intensifier.

Non pas par pure nostalgie d’un passé, mais pour appuyer au nom d’un grand homme d’État français toutes les créations sociales de 1945 à 1947 aujourd’hui menacées et qui ont besoin d’être défendues au moment où les forces réactionnaires veulent en terminer avec la solidarité.

Dernièrement, lors du congrès de la FTM CGT à Reims, je suis intervenu sur le rôle joué par Ambroise Croizat dans toutes les conquêtes sociales depuis 1936 et la Libération, et j’ai vu plein de jeunes délégué(e)s congressistes découvrir ce personnage et en même temps le mouvement ouvrier qui avait participé à la libération de la France de l’oppresseur nazi, alors que les patrons, eux, avaient collaboré et s’étaient vengés des conquêtes du Front populaire en faisant fusiller des militants comme Jean-Pierre Timbaud, Pierre Sémard et d’autres tout au long de ces années noires de la France, et qui avaient été les artisans des occupations d’usines en 1936.

De l’histoire peuvent jaillir des luttes, et je pense qu’en ce moment l’histoire est un outil précieux pour défendre nos acquis sociaux et les améliorer et éviter de retomber dans des périodes sombres comme on a connues.

Regardons bien ce qui se passe avec les décisions de Sarkozy et de cette droite revancharde, c’est bien mettre par terre par une politique de la terre brûlée sociale tout ce que nos prédécesseurs ont mis en place pour le peuple et les travailleurs.

La crise est pour eux l’occasion d’en finir avec ce compromis établi à la libération du pays entre de Gaulle, les communistes et la CGT pour doter notre pays d’une législation sociale et d’une Sécurité sociale que beaucoup de pays ont enviée et envient encore malgré le travail de sape depuis une vingtaine d’années.

Les félicitations que vient de recevoir Sarkozy de la part des agences de notation marquent bien cette revanche du patronat, félicitations en effet d’avoir remis en cause la retraite à soixante ans et demain félicitations, si, pour répondre aux marchés, à ce libéralisme destructeur, le sieur Sarkozy s’attaque à l’autre pilier de la Sécurité sociale, l’assurance-maladie.

Regardons aussi de plus près, le maillage actuel du pouvoir pour présenter aux agences de notation, au capitalisme international, aux banquiers, aux spéculateurs de tous poils, un plan d’austérité. Celui-ci se construit en déconstruisant actuellement de grands pans du droit social comme l’inspection du travail, la médecine du travail, l’hygiène et la sécurité, les congés et les conventions collectives : tout ce que Croizat et ses compagnons avaient mis en place à la Libération et qui sont des outils pour les salaires, l’emploi, les conditions de travail, etc.

Oui, en parlant de Croizat, nous ne rabâchons pas l’histoire, nous la mettons au premier plan pour susciter des luttes contre les atteintes en cours et celles qui se préparent avec la règle d’or que Sarkozy veut mettre en place comme un corset étranglant toutes possibilités sociales.

Par exemple, cette idée qui, actuellement, est avancée, qu’il faudrait en finir avec la cotisation Sécurité sociale et la remplacer par l’impôt (CSG) ou bien la TVA, c’est une idée qui vient des milieux du Medef pour ne plus avoir à payer des cotisations sociales. Cela part notamment d’un assureur, bien connu comme adversaire de la solidarité et adepte des assurances privées, il s’agit de Denis Kessler, ancien vice-président du Medef, qui avait demandé dans une tribune dans le journal Challenges au chef de l’État de mettre fin au compromis social de 1945.

Je me permets de rappeler qu’en 1945, Croizat dut batailler ferme pour imposer que le financement de la Sécurité sociale soit celui de la cotisation des salariés et de l’entreprise à partir de l’assiette salariale. À cette époque, déjà, certains exigeaient que ce soit l’impôt comme en Grande-Bretagne et l’on sait ce qu’est devenue la protection sociale britannique aujourd’hui quasiment entre les mains des assurances privées.

Oui, nous avons toutes les raisons en ce moment de parler de ces conquêtes sociales de la Libération car c’est cela que le gouvernement de droite veut extirper de la mémoire collective pour remettre en place des systèmes qui avaient fait faillite avant la Libération, et ces systèmes sont ceux qui actuellement défrayent la chronique boursière par leurs malversations, la spéculation et les conséquences pour le monde du travail.

