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Bienvenue sur le blog des communistes de Villepinte

Quel payasge de L’enseignement supérieur et de la recherche, un an après le grand conflit ?

23 Janvier 2010, 12:25pm

Publié par Daniel JUNKER

 

Les enjeux politiques d’un moment à la dimension collective indéniable
cherche
Par JEAN FABBRI, MAîTRE DE CONFERENCES DE MATHEMATIQUES À L’UNIVERSITé DE TOURS.

Le plus long et le plus massif des conflits sociaux de 2009 a surgi il y a juste un an. De février à avril 2009, des dizaines de milliers d’universitaires, de chercheurs ont affiché, par la grève et des manifestations considérables (plus de 100 000 personnes), leur attachement aux libertés scientifiques que rendent possibles à la fois les statuts – des établissements et des personnels – et, s’ils existent, des financements publics massifs.

Revenir sur ce moment politique à la dimension intellectuelle collective indéniable éclaire de multiples enjeux  : quelle sortie de crise  ? Quelles fonctions assigner à la recherche publique et à l’élargissement de l’accès – et de la réussite – des étudiants dans l’enseignement supérieur  ? Quelle régulation  ? Une stratégie politique qui cherche à contrôler comme
jamais le monde universitaire peut-elle réussir en France  ? Esquissons des pistes de réponses en trois points.

1) Le gouvernement veut aveugler l’opinion par des annonces de milliards d’euros (en réalité 400 millions par an, soit l’inflation). L’« effet Loto » est facile en temps de crise, mais ni le grand emprunt ni la logique de rivalité (et son corollaire, le déclassement) qu’induisent les primes individuelles ne résistent à l’analyse. L’exemple de l’Institut Pasteur, bridé en 2009 par les moins-values boursières, donne déjà à réfléchir. Ce « nouveau » plan – lié à l’emprunt – se révèle fondamentalement stérile par le refus de toute création d’emploi statutaire de chercheur, d’enseignant-chercheur, de technicien et de personnel des bibliothèques.

Pourtant, les besoins sont là  : pour la réussite des étudiants via des pédagogies adaptées, pour l’ouverture la plus large possible des thématiques de recherche sur une durée qui dépasse l’horizon d’un contrat (trois ou quatre ans), il faut, en nombre, des universitaires stables. Un plan pluriannuel de recrutement maîtrisé n’est pas plus coûteux sur trente ans que le remboursement de la dette liée à cet emprunt (intérêt et capital)… et nous savons que cela aurait un impact scientifique bien plus considérable.

2) La crise économique, de l’emploi et de l’accès à l’emploi, est habilement exploitée par le patronat et le pouvoir pour agiter l’idée de « quotas de boursiers » dans l’accès aux formations supérieures affichées comme les plus prestigieuses. Ce faux débat est biaisé de façon multiple. Il occulte la nécessité d’élever pour le plus grand nombre – et pas seulement dans une perspective d’employabilité – le niveau de formation de l’immense majorité des jeunes. Il tend à figer une inégalité de moyens (financements, encadrement) entre les établissements. Il va à l’encontre d’une convergence cohérente au sein du service public universitaire de l’ensemble des formations post-baccalauréat, appuyée sur une globale refonte des allocations versées aux jeunes. Il ignore les enjeux aigus d’une bataille déclenchée par le patronat qui vise à vider de leurs dimensions qualifiantes les diplômes universitaires au profit des « compétences » et des réseaux d’anciens élèves mesurés par les seuls employeurs. La double logique du désengagement et de la focalisation sur des niches dites d’innovation et de rentabilité est le credo économique imposé. L’État entraîne sur ce terrain les collectivités locales. Dans la campagne électorale des régionales, la surenchère gagne les régions et les forces politiques qui entendent les gérer. Ainsi, au lieu d’une stratégie scientifique et de formation fondée sur l’état réel des savoirs et des questionnements (dont l’appréciation pertinente ne peut être qu’au moins nationale), se met en place une logique parcellisée de guichets pour subventions.

3) Partout, universités, campus, Pres, CNRS… explosent sous l’effet des dysfonctionnements que les choix budgétaires et la loi LRU ont monstrueusement engendrés. Cette faillite met en lumière l’écroulement de la citoyenneté universitaire. Le modèle collégial, qui s’est imposé au fil des siècles et partout dans le monde dans l’enseignement supérieur et la recherche, demande à être réhabilité et sans doute réapproprié au-delà de sa sphère originelle. Il est possible de construire des coopérations et des synergies entre laboratoires, entre établissements, dans le cadre du service public pour les deux missions fondamentales de recherche et de formation, si la collégialité et l’ouverture sur la société en sont les poumons.

L’acharnement du pouvoir autour des universités dessine sa visée de normalisation à la fois idéologique et scientifique, pour contrecarrer tout ce qui peut mettre en péril des intérêts d’entreprise (amiante, OGM, ondes…) et leurs critères de gestion. Il faut plonger dans ces enjeux avec audace contre les turpitudes de la loi LRU vers un autre horizon législatif. La vigueur des résistances à la révision brutale de la formation et du recrutement des enseignants montre qu’enraciné dans le puissant mouvement de l’hiver dernier, l’élan perdure.

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