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Iran : « Femmes, vie, liberté »

5 Octobre 2022, 06:58am

Publié par PCF Villepinte

Iran : « Femmes, vie, liberté »

Le 20 septembre 2022, Mahsa Amini a succombé à ses blessures à l’hôpital de Téhéran. Arrêtée pour « tenue indécente » par la police des mœurs, elle a été battue, provoquant une fracture du crâne fatale. Mahsa Amini était une jeune femme kurde et cela explique aussi la violence dont elle a fait l’objet tant la situation de ce peuple est faite de discrimination et de subordination. Sa mort a suscité une indignation générale à l’origine de manifestations d’ampleur dans tout le pays.

Depuis l’instauration du régime islamique, les femmes font l’objet d’une violence systémique et patriarcale qui prend d’innombrables formes. Le port du voile concerne l’essentiel des interventions de la police des mœurs qui patrouille dans l’espace public à la recherche de femmes qui contreviennent à la morale islamique. Ces derniers mois, la violence et la répression quotidienne se sont brutalement aggravées.

Plusieurs facteurs expliquent ces évolutions. Dans un contexte international tendu, l’espace public fait l’objet d’une surveillance plus étroite. De plus, avec l’élection à la présidence de la République d’Ebrahim Raïssi, les ultra-conservateurs détiennent tous les leviers du pouvoir.

Les difficultés économiques du pays qui résultent de l’incurie, de la corruption des mollahs et de l’oligarchie en place mais aussi des sanctions américaines ont plongé la moitié de la population dans la pauvreté, tandis que les couches moyennes sont laminées. Dans ce contexte social explosif, les éléments les plus réactionnaires du régime ont décidé d’un retour par la force à l’ordre moral islamique.

On assiste non seulement à un renforcement des contrôles à l’égard des femmes, mais aussi à une multiplication des mesures vexatoires. En juillet, les autorités ont dévoilé un plan en faveur de la chasteté, et en septembre, elles ont révélé leur intention d’utiliser l’intelligence artificielle pour identifier les femmes qui porteraient mal leur voile.

Depuis plusieurs décennies, la société iranienne, comme l’ensemble des sociétés du Moyen-Orient, sont en pleine mutation. La condition féminine s’éloigne des clichés encore vivaces en Europe qui assignent à la femme iranienne ou arabe un statut de victime de l’autorité patriarcale écrasée par le poids des traditions et de la religion. Les luttes des femmes actuelles s’inscrivent dans l’histoire, car un féminisme a émergé depuis la fin du XIXe siècle et dans la naissance des États postcoloniaux, accompagnant un mouvement d’émancipation, relatif mais réel, avec l’objectif de faire prévaloir leurs droits.

Ces mouvements ne viennent donc pas de rien. Ces dernières années, la société iranienne s’est modernisée, urbanisée, sécularisée, tandis que le niveau d’éducation n’a pas cessé de croître. L’université s’est elle aussi féminisée. Ces changements contrastent avec des structures politiques qui n’ont pas changé, voire qui se sont fossilisées, limitant toujours plus les libertés, accentuant la violence politique en ciblant les femmes, les jeunes et les démocrates.

Ce mouvement s’inscrit dans un ensemble plus large de mobilisations ayant affecté l’Iran dans un passé récent. En 2009, 2017, 2018 et 2019, des manifestions considérables ont contesté le régime dictatorial pour des raisons économiques et sociales. Les Gardiens de la révolution les ont noyées dans le sang.

Le soulèvement actuel se distingue cependant des précédents. Il vient des profondeurs de la société, exprimant une exaspération radicale à l’égard de ce pouvoir théocratique. Les femmes sont aux avant-postes contre un régime autoritaire, rétrograde et répressif. Nombreuses sont celles, dans un courage admirable, qui refusent de porter le voile, se découvrent la tête, jettent leur foulard au feu en rendant public leur acte dans des vidéos virales qui les exposent à un déchaînement de brutalité. Toutes les femmes qui manifestent ne sont pas contre le voile, mais toutes refusent les impératifs religieux de la séparation des sexes et leur soumission au fondement de la République islamique.

Ne nous y trompons pas, derrière ces actes de défiance, il y a une remise en cause frontale du système, comme en témoignent les slogans des manifestations qui dénoncent la « dictature », qui incendient les commissariats et s’en prennent aux forces de l’ordre.

La révolte gagne aussi toute la jeunesse, notamment masculine. Comme par le passé, les universités sont en ébullition. La colère est à son comble et l’aspiration à un changement radical est massive.