Oui, nous allons continuer à faire connaître l’œuvre de Croizat et de ses compagnons, de ces grands moments que furent les conquêtes sociales de la Libération et du rôle du Conseil national de la Résistance qui, en pleine guerre, a établi le socle et les données de ces avancées sociales dignes de notre temps et qu’il s’agit aujourd’hui de préserver et de faire progresser face à la rapacité du capital.

Oui, le comité d’honneur de Croizat va poursuivre et intensifier ce travail de connaissance de ces conquêtes sociales, c’est notre pierre à la bataille pour défendre ce que Croizat considérait comme un droit inaliénable : le droit à la santé, à la retraite, à la sécurité dans le travail, à la famille.

Bernard LAMIRAND

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Le 14 juillet doit redevenir une fête populaire

16 Juillet 2011, 07:15am

Publié par PCF Villepinte

ILe 14 juillet doit redevenir une fête populairel y a bien longtemps que le défilé du 14 juillet a perdu sa raison d'être : celui de la rencontre d'un peuple et de son armée dans la célébration des valeurs de la République : Liberté, Égalité, Fraternité. Le PCF regrette que la fête du 14 juillet ait perdu ses valeurs populaires et citoyennes. Sa conception est pour le moins à revoir.Pour autant, la polémique qui se développe sur la nécessité ou non de maintenir une manifestation militaire lors de la fête nationale a pour conséquence de faire passer au second plan les six nouveaux décès de soldats, morts pour une guerre qu'on n'aurait jamais du faire, celle d'Afghanistan. C'est tragique. Surtout en pensant aux prochains drames et souffrances que peut connaître notre armée et les familles des soldats engagés dans des opérations pour des motifs souvent troubles.La priorité est de s'en prendre à toutes ces guerres inutiles dont le plus souvent on tait le nom. La France doit s'engager au plus vite dans un processus de désarmement. Le combat pour un monde plus pacifique, désarmé, a tout à y gagner. 

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La Commune de Paris a 140 ans

29 Mars 2011, 13:30pm

Publié par PCF Villepinte

Le Journal officiel du 29 mars 1871

mardi 29 mars 2011



 

La Commune de Paris a 140 ans

Pour commémorer cet anniversaire, CIDEFIL et l’association 7 A VOIR diffusent du 23 mars au 24 mai la Une du journal officiel de la Commune de Paris retraçant au jour le jour les évènements de cette période historique (l’actualité liée aux élections cantonales ne nous a pas permis de diffuser les premiers numéros).

Pour lire plus confortablement le contenu de ces document, vous pouvez utiliser la loupe d’Acrobat Reader et zoomer.

Sommaire du Journal officiel du 29 mars 1871 :

- PARTIE OFFICIELLE :
— Déclaration de la commune de Paris.

- PARTIE NON OFFICIELLE :
— Convocation de la commune de Paris.
— Adresse de la commune de l’Algérie à la commune de Paris.
— Avis aux employés de l’intendance générale et du ministère de la guerre.
— Révocation des payeurs civils de la 20e légion.
— Arrêté du maire du Ve arrondissement concernant la distribution de secours aux indigents.
— Nouvelles étrangères.
— Assemblée de Versailles.
— Faits divers.
— Nécrologie.
— Nouvelle organisation de la ville de Paris, par M. Villiaumé.
— Propagande républicaine.
— Bourses et marchés.

- Télécharger le Journal officiel du 29 mars 1871

L’association 7 A VOIR organise en direction des villes des expositions thématiques donnant à voir des documents originaux et authentiques :

- La Commune de Paris
— Nombreuses photographies originales d’époque
— Journaux versaillais et communards
— Affiches électorales etc.

- Pour inviter les électeurs à s’inscrire sur les listes électorales en novembre et décembre 2011, une exposition d’affiches des candidats aux élections présidentielles de 1873 (Mac Mahon) à 2007.

