Palestine: journées historiques aux Nations unies (analyse)
Palestine
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L’Assemblée générale des Nations unies va faire de la Palestine un État observateur non membre. Une victoire pour le peuple palestinien qui peut maintenant exiger de vivre dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale.
À n’en pas douter, cette fin de semaine est historique pour le peuple palestinien et, au-delà, pour tous ceux qui ont la justice et le droit au cœur. Soixante-cinq ans après que cette même Assemblée des Nations unies a décidé le partage – inégal à bien des points de vue – de la Palestine mandataire, un État de Palestine va faire son entrée au sein de la communauté internationale. Il ne s’agira donc plus d’une « entité » comme c’était le cas jusqu’à présent, mais bien d’un État observateur non membre. La différence est de taille. Alors que le vote prévu aujourd’hui ou demain est acquis (plus de 130 États ont déjà dit leur intention d’approuver la demande palestinienne), on ne saurait trop se féliciter de l’annonce de la France (membre permanent du Conseil de sécurité de l’ONU) qui, très certainement, a permis à d’autres pays de l’Union européenne de s’engouffrer à sa suite.
C’est le cas de l’Espagne, du Danemark, du Luxembourg et de l’Autriche. Le Portugal pourrait faire de même, ainsi que l’Irlande. L’Allemagne, de son côté, a fait savoir qu’il n’y aura pas d’approbation de sa part. Quant à la Grande-Bretagne, elle se disait, jusqu’à hier, ouverte « à l’idée de voter en faveur de la résolution si nous voyons que les Palestiniens fournissent publiquement des garanties » sur plusieurs points, notamment leur retour immédiat et sans conditions à la table des négociations sur la création d’un État palestinien.
Ce vote européen, s’il n’est pas capital (la majorité suffit), est néanmoins essentiel pour l’avenir. Cette admission de la Palestine en tant qu’observateur non membre, s’il marque une progression non négligeable par rapport à l’insupportable statu quo observé, n’est évidemment pas une fin en soi. Tout le monde le sait bien, à commencer par le gouvernement israélien. Ce dernier a tout fait pour éviter un tel vote à l’ONU. Et pourtant, ses réactions étaient faibles à la veille de l’Assemblée. Pourquoi ? Parce que Tel-Aviv a su faire admettre de la part des Européens une contrepartie de taille : une reprise des négociations sans condition et une pression accrue sur les Palestiniens pour qu’ils ne saisissent pas la Cour pénale internationale (CPI). « Sans condition », c’est-à-dire refuser la demande palestinienne d’un arrêt de la colonisation pour toute discussion de paix.
« La France essaiera de peser pour une solution de paix »
Or, c’est bien le bémol qu’a mis Laurent Fabius. Tant sur la CPI – « Si l’on veut aller vers la négociation et trouver une solution (de paix au Proche-Orient), il est évident qu’il ne faut pas utiliser tel ou tel élément qui mettrait l’ensemble » en difficulté, a-t-il dit sur France Inter – que sur la colonisation. Il admet qu’« il ne faut pas qu’il y ait de geste qui empêche cette négociation, en particulier le développement de la colonisation », mais qu’ont fait la France et l’Union européenne depuis des années pour y mettre un terme? Rien ! Même pas une menace de sanctions ou de suspension des accords d’association. Au contraire, le statut d’Israël a été rehaussé malgré le chapitre 2 des accords, relatif au respect des droits de l’homme. Dans ces conditions, avec un Netanyahou prêt à se faire réélire entouré des personnalités de droite les plus extrémistes (avec notamment des représentants des colons), on voit mal comment la position israélienne changerait sans contrainte.
Il y a quelques semaines encore, la position de la France était incertaine. La mobilisation de l’opinion publique et d’élus de tous bords a très certainement poussé le gouvernement à se déterminer favorablement. Preuve qu’il est possible d’influer sur la politique étrangère. « Il faudra que nous arrivions à rapprocher les points de vue, et la France, à la fois l’amie d’Israël et des Palestiniens, dira son mot et essaiera de peser pour une solution de paix », a répété Fabius. Il faut donc accompagner cette démarche dans un cadre politique et juridique qui ne peut se satisfaire de la violation perpétuelle du droit international sans sanction aucune. Faire cesser la colonisation, c’est aussi permettre le respect des résolutions internationales (194 ; 242, ; 338) pour que cet État de Palestine, dont le drapeau va orner la maison de verre à New York, existe réellement dans les frontières de 1967 avec Jérusalem-Est comme capitale.
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