Un doute a saisi les autorités, et le pouvoir se sent fragilisé car ce mouvement touche au noyau dur du système. Pour y faire face et rassurer sa base sociale, il a choisi de durcir le ton. On dénombre plus d’une cinquantaine de morts, des centaines d’arrestations, tandis que les réseaux sociaux ont été coupés.

Rien n’y fait, car Mahsa Amini est devenue un symbole de lutte, de libération et de justice pour les femmes et toute la société.

Cette explosion de colère, non coordonnée, non structurée autour d’une organisation ou d’une idéologie, rejetant le système et refusant le compromis, présente des analogies avec tous les mouvements sociaux qui parcourent le monde et dans lesquels les formations politiques sont en retrait, notamment, mais pas seulement, en raison de la répression dont elles font l’objet. Cela devrait constituer un motif de réflexion sur ce décalage aux lourdes conséquences.

Les coups de boutoir se multiplient contre le régime iranien qui conserve une assise sociale qui tend cependant à s’éroder. Il faut donc rester prudent sur les conséquences, même s’il ne faut rien exclure. Plus que jamais, la solidarité internationaliste doit s’exprimer avec force.

Pascal Torre
responsable-adjoint du secteur international du PCF
chargé du Maghreb et du Moyen-Orient

 

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Cantines scolaires : ces communes qui résistent à la hausse

4 Octobre 2022, 08:11am

Publié par PCF Villepinte

Restauration Les collectivités locales doivent jongler entre une inflation à 6 % et la volonté de ne pas augmenter les tarifs. Certaines, qui ont fait le choix d’une gestion municipale directe, s’en sortent mieux que d’autres.

En banlieue parisienne, le Syrec, un syndicat intercommunal, gère la restauration scolaire des villes de Gennevilliers, Saint-Ouen, Villepinte et Villeneuve-la-Garenne. Soit, au total, 15000 repas par jour. «Nous avons un conseil dadministration dans chacune des villes et nous nous adaptons à leurs demandes», explique son président, Philippe Clochette.

L'Humanité Nadège Dubessay

Mardi 4 Octobre 2022

Pour les écoles maternelles et primaires, la décision d’augmenter ou non le coût du repas se prend au niveau des communes. Stéphane AUDRAS / REA

Ici, on ne parle plus de cantine depuis belle lurette, mais de restaurant scolaire. Il faut dire qu’à Barjac(Gard), le bien-manger est une affaire qui roule depuis presque vingt ans. Cette petite commune aux paysages façonnés par une agriculture riche en bio­diversité, au seuil des Cévennes, s’est fait connaître par l’engagement de son maire, Édouard Chaulet, à promouvoir une restauration collective biologique et locale.

Le village de 1600 habitants a fait figure de précurseur. «Cest un choix politique», martèle l’édile. Tout comme celui de garder le tarif d’un repas à 2,50 euros, malgré une inflation record qui alimente tous les débats et qui impacte les coûts de la restauration scolaire. En un an, les prix des produits alimentaires ont augmenté de 30 %, + 68 % pour les céréales. À cela s’ajoutent les coûts de logistique (+ 44 % pour le carburant).

Des collectivités ont fait des choix radicaux

Si la restauration des collèges et des lycées publics est de la responsabilité des départements et des régions, pour les écoles maternelles et primaires, la décision d’augmenter ou non le coût du repas se prend au niveau des communes. En Seine-Maritime, la ville de Caudebec-lès-Elbeuf a décidé de supprimer un des cinq éléments qui composent un repas à la cantine. Certaines municipalités, comme Rennes(Ille-et-Vilaine), ont calculé une enveloppe prévisionnelle (250000 euros dans le cas rennais) pour ne pas faire peser l’inflation sur les familles ces prochains mois.

Dans la loi de finances rectificative pour 2022, le Sénat a adopté un «filet de sécurité pour les communes» avec un soutien budgétaire pour plus de la moitié d’entre elles, qui ne vaut que pour cette année. Mais, d’ores et déjà, certaines collectivités ont fait des choix radicaux. À Chennevières-sur-Marne, dans le Val-de-Marne, fini le système de tranches déterminées, pour les ménages, en fonction de leurs revenus. Aujourd’hui, le calcul s’opère selon leur «taux deffort», communiqué par la caisse dallocations familiales à la mairie. Cest-à-dire le rapport entre les revenus des ménages et la somme des dépenses quils consacrent à leur habitation principale. La décision, votée en juillet par le conseil municipal, a provoqué un tollé général chez les parents d’élèves. Une pétition est lancée. Car la facture est salée: entre 30 et 50 % daugmentation par rapport à lannée dernière. Selon lAssociation des maires de France, environ 50 % des communes ont augmenté les tarifs de leurs cantines.

