On peut cogner, chef?
La police est-elle au service des citoyens ?
Rappel des faits
Les débats sur la Loppsi à l’Assemblée depuis mardi laissent entrevoir un désengagement financier de l’État sur les questions de sécurité et une mission toujours davantage centrée sur son volet répressif.
Depuis mardi, le projet de Loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi) est en débat à l’Assemblée. L’objectif : donner un cadre aux forces de police et de gendarmerie, mais aussi, et pour la première fois, aux services de sécurité privés. Au menu de ce texte, une série de mesures pour la plupart considérées par l’opposition, certains syndicats et associations comme attentatoires aux libertés. Mais, surtout, un projet de loi qui accentue le volet répressif de la mission de la police, au détriment des autres, et en tentant de jongler avec des effectifs de plus en plus réduits : développement de la vidéosurveillance, rôle accru des polices municipales et des services de sécurité privés, tout est bon pour punir davantage et pour réduire les frais de l’État. Alors que se creuse chaque jour encore plus le fossé entre la population et la police, que cette dernière elle-même manifeste régulièrement son insatisfaction à se voir imposer des tâches dictées par des impératifs chiffrés et privées de sens, nous avons réuni un politologue (Fabien Jobard), un policier (Yannick Danio) et un rappeur (Rost) pour s’emparer du débat sur l’avenir de notre police, dresser un état des lieux, et donner quelques pistes de ce que serait, pour eux, « une police citoyenne ». Au centre de leurs préoccupations, les contrôles d’identité, vécus par certains comme un harcèlement, ciblés sur les populations noires, maghrébines ou habillées hip-hop, et qui, bien souvent, sont devenus le dernier contact entre la police et la population ; la politique du chiffre et ses conséquences directes sur le travail des policiers et sur leur rapport avec la population ; et le report des missions de la police nationale sur les collectivités et les services privés, avec la mise en place d’une sécurité à plusieurs vitesses, de plus en plus à la charge des collectivités locales. Et la mémoire, pas si lointaine, des révoltes de 2005 dans les quartiers populaires, où la colère n’est pas retombée.
Anne Roy