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La France doit participer à la première réunion du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires

25 Janvier 2022, 07:33am

Publié par PCF Villepinte

La France doit participer à la première réunion du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires

Tribune collective à l'initiative d'ICAN, branche française de la Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires (prix Nobel de la paix 2017).

 

Ce 22 janvier 2022, marque le premier anniversaire de l’entrée en vigueur du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN). Une norme juridique internationale qui renforce la sécurité collective en engageant le processus de désarmement nucléaire.

Malgré sa mise en œuvre dans le cadre des Nations unies (ONU), son adoption par une écrasante majorité des États, la France manifeste une opposition ferme à ce processus multilatéral. Ce refus est en décalage complet avec les propos du président Macron : « la France prendra ses responsabilités en particulier en matière de désarmement nucléaire ».

Notre campagne ICAN France appelle, par une pétition (http://icanfrance.org/petition/), à ce que le France cesse son double langage en participant, en qualité d’observateur, à la première réunion du TIAN qui se tiendra à l’Office des Nations unies à Vienne, du 22 au 24 mars 2022.

Le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, qui complète d’autres traités notamment le Traité sur la non-prolifération nucléaire (TNP), rend illégales les armes nucléaires et la politique de dissuasion. La communauté internationale dispose donc, enfin, d’un instrument juridique pour à la fois engager concrètement le désarmement nucléaire, assurer notre sécurité collective, protéger notre environnement des conséquences humanitaires catastrophiques de toute utilisation d’armes nucléaires et rendre impossible la guerre nucléaire.

Ce sont ces éléments et leur mise en œuvre concrète qui seront discutés au cours de la première réunion du TIAN. D’ores et déjà la soixantaine d’États parties — dont l’Autriche, l’Irlande et Malte, membres de l’Union européenne, et le Liechtenstein, Saint-Marin et le Vatican —, les États signataires, ainsi que des organisations internationales (comme le Comité international de la Croix-Rouge) ont annoncé leur participation.

De plus, comme il est inscrit dans le traité, les réunions sont ouvertes aux États non parties en qualité d’observateur leur assurant ainsi une possibilité de présence ; ce qui est la preuve d’une volonté d’inclusivité et d’échange avec toutes les parties.

À ce titre, de nombreux États européens ont d’ores et déjà fait savoir qu’ils seront présents. Nous pouvons les classer en trois catégories :

  • les partisans du traité, mais dont l’adhésion prend du temps pour des raisons de débat politique interne (Suisse, Suède) ;
  • les opposants au traité, mais dont la coalition de gouvernement ne veut pas ignorer cette conférence : la Finlande, la Norvège (malgré son appartenance à l’OTAN), l’Allemagne (bien qu’hébergeant l’arme nucléaire sur son territoire dans le cadre de l’OTAN) ;
  • enfin, nous avons des États (Belgique, Danemark, Japon, Pays-Bas) pour lesquels la question de leur présence est encore en discussion interne.

Depuis que des États ont décidé (en 2013) de faire avancer la connaissance sur le danger des armes nucléaires, puis de lancer (en 2017), au sein de l’ONU, un processus de négociation pour créer un instrument juridiquement contraignant contre les armes nucléaires, la France n’a eu qu’une seule attitude : la chaise vide.

Une absence dérogeant totalement à la doctrine d’un État qui ne cesse de se dire « responsable », qui appelle à renforcer le multilatéralisme et qui dispose de plus de charges particulières en raison de sa qualité de membre permanent du Conseil de sécurité.

Il est trop simple pour la France d’affirmer ce 4 janvier, avec les principales autres puissances nucléaires membres permanents du Conseil de sécurité, « qu’une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée », alors qu’elle refuse d’assumer ses responsabilités lors d’une réunion dont l’objet même est de rendre impossible une telle catastrophe. Notons que dans le même temps, elle a engagé un programme de modernisation et de renouvellement complet de son arsenal nucléaire.

En poursuivant cette politique, l’actuel gouvernement refuse également d’entendre l’avis positif des Françaises et des Français pour ce traité (67 %, en 2018) ainsi que l’appel officiel des plus grandes villes de France (dont sa capitale) et d’une quarantaine de parlementaires à ce que la France y adhère.

Pour que la France sorte de son isolement, la campagne ICAN France, conduite par de très nombreuses organisations*, lance ce 22 janvier 2022, une pétition (disponible sur icanfrance.org) pour demander au président de la République la présence de la France, en qualité d’observateur, à la première réunion des États Parties (20/22 mars, ONU, Vienne) au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires.

 

Co-signée par : ICAN France, Abolition des armes nucléaires–Maison de Vigilance, Initiatives pour le Désarmement Nucléaire, Europe Écologie Les Verts, Ligue des droits de l’Homme, Mouvement national de lutte pour l’environnement, Mouvement pour une alternative non-violente, Le Mouvement Utopia, Mouvement de la Paix, Observatoire des armements, Parti communiste français (PCF), Pugwash France, Réseau Féministe Ruptures, Réseau Sortir du nucléaire, Agir pour le désarmement nucléaire Franche-Comté, Feyzin-Europe, Mouvement poétique pour une société idéale oubliée, Négajoule !