Abandonner tout prestataire privé

Alors pourquoi certaines s’en sortent-elles mieux que d’autres? Comment réussissent-elles à ne pas faire supporter aux familles le coût de linflation, tout en continuant à proposer des menus de qualité pour les enfants? À Barjac, le maire assume: «On construira moins de ronds-points. On réduira peut-être les subventions aux associations. Mais pas question daugmenter la restauration scolaire, alors que les familles vont avoir de plus en plus de mal à bien nourrir leurs enfants à la maison.» Surtout, ici, on reste persuadé que la solution passe par l’autoproduction. 

«Je pourchasse tous les terrains à labandon et dès quon peut, on les achète pour installer un agriculteur bio», se félicite Édouard Chaulet. Le village a ainsi fait l’acquisition de six hectares. Et avec l’aide de la foncière Terre de liens, il y installe des paysans. Les 250 oliviers communaux ont donné 40 litres d’huile, que les enfants retrouvent dans leurs assiettes. Chacun des 250 repas servis coûte 9 euros à la commune. Le portage des repas aux personnes âgées et handicapées rapporte 90000 euros et les parents payent 100000 euros. Restent 120000 euros, pris en charge par le budget communal.

La clé du succès réside en deux principes: la gestion directe (régie municipale) et les circuits courts. Les communes qui nont pas de prestataires peuvent limiter les dégâts de linflation en passant des contrats avec les producteurs locaux. Elles peuvent aussi mieux gérer la qualité des produits et éviter les gaspillages. 45 % des municipalités ont fait ce choix de la gestion directe. Les autres dépendent d’entreprises privées de la restauration collective, dans le cadre d’une délégation de service public. Or, cet été, pour faire face à l’inflation, le Syndicat national de la restauration collective demandait à ces collectivités une «revalorisation à hauteur dau moins 7 % des contrats».

L’actualité accélère ce qui, depuis plus d’un an déjà, trottait dans la tête des élus du village d’Asson, dans les Pyrénées-Atlantiques. L’adjointe à l’enfance et à la jeunesse, Audrey Vanhooren, entend s’inspirer d’expériences comme celle de Barjac et abandonner tout prestataire privé d’ici la rentrée prochaine. Son constat est sans appel: «Ils ne voient pas comment les enfants consomment. Alors les portions sont parfois insuffisantes. A contrario, quand des carottes ou des courgettes font triste figure pour le repas végétarien hebdomadaire, les enfants ne les mangent pas et elles sont jetées. Et nous avons aussi souvent des problèmes dans les horaires de livraison.» 

Dans cette petite commune de 2000 habitants, chacun des 120 repas livrés aux deux écoles est facturé 4,12 euros aux familles. Le conseil municipal, aidé par le département, a sollicité un bureau d’études pour l’aménagement d’une cuisine centrale. Certes, le travail est compliqué et a un coût. Le respect des normes de plus en plus contraignantes «peut faire peur», avoue l’élue. Mais cette infirmière en a assez de voir au menu des fromages sous plastique… alors que trois fromagers sont sur place.

Ou de la viande mal cuite, sans goût, tandis qu’un boucher tout proche propose de la viande de qualité . «Une bonne alimentation dans les cantines, c’est aussi inciter de nouvelles familles, de plus en plus exigeantes sur ces questions, à s’installer dans le village. C’est s’ajuster aux besoins et envies des enfants. Comment faire comprendre à un prestataire qu’un enfant diabétique a besoin de féculents à chaque repas?» Elle en est convaincue: passer en régie publique permettra des repas de meilleure qualité et pas plus chers. Voire moins.

Le village de Cazouls-lès-Béziers, dans l’Hérault, en a fait l’expérience. Depuis qu’il a quitté son prestataire privé il y a deux ans, il est passé à une restauration scolaire 100 % bio et locale. La mairie a embauché une maraîchère qui fournit les fruits et légumes pour les 350 assiettes des écoliers. Et le prix pour les parents n’a pas changé: 3,80 euros. «La lutte contre le gaspillage alimentaire permet de maîtriser le budget, assure Carole Berlou, adjointe au maire chargée des affaires scolaires. Mais c’est un choix politique plus que budgétaire. Aujourd’hui, je suis fière de nourrir correctement les enfants qui fréquentent la cantine.»