- 68 documents (ou plus) de mai 1968 (plusieurs dizaines d’affiches, tracts, journaux de tous les bords politiques)

- L’image de la femme en politique

- La guerre 14-18,
— affiches,
— journaux,
— objets militaires

- la seconde guerre mondiale, de la guerre d’Espagne à la Libération
— affiches de 1936 à 1945,
— journaux clandestins
— tracts clandestins
— journaux de la libération dont les 10 premiers numéros de l’Humanité reparue en août 1944

- Les UNES célèbres : l’affaire DREYFUS, Election d’Hitler, les accords de Munich, l’invasion de l’URSS par les nazis, la libération de Paris, le 8 mai 1945, Hiroshima, bal tragique à Colombey, la mort de Charlot …

- Le cirque (affiches et objets relatifs au cirque de 1900 à nos jours)

Pour tous renseignements : contact7avoir@orange.fr

 

 

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Pétition : " Pour la réhabilitation des Communards ! "

22 Mars 2011, 19:40pm

Publié par PCF Villepinte

Le blog de Jean-Emmanuel Ducoin

lundi 21 mars 2011

A l'occasion du 140e anniversaire, je me permets de relayer l'appel des Amis de la Commune, publié vendredi 18 mars dans l'Humanité des Débats.

PAR LES AMIS DE LA COMMUNE :
Le 11juillet 1880, la loi portant amnistie générale des communards est adoptée. Elle permet à ceux-ci de sortir des prisons, de revenir de déportation ou d’exil, mais, et c’est bien là le sens profond de l’amnistie, la loi vise seulement à éteindre l’action publique (les seules poursuites pénales) et à effacer la peine prononcée sans effacer les faits. Elle n’est en aucun cas une révision de la condamnation. Elle est un pardon légal qui vise au silence, à l’amnésie.
Cent quarante ans après la Commune de Paris, il est plus que temps que la nation aille au-delà de l’amnistie. Il est plus que temps de reconnaître à la Commune toute sa place dans l’histoire universelle comme un vecteur décisif de la conquête de la République, de la conquête des droits sociaux qui traduisent les valeurs républicaines de liberté, d’égalité et de fraternité.
Il est plus que temps de reconnaître qu’on ne peut accorder la moindre valeur juridique aux fusillades sommaires sur les barricades, aux exécutions en masse décidées en quelques secondes par les cours prévôtales pendant la Semaine sanglante et aux condamnations hâtives de milliers de communards par les cours versaillaises pendant les mois qui suivent la Commune.
Cent quarante ans après, si la révision légale de tous les procès paraît une procédure improbable à conduire, nous demandons comme une urgence démocratique la réhabilitation de la Commune et des communards. Elle doit se manifester par toute une série de mesures concrètes immédiates :
– donner à la Commune de Paris dans les programmes scolaires toute sa place, à la mesure de son importance ;
– inscrire la Commune dans les commémorations nationales ;
– indiquer les noms des élus de la Commune dans les bâtiments de la République concernés (mairies, ministères) ;
– indiquer le nom des directeurs des administrations nommés par la Commune dans les locaux de ces administrations (Assistance publique, poste, monnaie, Imprimerie nationale…) ;
– reconnaître les communards par un nombre significatif de noms de rue, des plaques, des monuments.
Mais la plus belle forme de réhabilitation des communards serait que soient enfin mises en œuvre les mesures démocratiques et sociales de la Commune, qui restent d’une brûlante actualité dans le monde où nous vivons :
– une démocratie qui permette au peuple d’être entendu et de conserver sa pleine souveraineté
– reconnaissance de la citoyenneté pour les étrangers ;
– égalité des salaires des femmes et des hommes ;
– réquisition des logements vacants pour les sans-domicile ;
– réquisition des entreprises abandonnées ;
– démocratie sociale et contrôle salarié ;
– justice accessible à tous ;
– école laïque, gratuite et obligatoire.
En signant cette pétition des Amis de la Commune de Paris 1871 pour la réhabilitation de la Commune et des communards, nous affirmons que l’espoir en un monde libéré de ses chaînes, surgi il y a cent quarante ans, est plus vivant que jamais ! La Commune n’est pas morte !

Pour signer cette pétition :  Site des Amis de la Commune

(A plus tard...)