 

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Familles

25 Janvier 2022, 07:28am

Publié par PCF Villepinte

La famille Mulliez (Auchan) rêverait d’absorber la famille Moulin (Carrefour). À la clé des milliards à empocher ; et au bas mot 10 000 salariés sur le carreau. Il paraît que Darmanin vient d’écrire aux préfets, pour les alerter. Non pas sur la spéculation en cours mais sur les mouvements sociaux en perspective.

Gérard Streiff

 

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APRES

24 Janvier 2022, 09:45am

Publié par PCF Villepinte

 

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RETRAITÉ.E.S, LE 27 JANVIER MOBILISONS-NOUS !   

24 Janvier 2022, 09:37am

Publié par PCF Villepinte

Retraités : le 27 janvier, mobilisation pour les pensions,
les salaires, les emplois, les conditions de travail et d’études !

Nous subissons de plein fouet les augmentations des produits de première nécessité, de l’énergie, de l’alimentation … du coût de la vie pour toutes et tous, jeunes, actifs, demandeurs d’emploi et retraités. Dans le même temps, les pensions, ainsi que les salaires, les aides et allocations continuent de stagner ou même de baisser au regard de l’inflation. Pendant ce temps-là, les actionnaires voient leurs dividendes exploser.

Les organisations de retraitées et retraités CGT, FO, FSU, Solidaires, FGR-FP, LSR, Ensemble & solidaires ne peuvent s’en satisfaire et condamnent fermement cette répartition des richesses.

Après des années de gel, la dernière revalorisation de 1,1 % est bien inférieure à une inflation estimée à près de 3 %.


Depuis 2014, les pensions ont augmenté de 0,2 % et les prix de 7,9 %. Sur une année, les pertes des pensions atteignent un mois de pension.

Les dernières actions des retraité·e·s, très massivement mobilisé·e·s, nécessitent des actes forts de la part du gouvernement et du patronat : une augmentation immédiate de leur pension, retraite de base et retraite complémentaire, et leur indexation sur l’évolution des salaires.

Les personnes retraitées partagent et convergent avec les revendications des actifs et des jeunes, elles demandent aussi :

- L’augmentation du point d’indice et du SMIC, seule façon de réaliser une avancée pour les salarié·e·s dont les minima de branches sont actuellement en dessous du salaire de base minimum.
- Le retrait de la réforme de l’assurance chômage qui va enfermer de trop nombreux salariés dans des emplois à faible salaire, à temps partiel ou en CDD.
- Que la jeunesse obtienne une réponse à l’encontre des réformes libérales de l’éducation, de la formation, de l’assurance chômage décidées par le gouvernement, qui la précipitent dans une grande précarité de vie et de travail, à la pauvreté accentuée par la crise sanitaire, économique et sociale.

 Les organisations de retraitées et retraités CGT, FO, FSU, Solidaires, FGR-FP, LSR, Ensemble & solidaires appellent à la mobilisation interprofessionnelle pour les pensions, les salaires et l’emploi
le jeudi 27 janvier

Il est urgent et indispensable d’agir toutes et tous ensemble par les manifestations et la grève pour l’augmentation immédiate des pensions des retraité·e·s, de tous les salaires du privé comme du public, des allocations pour les jeunes en formation et en recherche d’emploi.

 

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60 secondes pour rattraper l'actu de la semaine du 17 au 21 janvier

24 Janvier 2022, 09:35am

Publié par PCF Villepinte

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Asphyxie d’EDF et du service public de l’électricité !

24 Janvier 2022, 09:31am

Publié par PCF Villepinte

Le gouvernement se défausse sur EDF de sa promesse de limiter à 4% la hausse de l’électricité évaluée à +35% au 1er février 2022, pour un coût astronomique de 8 milliards d'euros !

Ce gouvernement qui avait anticipé cette possibilité lors de la loi énergie climat votée en 2019, a décidé d’augmenter le plafond de l’Arenh à 20 TWh pour aller à 120 TWh. L’adoption de cette possibilité par la majorité gouvernementale a été faite pour satisfaire la demande des fournisseurs dits « alternatifs », essentiellement de négoce et de trading (Total énergies, Engie, Cdiscount,…) qui peuvent acheter à bas coût l’électricité nucléaire produite par EDF (jusqu’à 100 TWh à 42€/MWh, tarif inchangé depuis 2012, puis 20 TWh à 46,2€/MWh) alors que les prix de marché oscillent entre 200 € et 400 € MWh pour la revendre à leurs clients.


En réalité, ce volume d’électricité supplémentaire à bas coût va donc directement profiter aux concurrents qui n’ont pas investis dans la production d’électricité. Cela coutera autour de 8 milliards d’euros à EDF sans que l’on soit réellement en capacité de vérifier que ce mécanisme profitera également à leurs clients qui ont déjà subi de violentes hausses. Aujourd’hui, c’est 120 TWh. Et demain ?