En projet, la création d’une régie agricole

Les grandes agglomérations peuvent pour l’instant, quant à elles, amortir l’inflation plus facilement en économisant sur d’autres postes, grâce à leurs moyens financiers. Là aussi, certains choix font la différence. En banlieue parisienne, le Syrec, un syndicat intercommunal, gère la restauration scolaire des villes de Gennevilliers, Saint-Ouen, Villepinte et Villeneuve-la-Garenne. Soit, au total, 15000 repas par jour. «Nous avons un conseil dadministration dans chacune des villes et nous nous adaptons à leurs demandes», explique son président, Philippe Clochette.

À Gennevilliers – où la prise en charge de la commune va de 50 à 95 % du coût de la prestation les menus sont ainsi passés à 80 % de repas non carnés en septembre, alors que Villepinte est restée à 50 %. Depuis janvier, la loi Egalim impose 20 % de bio dans les cantines. Le Syrec en offre 35 %. «Nos équipes techniques ont calculé que rajouter un menu végétarien par semaine permettait de réaliser des économies, à la fois d’absorber l’inflation et d’aller sur un objectif de 50 % de bio d’ici la fin de l’année», poursuit le président. Surtout, ce service public permet de ne pas passer par des intermédiaires: «Ce sont les élus qui décident.»

 En projet, Gennevilliers imagine la création d’une régie agricole dont bénéficieraient également les trois autres villes. D’ici à 2026, le Syrec espère pouvoir ainsi fournir 1500 repas par jour. «Nous cherchons des terrains disponibles, notamment dans l’Oise et le Val-d’Oise», souligne Philippe Clochette. Du bio, du végétarien et du local sous contrôle public. La recette gagnante.

 

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Faut-il manger les riches pour sauver le climat ?

4 Octobre 2022, 07:54am

Publié par PCF Villepinte

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Présidentielle au Brésil : Lula en tête avec 48,43 %

3 Octobre 2022, 06:56am

Publié par PCF Villepinte

Le pays-continent jouait son destin le 2 octobre avec le premier tour de la présidentielle. La victoire possible de Luiz Inacio Lula da Silva, largement en tête au premier tour, suscite d’immenses espérances. Mais « La lutte continue jusqu’à la victoire finale », a déclaré, Lula contraint à un second tour.

"Dès demain, nous serons en campagne. Ne vous reposez pas. Parlons à nos adversaires, à nos amis. Nous sommes la meilleure solution pour résoudre la vie du peuple brésilien. Bonne nuit et à demain."

 L'Humanité Rio de Janeiro, Sao Paulo (Brésil), envoyée spéciale.

En effet, selon les résultats publiés par le Tribunal supérieur électoral (TSE)  portant sur 99,99 % des bulletins dépouillés, le représentant du Parti des travailleurs, ancien chef de l’Etat de 2003 à 2010, enregistre plus de cinq points d’avance avec 48,43 % des voix sur le président d’extrême droite sortant, Jair Bolsonaro (43,20 %). 

Lula recueille plus de 57,2 millions de votes en sa faveur. Mais faute de majorité absolue, un second tour aura lieu le dimanche 30 octobre.

 La centriste Simone Tebet est troisième, loin derrière, avec 4,16 % des voix. Le travailliste Ciro Gomes la suit, à 3,04 %. Tous les autres candidats sont autour ou sous la barre des 0,50 %. Le taux de participation de ce premier tour a atteint 79 %.

Le dernier sondage Datafolha donnait le candidat du Parti des travailleurs (PT) largement en tête, avec 50 % des voix, contre 36 % pour Jair Bolsonaro. Plus que jamais les risques de déchirement d'une société dévastée et extrêmement polarisée restent présents. 

REPORTAGE

Elle .est restée quelques instants, presque une éternité compte tenu du tumulte qui l’entoure, à embrasser la foule du regard, à disséquer ses sourires, ses éclats et sa ferveur. C’est là, à Madureira, une banlieue populaire du nord de Rio de Janeiro, qu’elle a trouvé son pays. Loin du récit proposé depuis quatre ans par le pouvoir fasciste de Jair Bolsonaro.

«On nous a jeté tellement de haine à la figure. Le Brésil est un pays de couleurs, de mélange. Le bolsonarisme, cest le noir, lobscurantisme, les bruits de bottes. Il nie notre identité culturelle», souffle Marisa, lorsque la sono lui en laisse la possibilité. Le trop-plein est atteint, les corps parlent. «Désormais, je fais de la tachycardie quand je lentends», explique cette mère de huit enfants.