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Robert Ballanger, indépendant et fidèle à ses idéaux communistes »

30 Janvier 2011, 22:48pm

Publié par PCF Villepinte

Robert Ballanger 

Robert Ballanger nous a quittés il y a trente ans, le 26 janvier 1981. Il avait 69 ans. Il reste pour moi un compagnon de lutte, un maître en politique, un ami. À sa demande, j’ai été son suppléant à l’Assemblée nationale de 1978 à 1981. Au cours de cette période, j’ai pu observer sa sensibilité à la souffrance humaine, son souci des plus humbles, son sens aigu de l’intérêt général. Dans un monde où l’opportunisme passe pour une vertu, Robert a toujours su rester fidèle à ses engagements et à ses convictions, sans jamais se renier. Je veux ici évoquer ce destin hors du commun, les combats qu’il a menés dès sa jeunesse et aussi les efforts qu’il a déployés pour le développement de nos territoires.

Un homme du peuple

Robert Ballanger était avant tout un homme du peuple et un authentique communiste. Né le 2 novembre 1912 à Nantes, il rejoint le Parti communiste français, pour ses vingt ans, en 1932. Dès lors, sa fidélité aux idéaux de son premier engagement ne se démentira pas.

Employé au ministère des Colonies à Nantes, il perd son emploi pour fait de grève en 1938. Les fonctionnaires n’ont pas le droit de grève à l’époque. Mobilisé en 1939, il prend sa part dans les combats contre l’offensive nazie et se retrouve pris dans la nasse de Dunkerque. Il parvient à passer en Grande-Bretagne. Il sera rapatrié à Nantes quelques semaines plus tard.

Une des périodes les plus marquantes de son existence commence alors, celle de la Résistance. Dès 1939, il ne partage pas la ligne légaliste et pacifiste défendue par la direction du PCF après la signature du pacte germano-soviétique et les débuts de l’occupation allemande. Son attachement au combat antifasciste l’amène immédiatement à l’idée de résistance. Comme d’autres communistes, il est partisan de la lutte contre l’occupant. Avec deux autres de ses camarades, Marcel Paul et Venise Gosnat, il s’est débrouillé pour récupérer des armes abandonnées lors des combats. Il les a cachées en prévision des actions dont il ne doute pas qu’elles seront à mener. En octobre 1940, il échappe de peu à l’arrestation par la Gestapo.

Un an plus tard, en octobre 1941, il participe à l’organisation des légendaires Francs-Tireurs Partisans, l’organisation de la Résistance créée à l’initiative du Parti communiste et dirigée par Charles Tillon. Robert Ballanger en assure la direction pour la région Centre, avant de rejoindre les dirigeants de la région de Paris. À la Libération, en 1944, il devient vice-président du comité de Libération de Seine-et-Oise.

Artisan de la renaissance du Parti communiste clandestin, Robert Ballanger entre au Comité central en 1945. Il en sera membre pendant 27 ans, d’abord jusqu’en 1950 puis de 1959 à sa mort.

Une lutte permanente pour améliorer la vie

C’est aussi en 1945, à 33 ans, qu’il entre à l’Assemblée constituante. Il sera de toutes les législatures de la IVe puis de la Ve République, d’abord député en Seine-et-Oise, avant la Seine-Saint-Denis en 1967. Il n’assumera pas moins de quatorze mandats.

Son activité parlementaire laissera une empreinte mémorable sous bien des aspects. Ainsi, pour la seule législature 1973 – 1978, il ne portera pas moins de 301 propositions de lois au nom du groupe des députés communistes. Ses interventions portent beaucoup sur l’approfondissement de la démocratie, l’amélioration de la vie quotidienne et le renforcement du rôle du Parlement, largement bafoué sous la Ve République.

Membre de la commission de l’Intérieur à partir de 1947, il prend part aux grands débats qui agitent la Chambre des députés sous la IVe République. Mais surtout, Robert Ballanger ne manquera nulle occasion de marquer son soutien au mouvement de décolonisation qui constitue le fait marquant de cette époque. En décembre 52, il s’exprime sur la situation en Tunisie et au Maroc. En juillet 1953, il réclame une commission d’enquête sur le trafic des piastres en Indochine, un vaste scandale impliquant, entre autres, les partis de droite.