Cette décision est lourde de conséquences pour l’entreprise publique pénalisant sa capacité d’investissements dans le renouvellement et la maintenance du parc de production nucléaire et hydroélectrique, nécessaire pour garantir notre sécurité d’approvisionnement. C’est une décision qui va gravement fragiliser l’entreprise publique. C’est un processus de liquidation de notre fleuron industriel qui assure la sécurité d’approvisionnement d’électricité de notre pays.

Le PCF dénonce l’obsession du marché et de la concurrence qui conduit l’Europe à une situation intenable en matière d’accès à l’électricité pour les ménages comme pour les entreprises. Partout en Europe, les factures explosent.

A quelques semaines de l’élection présidentielle, la majorité macroniste ressort son « quoi qu’il en coûte » pour assumer sa décision de contenir la hausse des tarifs de l’électricité à 4% en faisant les poches à EDF.

Le gouvernement aggrave les transferts financiers au bénéfice d’acteurs privés au lieu d’assumer son engagement de bloquer la hausse en modifiant le mode de calcul des tarifs. Ce gouvernement et le candidat Macron sont les chefs d’orchestre du détricotage du service public et de la casse industrielle notamment dans le secteur de l’énergie.

Alors que l’urgence est de faire face au réchauffement climatique, l’Etat encore actionnaire d’Engie, organise sa vente à la découpe se privant ainsi d’un outil industriel utile à la réussite de la transition énergétique. Après avoir été l’architecte de la vente d’Alstom à General Electric, il exige d’EDF le rachat de ces mêmes activités nucléaires par EDF. Cette politique à la petite semaine est un gâchis financier et industriel !

Pour répondre à la hausse de l’électricité et du gaz, une baisse de la TVA de 20% à 5.5% sur la consommation de l’électricité et du gaz, et la suppression de celle-ci sur la CSPE (taxe sur une autre taxe) auraient eu un impact immédiat face à des dépenses incompressibles et de première nécessité des ménages. Certains pays européens ont d’ailleurs mis en œuvre de telles mesures.

Le PCF propose de rendre caduque les dispositions de l’Arenh inscrites dans la loi NOME votée en 2010 qui a instauré cette concurrence artificielle de l’électricité en obligeant EDF à vendre une partie de l’électricité nucléaire à faibles prix à ses propres concurrents ainsi que la méthode de tarification actuelle qui prend en compte les prix de marché européen de gros et favorise la concurrence au détriment d’EDF.


Il faut revenir à un tarif qui prenne réellement en compte les coûts de production, de transport et de distribution dans le calcul des Tarifs Règlementés de Vente, éléments de la solidarité nationale pour l’accès à l’électricité et au gaz, que le PCF entend absolument sauvegarder.


Il faut renationaliser EDF et Engie !

 

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Il pleut sur la pensée

22 Janvier 2022, 10:23am

Publié par PCF Villepinte

Il pleut sur la pensée.

Et la pensée pleut sur le monde
comme les restes d'un filet décimé
dont les mailles ne parviennent pas à s'assembler.

Il pleut dans la pensée.

Et la pensée déborde et pleut dans le monde,
comblant depuis le centre tous les récipients,
même les mieux gardés et scellés.

Il pleut sous la pensée.

Et la pensée pleut sous le monde,
diluant le soubassement des choses
pour fonder à nouveau l'habitation de l'homme et de la vie.

Il pleut sans la pensée.

Et la pensée
continue de pleuvoir sans le monde,
continue de pleuvoir sans la pluie,
continue de pleuvoir.

Roberto Juarroz

 

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Héritage(s)

22 Janvier 2022, 10:15am

Publié par PCF Villepinte

Vingt ans après, l’histoire a tranché. Même mort, Pierre Bourdieu continue de faire peur aux puissants. 

Action. 

«Il n’est sans doute pas faux de considérer la sociologie comme une conquête sociale», écrivait Pierre Bourdieu dans un texte inédit que nous avions publié en 2012. Sans accorder une confiance excessive au pouvoir des discours, il avait cependant la conviction que la connaissance sociologique pouvait produire des raisons et des moyens d’agir sur la réalité sociale.

De quoi l’œuvre de Bourdieu est-elle le nom? Lors de la publication de la Misère du monde (1993), il emprunta à Spinoza cette formule qui tenait lieu sinon de définition du moins de ligne conductrice: «Ne pas déplorer, ne pas rire, ne pas détester, mais comprendre…» 

De quoi son héritage intellectuel est-il le signe? Dans Méditations pascaliennes (1997), le professeur au Collège de France évoquait «la pression ou l’oppression, continues et souvent inaperçues, de l’ordre ordinaire des choses, les conditionnements imposés par les conditions matérielles d’existence» et il mettait à nu ce qu’il nommait «violence symbolique» comme pour nous rappeler que l’un de ses soucis constants fut bien sûr de participer de l’action, mais que, si urgente soit-elle, celle-ci ne saurait se passer de l’effort théorique et de l’analyse des mécanismes de «domination». Domination: le maître-mot bourdieusien par excellence…

Engagé.