Au cœur de l’école de samba de Portela, l’une des plus titrées du pays, Luiz Inacio Lula da Silva mène, en ce 25 septembre, l’un de ses derniers rendez-vous de campagne. Au projet de politique de blanchiment de la population brésilienne décrit par Marisa, le candidat de gauche oppose l’exaltation du métissage, la célébration d’une culture qui puise ses racines dans l’esclavage et d’un lieu largement fréquenté par une population marginalisée, voire criminalisée.

C'EST DANS LE SUD INDUSTRIALISÉ ET EUROPÉANISÉ, ABRITANT PLUS DE 40 % DU CORPS ÉLECTORAL, QUE JAIR BOLSONARO A RÉALISÉ SES MEILLEURS SCORES IL Y A QUATRE ANS.

En 2019, l’ancien maire de Rio de Janeiro Marcelo Crivella, membre du Parti républicain brésilien et évangélique notoire, avait privé les écoles de samba de leurs subventions. Réponse des «carnavalescos» au triste sire: lannée suivante, le défilé était placé sous le signe des droits des minorités, de la dénonciation des violences policières et de la déforestation.

33 millions de Brésiliens souffrent de la faim

Avant la présidentielle et les élections générales du 2 octobre, Lula, l’enfant du Nordeste, concentre tous ses efforts sur la partie méridionale du pays, qui abrite plus de 40 % du corps électoral. L’enjeu est de taille. Dans ce Sud industrialisé et européanisé, Jair Bolsonaro a réalisé parmi ses meilleurs scores, il y a quatre ans. Même en ces terres cariocas, où ses trois fils sont élus, le président sortant est donné à égalité avec Lula.

Face à l’affluence à Madureira, plusieurs centaines de sympathisants de gauche sont contraints d’écouter depuis la rue le meeting de «leur» président, le seul quils reconnaissent. Accoudée à une barrière métallique, Gloria note à son tour: «Tout a changé avec Bolsonaro. La structure familiale a été durement touchée. Ma sœur est décédée du Covid. Il a pompé tout le sang du Brésil. Il y a tellement de souffrances. J’ai moi-même perdu mon emploi à l’hôpital.»

Jair Bolsonaro a beau se vanter d’un retour de la croissance (1,2 % au deuxième trimestre), la plus grande économie d’Amérique latine recense plus de 10 millions de chômeurs et un nombre croissant de travailleurs informels ; 33 millions de personnes souffrent par ailleurs de la faim, pourtant éradiquée grâce à la politique volontariste du Parti des travailleurs (PT) de Lula.

La démocratie, enjeu cardinal du scrutin

Des comités de quartier s’organisent, désormais, pour s’assurer que tout le monde mange à sa faim. Du PT à la Centrale unique des travailleurs (CUT) en passant par le Mouvement des sans-terre (MST), c’est une contre-société qui garantit le minimum décent en lieu et place du gouvernement. «Il devient difficile de sacheter à manger. Je suis terrorisée à l’idée d’avoir faim», confirme Marlène. Comme un écho, sur la place du Marechal Deodoro de Sao Paulo, surplombée par la quatre-voies et saturée de tentes de sans-abri, une banderole aux couleurs du drapeau national témoigne que «le Brésil a empiré».

Dans ce paysage de désolation, deux mots ont rythmé la campagne électorale de Lula, «bonheur» et «espoir». L’hymne Sem medo de ser feliz (Sans avoir peur d’être heureux), reprise de la chanson de 1989, qui marqua la première élection post-dictature, s’avère être un clin d’œil au présent.

Pour ce scrutin historique, l’enjeu cardinal reste la lutte pour la démocratie. Il est posé comme tel par la gauche rassemblée pour sortir Jair Bolsonaro du palais du Planalto. Quitte à balayer la question du projet. Le candidat du PT évoque la relance du programme de logement pour les plus pauvres (Minha casa minha vida), l’éradication de la faim, l’arrêt de l’invasion des terres indigènes et l’investissement dans l’agriculture.

Sans préciser les modalités et les marges de manœuvre financière qu’il entend dégager. «À sept jours de l’élection, je ne peux pas dire que je reviendrai sur tout ce qui a été fait, ce serait irresponsable. J’ai d’abord besoin de comprendre ce qui a réellement été fait», souligne celui qui entend réunir les gouverneurs afin de définir les projets d’investissements de manière concertée.

