« Une rupture historique »,
Grèce. Le FMI en rêvait, l’Europe l’a fait
Un tournant dans l’histoire de la zone euro : le Fonds monétaire international, bras armé des États-Unis, appelé à
la rescousse des finances grecques. À qui le tour maintenant ?
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« Une rupture historique », déclare à juste titre Attac France dans un communiqué publié hier. C’est la première fois que la zone euro réclame le concours du FMI pour participer au règlement de ses problèmes financiers. Les dirigeants européens tentent de minimiser l’affaire, mais il s’agit d’un précédent qui risque d’avoir de graves conséquences. C’est un signe de faillite de l’union monétaire autour de l’euro qui, prétendument, devait permettre à l’Europe de s’émanciper du dollar. C’est comme si les États-Unis faisaient appel au FMI pour régler les difficultés de la Californie.
Le FMI a déjà une solide réputation. Il s’est taillé une renommée dans les pays en développement mais son assise s’est élargie. Dans la dernière période, il s’est beaucoup intéressé à l’Europe. Dans un texte de novembre 2007, juste avant la crise, il plaidait pour qu’une place plus grande soit faite sur le continent aux marchés financiers – dominés par les Américains et à l’origine de la crise – aux côtés des banques. Il préconisait aussi, « pour contenir la pression que le vieillissement de la population exerce sur les budgets », de « redonner des objectifs plus ambitieux à la maîtrise des finances publiques, en mettant l’accent sur la réduction des dépenses ». Grâce au feu vert donné par le sommet, il va pouvoir suivre en direct la mise en œuvre de ses propres recommandations.
En Europe de l’Est, les experts du FMI ont organisé la transition en permettant aux banques et aux multinationales étrangères, d’Europe de l’Ouest et des États-Unis, de réaliser une véritable OPA. De l’aveu même du Fonds, ces pays « ont sensiblement accru leur dépendance envers les banques étrangères », cela au point qu’ils se sont trouvés tous « nus » lorsque la crise financière a éclaté et que ces mêmes institutions financières ont retiré leurs capitaux. Totalement étranglés, au bord de la banqueroute, à qui ont-ils dû faire appel ? Au FMI évidemment, qui est intervenu à la manière d’un bulldozer en Hongrie, en Roumanie, en Pologne, dans les États baltes, abaissant les droits sociaux.
Cela montre qu’une autre construction monétaire européenne, pour répondre aux besoins des peuples, doit faire reculer les marchés financiers, à l’Est et à l’Ouest, mais doit également agir pour un autre système monétaire international, notamment en réformant le FMI, en réduisant en son sein le pouvoir des États-Unis et le rôle du dollar, en substituant au billet vert, comme monnaie universelle, une monnaie commune de coopération.
Pierre Ivorra