Avec la guerre d’Algérie, son courage et sa fidélité aux valeurs qui restent encore les miennes aujourd’hui auront encore l’occasion de s’exprimer. Toussaint 54 : l’Algérie, alors département français, se soulève. Partout dans le pays, le Front de Libération National fait entendre son aspiration à l’indépendance. Le gouvernement Pierre Mendès-France entend ne rien céder. La répression sera sanglante et débouchera sur huit ans de guerre sans merci. Globalement, la classe politique fait bloc derrière le président du Conseil.

Fidèle à ses engagements, de la Seine-Saint-Denis à l’Assemblée nationale

La voix puissante de Robert Ballanger qui s’élève, le 9 novembre 1954, dans l’hémicycle, au nom du groupe communiste, semble bien isolée. Il apporte son soutien aux « justes aspirations du peuple algérien à la liberté ». C’est le seul groupe politique de l’Assemblée qui montrera sa détermination à cette occasion. Le 5 janvier 1955, il prend part à l’interpellation du gouvernement sur sa politique en Afrique du Nord. Le 5 février, lors de la séance qui amènera la démission du cabinet Mendes-France, il revient à la charge et prône la liberté pour l’Algérie. Il vote le 31 mars 1955 contre l’instauration de l’état d’urgence en Algérie. Le 4 octobre 1956 enfin, avec une dizaine d’autres députés et le soutien de son groupe, il demande la formation d’une commission d’enquête « sur les tortures pratiquées par la police en Algérie ». Dans son intervention, il n’hésite pas à dresser un parallèle entre les pratiques de Vichy et celles de la police du socialiste Guy Mollet, alors président du Conseil. « Les tortionnaires se sont particulièrement acharnés sur trois femmes, dont l’une, ex-conseiller général, avait déjà été torturée en 1941 par les bourreaux qui sévissaient sous le régime de Vichy. De tels procédés soulèvent l’indignation et l’horreur chez les honnêtes gens quelle que soit par ailleurs leur opinion sur la guerre d’Algérie. » Croyez-moi, dans le contexte de l’époque pour défendre une telle position, il ne fallait pas manquer ni de courage, ni de témérité. Jusqu’à l’obtention de l’indépendance algérienne en 1962, Robert Ballanger soutiendra la lutte du peuple algérien.

Sa carrière se poursuit sous la Ve République avec le même engagement, la même fidélité à ses idéaux communistes. Le 1er juin 1958, il refuse de voter l’investiture du général De Gaulle, appelé par la droite et la gauche socialiste et présenté comme le sauveur de la France. Le lendemain, il s’opposera aussi au vote des pleins pouvoirs en faveur de ce dernier président du Conseil de la IVe République qu’a été le général De Gaulle.

Aux élections législatives de novembre 1958, il est des 10 députés communistes élus. Ils étaient 150 lors de la précédente législature. L’iniquité du nouveau mode de scrutin ne leur permet même pas de constituer un groupe parlementaire. Pourtant, à la proportionnelle, avec leur résultat de 18,3 %, ils avaient droit à 82 parlementaires. Il devient député de Seine-Saint-Denis, département dont la création est annoncée par décret depuis 1964, aux élections législatives de mars 1967. La huitième circonscription couvre les communes d’Aulnay, du Blanc-Mesnil, de Sevran, de Villepinte et de Tremblay.

Ses multiples interventions à l’Assemblée nationale, son charisme, ses qualités de tribun populaire toujours prêt à défendre les victimes d’un système qu’il combat le font redouter de ses adversaires politiques. Ses qualités le placent comme l’un des députés communistes les plus écoutés dans l’hémicycle. Tout naturellement, en 1964, il succède à Waldeck-Rochet à la présidence du groupe communiste à l’Assemblée. Mais ne nous y trompons pas, le Parti n’a pas toujours été tendre pour cet esprit libre et indépendant qui ne sacrifiait jamais aux manœuvres des arrière-cours politiciennes. Au XIIe Congrès du PCF, en avril 1950, il est écarté du Comité central comme 26 autres. La direction tient en suspicion les résistants et les anciens des Brigades internationales qui ont combattu le fascisme en Espagne entre 1936 et 1938. De plus, on soupçonne Robert de sympathie pour Tito, le dirigeant yougoslave qui a rompu peu avant avec Moscou. Un grief de plus contre lui. Il ne revient, dans l’instance délibérante du PCF, que lors du XVe congrès, en 1959, trois ans après le XXe congrès du Parti communiste de l’Union soviétique marquant la fin du stalinisme.