Les partisans chauffés à blanc de Bolsonaro

En évoquant la «saudade de la démocratie», Lula fait le lien avec la nostalgie – réelle – de sa présidence (2003-2010), lorsque le Brésil flirtait avec des taux de croissance insolents et sortait 40 millions de personnes de la pauvreté.

À gauche, les dents ont pourtant grincé lorsqu’il a désigné le conservateur et néolibéral Geraldo Alckmin comme colistier. Un homme capable de rassurer les milieux financiers et d’attirer une partie de la droite, lasse des errements économiques de Jair Bolsonaro. Il pourrait également lui permettre de nouer des alliances de circonstance au Parlement afin de faire avancer ses réformes.

Dans un podcast évangélique, Jair Bolsonaro annonçait qu’il respecterait «la volonté de Dieu» et se retirerait de la politique si les Brésiliens en décidaient ainsi. Pourtant, dans un communiqué publié le 28 septembre, le Parti libéral, la formation du président, met en doute la probité du Tribunal supérieur électoral.

« Jair Bolsonaro a tenté de mimer Trump »

Ses partisans, chauffés à blanc pendant quatre ans, font craindre une action similaire à celle des soutiens de Donald Trump au Capitole. Les agressions de militants ou sympathisants de gauche ont bondi ces derniers mois. Comment pourrait-il en être autrement alors que le chef de l’État n’a eu de cesse de provoquer des ruptures institutionnelles, de dénoncer les pouvoirs du Parlement, de questionner le vote électronique utilisé depuis 1996?

Lever le sceau du secret

La Cour suprême, qui ordonna la libération de Lula, jugeant qu’il avait été victime d’un procès à charge, a elle aussi été mise en cause. «Un jour, relève le candidat du PT, qui compare son sort à celui de Mandela et Gandhi, la justice devra réparer tous les préjudices que j’ai subis» en passant plus d’un an et demi incarcéré sur la base de fausses accusations de corruption.

Dans les cent premiers jours de son mandat, il promet par ailleurs de lever le sceau du secret, posé pour cent ans par le président sortant, dans toutes les affaires le concernant. Dernière en date, ce 27 septembre, avec l’enquête ouverte sur les transactions suspectes du couple Bolsonaro afin de financer les dépenses personnelles de son épouse.

Épargner au Brésil de nouveaux déchirements

Donné gagnant dès le premier tour dans certaines enquêtes, autour de 47 % dans la majorité des autres, le PT a appelé ses partisans à aller chercher les voix susceptibles de faire basculer le scrutin dès dimanche, de rendre le résultat incontestable afin d’épargner au Brésil de nouveaux déchirements. «Chacun doit prendre ses responsabilités. Allons chercher un, deux, trois votes de plus. Il y a encore beaucoup de gens qui disent vouloir voter blanc. Le vote est notre seule arme», insiste la présidente du PT, Gleisi Hoffmann, par opposition au chef de l’État qui a libéralisé le port d’armes.

Au regard de la polarisation de la société, Lula estime qu’il est inutile de chercher à convaincre «les fanatiques» bolsonaristes (33 % selon les sondages). Ce n’est pas le cas du candidat Ciro Gomes (7 %). Censé incarner une troisième voie centriste, il n’a eu de cesse de dresser un parallèle entre Lula et Jair Bolsonaro et de draguer les partisans de ce dernier. Quitte à faire le jeu du fascisme.

 

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Les cadres veulent eux aussi se faire entendre

3 Octobre 2022, 06:50am

Publié par PCF Villepinte

CGT

PUBLIÉ LE 27 SEP. 2022

Près de la moitié des cadres se disent prêts à se mobiliser pour obtenir une augmentation de salaire, ou pour défendre leur retraite. C’est ce que révèle le baromètre annuel de l’Union générale des ingénieurs, cadres et techniciens CGT (Ugict).

 

Avec le télétravail, le temps et la charge de travail des cadres explosent, tandis que leur pouvoir d’achat recule. Ils défendent la retraite à 60 ans.

Dans quel état d’esprit sont les cadres ?

Visiblement dans le même que beaucoup de salariés de notre pays : ils ne veulent pas de la réforme des retraites et demandent une revalorisation de leurs salaires dans le contexte de forte inflation observée depuis début 2022.

Selon un sondage réalisé par Viavoice pour le baromètre annuel sur l’opinion et les attentes des cadres commandé par l’Ugict CGT, sur un échantillon représentatif de 1 000 cadres, 67 % d’entre eux seraient prêts à signer une pétition et 48 % à manifester pour défendre leur retraite. L’enquête révèle qu’ils sont même 42 % à faire grève.

