Un sérieux coup au libéralisme
Politique - le 2 Décembre 2010
événement
Déjà, en 2009, une enquête menée par la BBC, montrait que « la France est, de tous les pays comparables, celui où on estime le plus que le capitalisme de libre-échange est fondamentalement dans l’erreur et qu’on a besoin d’un autre système économique ». À cet égard, l’enquête de la Fondation Gabriel-Péri confirme un net recul de l’adhésion au libéralisme économique où les termes « Bourse », « profits », « privatisation » et « capitalisme » sont très majoritairement connotés négativement (voir graphiques ci-contre). Si l’idée de « profits » est rejetée à 53 %, elle ne fait pas « l’objet d’un rejet comparable à celui des dimensions les plus caractéristiques du système socio-économique libéral ». Si les responsables scientifiques de l’enquête notent que le capitalisme « n’a jamais suscité l’enthousiasme », ils observent néanmoins que la proportion d’avis négatifs passe de 50 % en 1988 à 64 % en 2010. Parallèlement, les sentiments négatifs à l’égard du concept de « mondialisation » gagnent six points entre 2001 et 2010 pour aujourd’hui caracoler à 57 %.
L’un des éléments les plus intéressants de l’enquête réside dans la question posée sur le contrôle des entreprises : « Faut-il faire confiance aux entreprises et leur donner plus de liberté ou faut-il que l’État les contrôle et les réglemente plus étroitement ? » On constate en effet que la population sondée semble en constant décalage avec les responsables politiques qu’elles se donnent. Ainsi, sous Valéry Giscard d’Estaing, l’idée de « contrôle » l’emporte nettement, « c’est déjà beaucoup moins vrai en 1980 » juste avant la présidentielle qui verra François Mitterrand accéder au pouvoir. En 1982, la volonté de laisser une importante « liberté » aux entreprises s’envole. Dans les années 1980, à la faveur d’un long travail idéologique, on observe comment les solutions alternatives au marché reculent et la manière dont le libéralisme s’impose peu à peu comme la seule politique possible. Selon l’enquête, il faut attendre 1994 puis 2007 pour que le contrôle des entreprises et le laisser-faire s’équilibrent. Aujourd’hui, et depuis la crise, alors même que Nicolas Sarkozy avait mené campagne sur son réformisme libéral, le « contrôle » des entreprises prend largement le pas sur la « liberté ».
Enfin, le volet de l’enquête consacrée à l’influence du patronat et des milieux d’affaires est particulièrement illustrant. Entre 2001 et 2010, le sentiment d’une influence excessive dans la définition des orientations politiques progresse de 39 % à 50 %. Dans le même temps, les réactions évoluent sur le sentiment que « les chômeurs trouveraient plus facilement du travail s’ils le voulaient vraiment ». En 2007, cette constante de l’idéologie libérale, largement reprise par la nouvelle droite au pouvoir, reste très largement approuvée (63 %), tandis qu’elle connaît un sérieux reflux en 2010 – tout en restant importante – avec 47 % d’adhésion. Aussi, la notion de mérite et la culpabilisation des chômeurs ont-ils reculé avec la crise.