La défiance de Georges Marchais, secrétaire général du PCF depuis 1972, à l’égard de l’action parlementaire contribuera à minimiser la présence du président du groupe communiste qu’est toujours Robert Ballanger. Les députés communistes et leur président sont tenus à distance. Cela n’empêchera pas Robert d’assumer pleinement ses fonctions de chef de file du groupe parlementaire. Il se consacre aussi beaucoup à la ville d’Aulnay dont il est le maire depuis 1971 et aux territoires de Seine-Saint-Denis.

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Aulnay-sous-Bois : fin des années 1970, Robert Ballanger, accompagné de François Asensi (en rouge) et Pierre Thomas (en bleu), inaugure le Parc urbain, qui portera son nom par la suite © Bernuzeau

Du local à l’international, un homme inscrit dans l’histoire

Au cours de cette période de sa vie parlementaire, on l’entend un peu moins au plan national, même si, pour autant, son activité ne se relâche pas. En 1976, dans le débat sur l’élection au suffrage universel du Parlement européen, il est critique. À ses yeux, cette décision vise à renforcer le capitalisme européen tout en affaiblissant les forces politiques de progrès, et particulièrement les Partis communistes français et italiens. Robert a l’indépendance nationale vrillée au corps et il se défie de l’atlantisme et de ses déviances. Le devenir de l’Europe lui donnera raison.

Trois mois avant sa disparition, à l’hiver 1980, alors que le débat autour des présidentielles fait rage au sein de la gauche, il sortira de sa réserve dans une interview au Monde. Interrogé sur l’union autour de François Mitterrand, il n’hésite pas à répondre qu’il ne votera pas le 10 mai « pour un socialiste atlantiste ». Dans le même entretien, il refuse de se prononcer lorsqu’on lui demande si Georges Marchais serait le meilleur candidat possible pour les communistes. Il élude la question en rappelant que la décision appartiendra à la conférence nationale réunie à cet effet.

Si les interventions et les combats de Robert Ballanger sont restés dans l’histoire, on oublie trop souvent l’énergie inlassable qu’il a déployée comme maire d’Aulnay. Ce mandat, il l’a honoré de 1971 à 1978, avant de passer la main à Pierre Thomas. On lui doit la modernisation de la ville d’Aulnay-sous-Bois, telle que nous la connaissons aujourd’hui, et la création de toutes les zones d’activité existantes. Robert Ballanger était proche des gens, des citoyens, des travailleurs. Avec lui, j’ai participé à la lutte contre la fermeture d’Idéal-Standard, en 1975 (voir interview sur ce blog). La fonderie devait mettre la clé sous la porte, laissant plusieurs centaines d’ouvriers sur le carreau et une plaie béante dans le tissu urbain. Nous nous sommes battus jusqu’au bout pour éviter le pire, occupant l’usine, multipliant les rassemblements. En vain. L’usine a finalement fermé. Robert mettra un point d’honneur à favoriser la reconversion des terrains en friche. Il multipliera les démarches et les contacts pour ne pas laisser ce vide dans la ville, jusqu’à l’implantation de la zone de Chanteloup que nous connaissons aujourd’hui. Encore fallait-il préserver la mémoire ouvrière du lieu. C’est ce que Robert met en œuvre en préservant les deux halles conçues par Eugène Freyssinet. Aujourd’hui, cette reconversion continue d’être citée en exemple parmi les spécialistes de l’urbanisme.