 Le bloc-noteur réalise à peine: vingt ans, déjà, que Pierre Bourdieu a succombé à un cancer et nous ne nous lassons pas – moins que jamais – de puiser à la source du sociologue et de «l’intellectuel critique», dont il acceptait et assumait toutes les acceptions. Le meilleur penseur n’est-il pas celui qui pense d’abord contre lui-même? Et à quoi sert l’intellectuel, sinon à déconstruire le discours dominant et permettre la production d’utopies réalistes?

Car la révolution Bourdieu restera cette manière nouvelle de voir le monde social qui accorde une fonction majeure aux structures symboliques. L’éducation, la culture, la littérature, l’art, les médias et, bien sûr, la politique appartiennent à cet univers. Il disait: «Il faut, pour être un vrai savant engagé, légitimement engagé, engager un savoir.» C’est sans doute pour en avoir tiré les conséquences et avoir participé, plus que n’importe quel autre intellectuel, aux luttes symboliques et politiques de son temps qu’il fut considéré comme l’ennemi numéro un, unanimement reconnu et ouvertement désigné, de tous les défenseurs de l’ordre néolibéral.

Radicalité. 

Deux décennies ont filé sous nos yeux et une question s’impose: l’injonction politique et l’engagement total sont-ils victimes de notre temps? Chacun peut en témoigner: attention à l’éventuelle tentation pourtant impossible de domestication de lIdée et des concepts bourdieusiens. À la faveur dun anniversaire tout rond, certains ne manqueront pas de le revisiter à leur plus grand profit, nous imposant un Bourdieu inoffensif, tentant même une neutralisation de son œuvre interprétée comme une soumission aux déterminismes sociaux, alors qu’elle ne fut qu’un chemin de libération dans le processus de compréhension de l’émancipation humaine.

Sa radicalité intrusive en aura exaspéré plus d’un, parfois même chez ceux qui louaient son travail et s’employaient publiquement à l’honorer, à le diffuser, à le transmettre. Sa radicalité d’homme libre, portée au plus haut degré de l’intelligence, nous manque aujourd’hui. Comme nous manque son invitation à ce que «la gauche officielle» sache «entendre et exprimer» les aspirations de «la gauche de base». Il était une sorte d’ennemi numéro un de tous les libéraux qui, depuis sa disparition, tirent à boulet rouge sur la sociologie et la mémoire bourdieusienne. Les «gestionnaires», de gauche comme de droite, ne l’aimaient pas. Vingt ans après, l’histoire a tranché: même mort, Pierre Bourdieu continue de faire peur aux puissants !

[BLOC-NOTES publié dans l'Humanité du 21 janvier 2022.]

Publié par Jean-Emmanuel Ducoin 

 

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Loi de financement de la sécurité sociale 2022 Coût de grâce pour la psychiatrie?

22 Janvier 2022, 09:57am

Publié par PCF Villepinte

« Une société se mesure à la manière dont elle traite ses fous ». (Lucien Bonnafé).

La psychiatrie de Secteur a été créée en 1960 pour prendre en charge toutes les souffrances psychiques des plus bénignes aux plus sévères. Pour rappel 25% de la population seront à un moment de leur vie confrontés à la souffrance psychique.

Depuis 40 ans elle n’a cessé d’être appauvrie. D’abord en termes de moyens puis progressivement sur le plan clinique. Elle est passée d’une approche prenant en compte la complexité biopsychosociale visant à soigner la souffrance psychique de la personne dans sa singularité à une approche uniquement symptomatique biologisante et comportementale visant à éradiquer le symptôme.

La clinique fondée sur le soin psychique, l’écoute et la singularité de chaque patient - où l’on peut retrouver si nécessaire, une complémentarité entre psychothérapie, chimiothérapie, sociothérapie et comportementalisme - doit être remplacée par des traitements exclusivement chimiothérapiques et des programmes standardisés comportementaux (Réhabilitation psychosociale, Education thérapeutique…) visant à normaliser les individus.

Depuis 40 ans la psychiatrie n’a cessé de trier les patients suivis.

 Après avoir renoncé aux soins de prévention, elle s’est centrée sur les situations de plus en plus lourdes excluant les dépressifs non suicidaires, les psychoses n’entraînant pas de désocialisation, …

La plupart des dépressifs étant traités par leur généraliste doivent se contenter d’un traitement antidépresseur, alors qu’un soin psychothérapique serait beaucoup plus efficace. Cela explique pourquoi la France est le premier consommateur de psychotropes.

Depuis la Loi Touraine le Secteur est censé ne s’occuper que de la crise, le suivi des patients stabilisés relevant du secteur libéral (essentiellement les généralistes dont on connaît la rareté !)

Pourtant les effets sociaux du Covid (fermetures de crèches et d’écoles, chômage ou crainte du chômage…) ont provoqué une véritable épidémie de décompensations psychiques graves chez les tous petits, les ados, comme les adultes. Remettant au premier plan l’importance des dimensions de l’inconscient et la sociogenèse des troubles.