Regain de confiance dans les syndicats

Et pour défendre leurs droits ou leur emploi, 28 % des personnes interrogées disent que c'est dans les syndicats qu'elles ont le plus confiance. Contre 21 % en 2016.

« C’est du jamais-vu depuis l’existence du baromètre créé voici dix ans ! », se félicite Sophie Binet, secrétaire générale de l’Ugict CGT.

Alors qu’ils se sentent traditionnellement seuls pour se défendre, près de deux cadres sur cinq se déclarent prêts à se syndiquer.

Les raisons de la grogne des cadres, et du regain de confiance dans les syndicats ? La baisse de leur pouvoir d’achat : plus de 70% d’entre eux (et 80 % des femmes cadres) estiment qu’il a baissé en un an. Et les chiffres de la Dares (1) le confirment : en moyenne, ils ont perdu 3,7% de pouvoir d’achat au deuxième trimestre 2022.

Dans le détail, le baromètre publié le 26 septembre, à trois jours de la grande mobilisation interprofessionnelle et intersyndicale du 29 septembre, révèle que plus de la moitié d’entre eux trouvent leur rémunération pas en adéquation avec leur temps et leur charge de travail. Ni avec leur implication. 42 % disent travailler plus de 45h par semaine, et 20 % plus de 49h ! Soit 5 points de plus par rapport à 2021.

Et ce n’est pas tout : plus de la moitié travaillent souvent pendant leurs jours de repos. Ces chiffres s’affolent dans la fonction publique (71%) et pour les femmes (59%) dont le temps est fragmenté entre les tâches domestiques et professionnelles.

Derrière ces chiffres, se dessinent les effets collatéraux du télétravail : s’ils passent moins de temps dans les transports, les cadres voient leur charge de travail augmenter fortement. Car le télétravail a beau être séduisant, il n’est justement pas encadré, et le droit effectif à la déconnexion reste un vœu pieux.

Pour la retraite à 60 ans

Un petit tiers seulement des cadres interrogés pensent qu’ils connaîtront une évolution professionnelle positive dans les années à venir. Ce pessimisme frappe particulièrement les seniors : seulement 22 % arrivent à se projeter ! Les autres se voient bottés en touche par les entreprises.

Enfin, alors que le gouvernement s’arqueboute sur un nouveau report de l’âge de départ en retraite, les cadres y sont très majoritairement opposés : plus de la moitié souhaite une réforme qui ne repousse pas l’âge de départ mais au contraire, repasse à 60 ans. Et 82 % veulent une réforme des retraites garantissant une pension au moins égale à 75 % du salaire de fin de carrière (contre 67% aujourd’hui).

La CGT demande la reconnaissance des qualifications, en particulier dans la fonction publique où les grilles de salaires se sont extrêmement tassé, avec le retour à l’échelle mobile des salaires (lire ici). Deuxième revendication, la réduction du temps de travail de tous les salariés, et en particulier des cadres qui aspirent à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. Il faut encadrer le télétravail, mettre fin aux forfaits jours sans décompte horaire, et un vrai droit à la déconnexion.

Consulter tous les résultats du baromètre

 

1/ Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques, rattachée au

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Opex, bouleversant hymne à la vie d’Arno

2 Octobre 2022, 09:28am

Publié par PCF Villepinte

Musique Le dernier album du chanteur belge sort ce vendredi, cinq mois après sa mort. Un disque rock qui conjugue irrévérence et lucidité. Et transpire l’urgence et l’amour.

Fara C. L'Humanité

Vendredi 30 Septembre 2022

Le 23 avril, à l’âge de 72 ans, le chanteur s’est définitivement tu. Dans son dernier album, il regarde la vérité les yeux dans les yeux. danny willems

Dans le sillage de son superbe disque en duo avec le prodigieux pianiste Sofiane Pamart, Arno continue, d’outre-tombe, de chanter pour nous, toujours mû par cette irrévérence pétrie de générosité qui le caractérisait. Avec son album posthume, Opex, qui sort ce vendredi 30 septembre, il offre un bouleversant hymne à la vie.

À ces agapes poétiques il n’hésite pas à convoquer la Faucheuse, comme pour l’apprivoiser ou, selon son humeur, la défier, avec humour. Il se savait condamné. Opex transpire l’urgence. «  Malgré la fatigue et la douleur, Arno voulait coûte que coûte faire ce disque, il avait conscience que ce serait le dernier, nous confie le bassiste Mirko Banovic, musicien de longue date du chanteur belge qui a coréalisé Opex avec lui. Arno était encore en studio, en mars, pour peaufiner le projet mis en route en 2021. Le 23 avril, il est définitivement parti à l’âge de 72 ans, soulagé d’avoir accompli son ultime mission.