Mais il fallait aussi, dans ces années qui suivent le premier choc pétrolier, soutenir l’emploi et l’activité économique, ne pas laisser Aulnay et les territoires avoisinant ronger par le chômage et la pauvreté. Refuser qu’ils soient condamnés à la ghettoïsation. Robert contribue à l’implantation de Citroën sur sa commune, en 1973. Pour compenser les pertes d’emplois dans d’autres entreprises, il soutient le développement du site. Il parvient à convaincre les dirigeants du fabricant automobile. Au plus fort de son activité, entre 1978 et juin 2008, le site englobe une unité d’emboutissage, une unité de ferrage, une unité de peinture et deux lignes de montage, sur 170 hectares. De là sortent les fameuses DS, puis les CX. Le décès prématuré de Robert lui épargne de voir les menaces s’accumuler sur cette épopée industrielle, à partir de 1982. Il ne verra pas les grandes grèves des travailleurs de Citroën pour la défense de leur emploi et la reconnaissance de leur dignité.

Un fort engagement pour la banlieue

Il a soutenu et défendu l’hôpital public de la ville qui porte aujourd’hui son nom.

Dans son action de développeur et d’aménageur, Robert Ballanger ne s’est pas arrêté aux limites du territoire aulnaysien. Il s’est impliqué dans l’avenir de cette partie de la Seine-Saint-Denis, parce qu’il en percevait les enjeux humains et politiques. Il est à l’origine du SEAPFA, le syndicat intercommunal, regroupant Aulnay, Sevran, Villepinte, Blanc-Mesnil et Tremblay en 1971. Dans le domaine économique, on lui doit le développement de Garonor, à un moment où les investisseurs renâclaient à mettre les pieds dans ce secteur. Aujourd’hui, le parc d’activité comprend 350 000 m² de locaux diversifiés. Et que dire de Paris-Nord 2 ? Là aussi Robert Ballanger s’est employé à attirer les entreprises et les investisseurs. Hélas, il n’assistera pas à la pose de la première pierre du site qui se tient quelques mois après son décès.

Mais au-delà du développement économique, l’une de ses préoccupations essentielles demeurait le bien-être des habitants, le soutien aux plus démunis, la lutte contre l’injustice d’où qu’elle vienne. Lors des deux permanences qu’il tenait chaque semaine, avec moi – son suppléant depuis 1978 –, nous avons pu mesurer la souffrance qui accablait les plus vulnérables. Cette souffrance, les difficultés quotidiennes qui, à force de s’accumuler deviennent insurmontables, Robert les prenaient à cœur. On lui a reconnu son sens de la convivialité, mais je puis vous affirmer qu’il prenait aussi la mesure des drames.

L’amélioration des conditions de vie dans les banlieues sera une de ses préoccupations majeures. Ainsi, le 22 mars 1946, alors qu’il n’en est encore qu’aux débuts de sa vie parlementaire, il dépose un projet de résolution en tant que député de Seine-et-Oise visant à l’amélioration des conditions de vie des « mal lotis ». Une injustice récurrente qu’il aura à combattre dans sa circonscription de Seine-Saint-Denis. Robert Ballanger participe ainsi de tous les combats sociaux de son temps. Il se trouve aux côtés des familles menacées d’expulsion, des OS en lutte. De ces rencontres, il sait tirer l’expérience pour bâtir une proposition de loi destinée à insuffler plus de justice et plus d’humanité dans notre société.

Être à l’écoute de ses concitoyens constituait pour Robert Ballanger une préoccupation permanente. En 1976, bien avant que l’on ne parle encore de démocratie participative, il invite les Aulnaysiens à s’exprimer lors des Assises de la vie quotidienne. 8 000 personnes participeront aux débats organisés en différents lieux de la ville, discuteront avec les élus, formuleront leurs propositions et leurs remarques. Tous en gardent le souvenir d’un grand moment de la vie démocratique. Dans le domaine culturel, nul ne peut ignorer qu’il est à l’origine de l’Espace Jacques Prévert, haut lieu de la culture à Aulnay.

Trente après sa disparition, j’évoque encore les années passées à ses côtés avec fierté et émotion. Robert Ballanger fut un grand résistant, un homme de conviction, un patriote, un aménageur infatigable, un grand communiste. J’ai beaucoup appris auprès de lui. Je me sens proche de la fidélité qu’il à toujours montré envers ses engagements sans jamais rester prisonnier d’un carcan politicien, sans jamais faire allégeance. C’est pourquoi j’ai voulu lui rendre hommage et faire revivre son épopée par ces quelques lignes.

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