Pour y répondre le Gouvernement au lieu de donner au Secteur les moyens de répondre aux besoins, va rembourser, pour les ados suicidaires, des consultations de psychologues libéraux à condition de ne faire que du comportementalisme et pas de psychothérapie. Qui pourrait croire qu’un jeune qui ne croit plus à la vie peut se reconstruire en 10 séances de coaching !

Une Loi de Financement de la Sécurité Sociale qui va entraîner une psychiatrie déshumanisante et programmer l’exclusion des soins des plus malades

Au lieu de donner enfin à la psychiatrie de Secteur les moyens de ses missions, la Loi de Financement de la Sécurité Sociale va finir de la liquider.

La LFSS envisage d’aller plus loin dans la destruction du soin psychique. Puisque non seulement ses moyens (hors Ségur) sont en recul sur 2021 mais au travers de l’introduction de la T2A, elle va valoriser le développement de structures centrées exclusivement sur l’approche comportementale et sous doter les structures qui ont une approche biopsychosociale de la personne.

 Ces patients seront soumis à des programmes de remédiation cognitive, de réhabilitation psychosociale, d’éducation thérapeutique, qui s’ils s’inscrivaient dans les soins psychiques relationnels du Secteur comme un atelier de sociothérapie, pourraient s’entendre.

Mais ici il est question de les substituer à ces soins dans un objectif uniquement normalisateur des comportements, où la question de savoir ce que ressent la personne n’est pas jugée pertinente.

Ces structures ont aussi pour vocation d’exclure du soin les patients stabilisés, alors que l’on sait qu’ils sont stabilisés parce qu’ils bénéficient d’un suivi régulier en ambulatoire (CMP, CATTP…). Ils seront soumis à des programmes, puis évalués. Et c’est en fonction de cette évaluation que l’on les orientera vers le parcours de soins du généraliste avec éventuellement un étayage médicosocial. Mais ils ne seront plus suivis par le Secteur jusqu’à la prochaine crise ! Ainsi des établissements qui étaient à l’équilibre (voire excédentaires du fait des postes vacants) vont se retrouver en déficit et n’auront d’autre solution que de remplacer leurs structures de soin par des structures de traitements programmés.

 « Une société se mesure à la manière dont elle traite ses fous ». (Lucien Bonnafé).

  Nous assistons là à une opération de chosification de l’humain, de déshumanisation de masse. Cela parce que la psychiatrie est passée progressivement de soigner une personne qui souffre à traiter des symptômes, oubliant la dimension existentielle de la souffrance psychique et la dimension relationnelle du soin psychique

 

Contribuer à refonder une psychiatrie humaine :

le PCF appelle à participer les 12 et 13 mars

aux assises du soin psychique organisées par  

le Printemps de la psychiatrie

 

 

 

 

 

 

 

 

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La sociologie de Pierre Bourdieu est-elle toujours un sport de combat ?

21 Janvier 2022, 11:22am

Publié par PCF Villepinte

L'Humanité Vendredi 21 Janvier 2022

Jérôme SkalskiPierre Chaillan

RAPPEL DES FAITS L’œuvre et la pensée de l’auteur de la Distinction conservent aujourd’hui une grande fécondité, tant sur le plan de la recherche scientifique que sur celui de l’analyse critique de la société néolibérale et des rapports de domination au sein de la globalisation capitaliste. De nombreuses études et d’éminents travaux en témoignent au niveau international. Petit aperçu avec -nos trois chercheurs invités, qui soulignent l’apport toujours actuel de sa pensée.  

CHERCHEURS INVITÉS
Arnaud Saint-Martin Sociologue, chargé de recherche au CNRS, spécialiste de l’histoire des sciences
Gisèle Sapiro Directrice d’études à l’EHESS et directrice de recherche au CNRS, Centre européen de sociologie et de science politique(1)
Monique Pinçon-Charlot Sociologue, directrice honoraire de recherche CNRS et autrice (2) 

Arnaud Saint-Martin, en quoi l’œuvre de Pierre Bourdieu reste-t-elle vivante aujourd’hui?

 

ARNAUD SAINT-MARTIN

 L’œuvre de Pierre Bourdieu est une œuvre éminemment vivante. Elle continue de vivre à travers les recherches des autres, dans le sens où elle a été et reste un programme de recherche. Plusieurs aspects me paraissent importants pour qualifier cette proposition scientifique, et j’insiste sur la dimension de la science qui est décisive pour la caractériser. La première, c’est sa dimension cumulative. La dimension du progrès est très importante chez Pierre Bourdieu. Il insistait beaucoup sur la nécessité de l’avancement des connaissances, contre des formes de relativisme qui ont pu se développer dans les années 1980 et 1990. Cette espèce de vision un peu défaitiste de la science sociale selon laquelle toutes les théories se vaudraient et seraient définies seulement par leur relation à un auteur et des intérêts situés.

Icon QuoteIl incarnait une éthique de la science et une capacité à se renouveler.

