Pourquoi tant de haine ?
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Les dockers, donc, comme le titre cet article, sont « ceux qui massacrent l’économie française ». Oubliés les traders, les parachutes dorés, les fantastiques salaires des grands patrons, les vagues de licenciements, les délocalisations. La crise du capitalisme n’est toujours pas finie et l’on crie « Vive le capitalisme » ! Car on sent dans cette haine comme un lâche soulagement. Ce dont l’article de Franz-Olivier Giesbert est le nom, c’est de l’esprit de revanche de la classe dominante après l’automne des retraites. Des témoignages qui se multiplient dans les départements font état d’un regain antisyndical touchant particulièrement la CGT. L’automne, face au pouvoir, face au Medef et à la puissance de la Finance, a démontré à l’envi qu’en France, le peuple ne courbait pas la tête et que le système lui-même était en question.
Nicolas Sarkozy avait tenté, l’été précédent, une diversion majeure et indigne avec les Roms, les délinquants étrangers… Depuis deux mois maintenant, on nous ressert régulièrement Mme Le Pen et le lifting de son vocabulaire, que d’aucuns feignent de prendre pour un nouveau visage. Faut-il se demander pourquoi ? La réponse va de soi. Toujours et partout, hier comme aujourd’hui en Europe, les extrêmes droites ont servi à détourner les aspirations populaires et les révoltes, comme le démontrent, sous différents angles, les contributions à nos pages débats (p. 10 et 11). Et, tandis que la tentation de faire grandir le FN pour affaiblir la droite effleure certains esprits, d’autres y voient une raison d’aller toujours plus à droite, jusqu’à saluer, comme Ivan Rioufol dans le Figaro, « un électrochoc utile ».
Mais il ne suffit pas d’assurer la promotion et la banalisation de Mme Le Pen. Il faut aussi discréditer toute volonté de changement et toute perspective alternative à la politique actuelle. L’épisode tout à la fois scandaleux et surprenant du dessin de Plantu n’est pas un fait isolé. Voilà des semaines que les chroniqueurs en cour, dans leurs diverses tribunes, distillent cet amalgame entre le FN et la gauche qui n’a pas renoncé. Mais c’est aussi le livre de Stéphane Hessel, que certains commentateurs ont inscrit sur leur liste noire au nom de la stérilité, voire de la « bêtise » selon Luc Ferry, philosophe instrumental, de « l’indignation ». Et c’est ainsi que Franz-Olivier Giesbert perd pied, dans un pathétique naufrage de l’esprit critique.