Une année de gestation
L’année 2010 a clos un cycle, celui qui a vu triompher Nicolas Sarkozy, qui avait habilement confondu un libéralisme forcené et l’aspiration imprécise à ce que le travail soit respecté. Les impostures ont été dévoilées une à une. L’échec des rafistolages face à la crise capitaliste, l’injustice criante d’une politique asservie aux intérêts du club du Fouquet’s, les slogans de campagne ravalés à « travailler moins ou beaucoup plus pour gagner toujours moins », un mode de gouvernement arrogant et autoritaire ont conduit la popularité du président vers des abysses. La République sort cabossée de trois années de mandat qui ont déchiré le contrat social, menacé l’égalité et stigmatisé des larges secteurs de la population. L’Élysée incarne désormais un facteur majeur de division.
Le rejet du sarkozysme, spectaculairement manifesté au sujet de la réforme des retraites, ne signifie cependant pas sa défaite. Les mêmes politiques d’austérité peuvent se parer d’autres plumages… La déception politique peut engluer l’envie de changer dans d’autres ornières. La soudaine complaisance des grands médias pour Marine Le Pen indique l’une de ces voies sans issue. Le découragement peut enfin gagner devant le spectacle des appétits déchaînés dans une partie de la gauche. L’édification d’une alternative politique solide apparaît comme l’urgence pour l’année nouvelle que ne doit pas occulter la recherche de l’homme providentiel. En effet, cette dernière assure pour demain un cortège de désillusions. L’expérience ne compte pas d’exceptions.
2011 peut devenir une année de gestation. Elle est, avant de s’ouvrir, grosse des résistances qui se sont fortifiées au fil des mois. Elles ont permis de nouvelles confluences, des rencontres, des découvertes réciproques. L’expérience de l’unité syndicale a donné confiance aux salariés. Les rencontres nouées pour l’édification d’un programme partagé du Front de gauche appellent des suites avec des personnalités d’horizons multiples. On aurait tort de mésestimer les débats qui traversent le PS autour du thème de l’égalité réelle, de même que les questionnements des militants de l’économie sociale et solidaire, la mise en cause du capitalisme par les partisans de l’écologie politique. La revendication d’une croissance durable et profitable à tous est de mieux en mieux partagée. Les réflexions sur la mise en commun des ressources et des capacités progressent.
2011 n’est donc pas la salle d’attente de la prochaine élection présidentielle. C’est durant ses douze mois que l’essentiel va se jouer. C’est à l’avènement d’un véritable changement que vont nos vœux pour l’année nouvelle.