ARNAUD SAINT-MARTIN

On a, à l’inverse, plutôt affaire à un programme qui veut faire progresser la connaissance de la société et qui assume son caractère heuristique, soit qui sert à la découverte. Il le fait sur la base de concepts éprouvés sur une grande variété d’objets et qui, au fur et à mesure, sont consolidés et deviennent toujours plus robustes. L’autre dimension qui me semble importante, c’est la construction d’un système théorique. Les concepts marchent ensemble. On ne peut pas les désolidariser: champ, capital, habitus, pratique, violence symbolique, etc.

Tout cela participe d’un vocabulaire unifié, dont il faut à chaque fois faire fonctionner les divers composants ensemble. Cela produit un regard qu’il s’agit d’appliquer et de mettre à l’épreuve, et cela fournit une vision globale qui permet de ne rien oublier et de monter en généralité. Le danger, quand on décrit une réalité sociale, c’est de se limiter à la description des phénomènes, de se laisser écraser par la collection de données purement empiriques.

Un autre aspect qui me paraît décisif dans ce programme de recherche, c’est la réflexivité. C’est-à-dire que c’est une sociologie qui se prend aussi comme objet, une sociologie qui est critique d’elle-même et qui avance dans la critique de ses propres concepts et aussi des objections qui lui sont faites au fur et à mesure. Une sociologie qui, en d’autres termes, suppose la sociologie de la sociologie. L’objectivation s’accompagnant de l’objectivation du sujet de l’objectivation. Autre point essentiel, cette sociologie s’éprouve comme combat par moments sur certains objets «chauds».

Lire aussi : Spécial «vingt ans après». Pierre Bourdieu, le sens commun

Cette dimension du combat a été vulgarisée par l’expression «la sociologie est un sport de combat». Plus précisément, face à des évidences très internalisées dans certains champs sociaux, par exemple dans la culture, les arts, la science ou la politique, exercer le regard sociologique – qui consiste à rompre avec le sens commun – est un procédé qui peut apparaître assez brutal pour les enquêtés, qui peuvent alors résister à l’analyse. Forcément, cela met à l’épreuve de procéder ainsi. Enfin, dernière dimension: cest lexemplarité de Bourdieu comme savant. Il a mis en œuvre, au sein du Centre européen de sociologie, une façon de faire de la science collectivement, en équipe. Il incarnait une certaine exigence théorique, scientifique, très forte, une éthique de la science et, en même temps, une capacité à constamment se renouveler.

 

GISÈLE SAPIRO

 Je souscris à tout ce qu’a dit Arnaud Saint-Martin. J’ajouterai que l’œuvre de ­Bourdieu est aussi un garde-fou contre l’individualisme méthodologique. Elle met l’accent sur les déterminations sociales sans être un fatalisme social. C’est un déterminisme méthodologique, comme toute science, mais qui met l’accent sur la dimension relationnelle du monde social. Le deuxième point sur lequel je voudrais insister est qu’il s’agit d’une approche objectivante et objectiviste qui prend en compte le point de vue des individus. L’objectivation ne veut pas dire la neutralité. C’est important parce que l’on confond souvent les deux. Ce qu’on appelle aujourd’hui la neutralité axiologique est en réalité une couverture pour des idéologies qui ne se disent pas comme telles.

 

MONIQUE PINÇON-CHARLOT

 Je voudrais aborder un autre aspect: Pierre Bourdieu est un auteur vivant au-delà même de son œuvre. Bourdieu, c’était des étincelles en tous sens. Ce quil y avait dextraordinaire, quand nous étions avec lui, c’est qu’il avait l’art de rendre ses interlocuteurs intelligents. ­Michel a eu la chance de l’avoir comme professeur à Lille dès sa première année de sociologie, au début des années 1960. Pierre Bourdieu l’a invité une quinzaine de jours, avec d’autres étudiants, à venir travailler à Paris durant l’été avec lui pour faire notamment des fiches de lecture et participer à des échanges.

Ces travaux lui ont vraiment permis de faire de la sociologie le centre de sa vie professionnelle. C’est ainsi que Michel a pu introduire le système théorique de Pierre Bourdieu dans le domaine de la sociologie urbaine au début des années 1970. Nous avons alors lu, Michel et moi, l’Esquisse d’une théorie de la pratique, qui fut pour tous les deux une révélation intellectuelle mais aussi existentielle.

Nous ne découvrions pas seulement des concepts et un système théorique de la domination, mais des lunettes pour voir et comprendre le monde social. Une véritable explosion de joie partagée à deux. Nous sommes devenus fans de Pierre Bourdieu parce qu’il nous a donné la possibilité de faire de la recherche dans un bonheur quotidiennement renouvelé. Notre dette à son égard est donc immense car nous n’aurions jamais pu mener, sinon, nos enquêtes dans la classe dominante.

Pierre Bourdieu a été un des grands sociologues à s’attaquer aux processus de la domination sociale. Gisèle Sapiro, que nous apporte-t-il dans ce domaine?

GISÈLE SAPIRO 

Pierre Bourdieu a pensé les formes de domination à partir de Marx et de Max Weber, tout en empruntant à Durkheim. Pas seulement sur le plan économique, comme Marx, mais en réfléchissant aux formes symboliques de domination, notamment en travaillant sur les sociétés précapitalistes. La notion de violence symbolique est un concept central de son œuvre pour comprendre ces formes de domination symbolique. La violence symbolique, c’est une violence douce qui s’exerce avec la complicité des dominés parce que les dominés ont intériorisé les manières dominantes de penser et de juger le monde. Ils les ont intériorisées au cours de leur socialisation familiale mais aussi à l’école.

C’est d’abord à propos de l’école qu’avec Jean-Claude Passeron, Bourdieu a développé ce concept de violence symbolique, dans la Reproduction. La violence symbolique fonctionne par le fait qu’elle masque les mécanismes de domination et qu’elle les légitime en les masquant: cest la méconnaissance-reconnaissance, termes clés pour penser cela. Bourdieu a ensuite développé ce concept à propos de la domination masculine, puis la théorisé dans Méditations pascaliennes.

Monique Pinçon-Charlot, en quoi cette violence symbolique se dévoile-t-elle dans le cadre de votre travail, Sociologie de la bourgeoisie française, avec Michel Pinçon?

MONIQUE PINÇON-CHARLOT

 Elle s’exprime dès l’arrivée dans les beaux quartiers par cette confrontation des différentes formes du social que Pierre Bourdieu a si bien théorisée. Le social intériorisé est si puissant qu’il modèle les esprits mais aussi les corps, de telle sorte que ceux des bourgeois sont fins, droits avec un port de tête altier. Le contraste est saisissant avec les silhouettes malmenées par des conditions de vie dures des habitants que je viens de croiser pour venir vous retrouver Carrefour-Pleyel, où est situé le siège de l’Humanité. Le social intériorisé est en cohérence avec le social objectivé dans des formes urbaines et architecturales, avenues larges et ombragées pour les uns, rues étroites et encombrées pour les autres.

Icon QuoteNous découvrions des lunettes pour voir et comprendre le monde social.

MONIQUE PINÇON-CHARLOT

Aussi, lorsqu’on organise des promenades sociologiques pour des élèves de milieux défavorisés dans les beaux quartiers, l’accompagnement est indispensable, comme l’a fait Nicolas Jounin dans son très beau livre Voyage des classes, pour apprivoiser collectivement la violence symbolique. Comme l’a dit très justement Gisèle Sapiro, cette violence, qui a l’apparence de la douceur, est en réalité dure et terrible, parce qu’elle est intériorisée au plus profond de l’individu, qui en conclut que «cela nest pas pour moi, je nen suis pas digne»!

Les méthodes et les concepts de Bourdieu sont impliqués aujourd’hui au niveau de réalités sociales internationales ou transnationales. Gisèle Sapiro, quelle est leur fécondité théorique?

GISÈLE SAPIRO

 Bourdieu lui-même avait commencé par travailler sur l’Algérie et sur les effets de la colonisation sur ce pays. Il a d’abord réfléchi sur l’internationalisation du champ économique et la formation d’un champ mondial de l’économie. Une conférence qu’il a donnée en 1989 sur les conditions sociales de la circulation internationale des idées est devenue un programme de recherche très important. Depuis la fin des années 1990, au Centre européen de sociologie et de science politique, nous avons développé des travaux en ce sens.

On compte toutes sortes de travaux sur l’international. je citerai la thèse et le livre de Pascale Casanova, la République mondiale des lettres. Des travaux sont en cours sur la construction européenne, sur la manière dont se recrutent les élites européennes et les types d’opposition qui se dessinent entre ceux qui ont des profils plus internationaux et ceux qui ont des profils plus nationaux, par exemple. Il y a eu des études, aux États-Unis, utilisant le concept de champ pour penser les formes de colonialisme, qui distinguent les modes de domination économique, culturelle et politique dans les colonies.

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Toute une réflexion est actuellement menée aussi sur la division internationale du travail avec les délocalisations, mais aussi en termes de division internationale du travail de domination. Plus spécifiquement, des travaux sur les échanges culturels internationaux ont été engagés dans le sillage de cette réflexion sur la circulation des idées. La sociologie de Bourdieu permet de dépasser l’alternative entre, d’un côté, la vision irénique de la globalisation, comme des échanges libérés des contraintes, des frontières nationales, des frontières linguistiques, des frontières culturelles et, de l’autre côté, une réduction de la mondialisation à l’impérialisme états-unien. Comment dépasser cette alternative entre la vision irénique de compréhension mutuelle et la vision d’une hégémonie à sens unique?

En étudiant précisément les instances et les acteurs de la mondialisation, mais aussi les formes d’opposition et de lutte de celles et ceux qui leur opposent des résistances. Bourdieu s’est engagé lui-même, on le sait, contre l’idéologie néolibérale en grande partie diffusée depuis les États-Unis, et dont on ressent les effets délétères à l’hôpital, dans l’enseignement et dans la recherche, où elle a été imposée par le biais du new public management, qui transpose aux institutions publiques les principes de gestion du privé, orientés vers le profit. Là-dessus, des travaux ont été entrepris pour montrer comment cette idéologie importée a été transposée dans ces institutions.

MONIQUE PINÇON-CHARLOT

 La grande bourgeoisie, l’aristocratie de l’argent ou l’oligarchie – peu importe comment on appelle cette classe au sommet de la richesse et des pouvoirs – exerce sa domination à l’échelle nationale, mais aussi, depuis longtemps, à l’échelle internationale. Le cosmopolitisme de classe se construit dès la petite enfance, avec des amis et des membres de la famille élargie, aux quatre coins du monde.

La vraie patrie des gens de pouvoir et d’argent ne connaît pas les frontières nationales, par exemple, en évitant la solidarité avec les plus démunis ou en ne payant pas des impôts à la hauteur de leur fortune. Leur vraie patrie, écrivait Norbert Elias, c’est «leur» société. D’ailleurs, quand les dominants parlent d’eux-mêmes, ils disent «la société».

Ils sont donc parfaitement en phase avec la mondialisation et la globalisation capitaliste, comme le renard dans le poulailler planétaire, maîtrisant plusieurs langues étrangères, avec des camarades de classe de partout et toujours prêts à prêter main-forte pour tout investissement financier à dividendes juteux.

Monique Pinçon Charlot, vous avez utilisé, dans votre œuvre, le concept de «communisme» pour la caractériser. La grande bourgeoisie serait donc aussi une classe internationaliste?

MONIQUE PINÇON-CHARLOT

 Oui, c’est cela. Nous avons rencontré dans les beaux quartiers une forme de «communisme de luxe et de pouvoir» avec une solidarité de classe qui se construit dès la petite enfance, grâce à un entre-soi soigneusement entretenu. Chaque membre de cette petite caste reçoit la charge d’en défendre les intérêts en tous lieux et dans les nombreuses institutions ad hoc. Pierre Bourdieu parlait magnifiquement d’une orchestration sans chef d’orchestre. Cela n’empêche pas des concurrences interindividuelles, ni à certains de subir les affres de la justice.

Mais, même dans ces cas-là, le soutien pourra se manifester par la médiation de l’un des leurs pour négocier une sortie de crise ou, dans le cas d’un procès, par la promesse que tout sera fait pour éviter la prison à celui qui s’est fait prendre! Tout se passe donc comme sil y avait des stratégies conscientes pour que, au final, cette classe sociale puisse sapproprier les titres de propriété lui permettant, grâce au système capitaliste, d’exploiter toutes les formes du vivant.

ARNAUD SAINT-MARTIN

 Sur la dimension de l’internationalisation, je dirais un mot à partir de mon objet, certes un peu exotique: lastronautique. Sil y a bien un lieu où cela marche à fond, cest dans le spatial! Par exemple, on constate sans peine la circulation internationale dun mot dordre obstinément pro-capitaliste, résumé par lexpression «New Space». Aujourdhui, des créateurs de start-up et des gros patrons multimilliardaires, par exemple Elon Musk ou Jeff Bezos, pratiquent une forme sophistiquée d’évasion cosmique, connectée à l’évasion plus terre à terre: celle de fortunes échappant largement à limpôt et profitant des infrastructures et dépenses publiques.

Le «New Space» universalise une vision située d’un point de vue culturel, politique et idéologique, charriant les valeurs d’une oligarchie états-unienne qui impose ses standards d’existence au reste du monde. Ce que je trouve intriguant mais en fait assez prévisible, c’est la banalisation de cette vision entrepreneuriale mercantile, par exemple sur le Vieux Continent. En France, en particulier, depuis Bercy, le pouvoir de la «start-up nation» prône une «Space Tech» inféodée au credo de l’«astro-capitalisme».

On retrouve, vaguement francisés, les mêmes standards: start-up, entrepreneuriat, marchandisation des usages de lespace par laccaparement privé des ressources spatiales, en violation du traité de lespace de 1967 qui prône une vision internationaliste de lexploration de lespace. Ainsi s’affirme une incarnation contemporaine spectaculaire du capitalisme globalisé, qui suppose aussi une classe sociale d’entrepreneurs hantés par la croissance exponentielle des marchés de l’espace, qui circulent partout où leurs affaires peuvent prospérer.

J’observe ces évolutions à distance critique, en les documentant le plus objectivement possible, avec le regard d’un ethnologue curieux et parfois désarçonné. Il n’est pas rare, en effet, de croiser des astro-capitalistes millénaristes qui, au bout du compte, vous disent: «La Terre est foutue, dépêchons-nous de nous en évader!»

(1) Elle a dirigé, avec Franck Poupeau, le Dictionnaire international Pierre Bourdieu (CNRS Éditions), 2020 et a publié Peut-on dissocier l’œuvre de l’auteur? (Seuil), 2020. (2) Dernier ouvrage paru, avec Michel Pinçon, Notre vie chez les riches. Mémoires d’un couple de sociologues (Zones, La Découverte), 2021. Et à voir À demain mon amour! le film de Basile Carré-Agostini qui sortira en salles le 9 mars.

 

 

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