Immédiatement après Vivre, disque acoustique et pudique mis en œuvre alors qu’il venait d’apprendre qu’il avait un cancer, et qu’était survenue la pandémie, Arno a tenu à parachever sa discographie en brandissant, haut et fort, l’oriflamme rock. «Dès lenfance, il s’était reconnu dans ce style musical, rappelle Mirko Banovic. Arno a voulu que figure, dans Opex, une reprise de One Night With You. Gamin, il avait découvert ce morceau popularisé par Elvis Presley et avait aussitôt su que, plus tard, il ne voudrait rien faire d’autre que de la musique. Depuis longtemps, il voulait l’enregistrer. À l’issue de la session, il était fier de l’avoir enfin fait.»

«embrasse le passé, il nexiste plus»

Sur One Night With You, grondent de grosses guitares hard rock, alors qu’elles se font plutôt folk, entre ombre et lumière comme un soleil couchant, dans le morceau  Take Me Back que l’Ostendais a signé avec Mirko Banovic. On a l’impression qu’il s’adresse à la maladie aux «baisers mortels». «Sil te plaît, ramène-moi et mets-moi en accord avec moi-même », psalmodie-t-il, rejoint par la supplique nostalgique d’un hautbois lointain.

En introduction d’ Opex ( la Vérité), puis en conclusion ( I’m Not Gonna Whistle), il a convié, pour la première fois, son fils Félix Hintjens, qui a imprimé un subtil cachet électro et qui a cosigné la musique des deux titres avec Mirko Banovic et Bruno Fevery (lui aussi fidèle musicien du leader). Dans le premier, Arno regarde la vérité les yeux dans les yeux: «Je vais me marier avec le vent/Je prends le soleil comme mon amant () Embrasse le passé, il nexiste plus/Hier, c’était le passé, aujourdhui la vérité.»

Dans I’m Not Gonna Whistle, comme dans Mon grand-père, Arno se saisit de son harmonica, dont il extirpe une complainte qui nous serre les entrailles. Pour I’m Not Gonna Whistle (« Je ne vais pas siffler»), il a également fait appel à son frère, le saxophoniste Peter Hintjens. « Pour cet album, Arno a souhaité réunir sa famille et ses proches compagnons de musique, souligne Mirko Banovic. Nous avons enregistré la majeure partie d’Opex ensemble, en condition live. Nous avions à cœur de l’entourer avec autant d’amour que celui qu’il nous donnait sans réserve.»

Arno a baptisé ce quinzième opus Opex en hommage au quartier populaire où il a grandi, à Ostende. «Mes grands-parents y tenaient un bar populaire et cest là que je suis allé à mes premiers bals avec mon grand-père», nous avait-il confié, en 2015, à l’occasion d’un concert au Festival Jazz Musette des Puces.

Le regretté troubadour manie avec maestria le paradoxe. Dans Boulettes, il célèbre jouissance et réjouissance. Un peu plus loin, dans Court-circuit dans mon esprit (déjà gravé pour le disque Santeboutique, 2019), composé par Mirko Banovic et magnifiquement interprété au piano par Sofiane Pamart, ses couplets crève-cœur parlent sans ambages de la vie qu’il a brûlée par les deux bouts et qui s’en va. « Maintenant je paie les conneries du passé/Il y a un court-circuit dans mon esprit/Save me save me…  »

 Inattendue, la seconde reprise du CD ( la Paloma adieu) invite Mireille Mathieu. Là encore, Arno donne la chair de poule, quand il formule, à la façon d’un slam: « Ma vie s’en va mais n’aie pas trop de peine/Oh mon amour adieu. » Un duo avec Mireille Mathieu, c’était un rêve de gosse. À sa sortie de studio, la chanteuse apprit que, pendant qu’elle enregistrait sa piste vocale, l’éternel enfant avait rendu son dernier souffle. 

Albums chez Pias Label/Pias Distribution: Arno, Opex (2022)  ; Arno & Sofiane Pamart, Vivre (2021).

 

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L’Italie et la résurgence mussolinienne.

2 Octobre 2022, 09:20am

Publié par PCF Villepinte

Post-fasciste(s)

Matrice. 

«Le vieux monde se meurt, le nouveau tarde à apparaître et dans ce clair-obscur surgissent les monstres.» Nous connaissons par cœur la formule d’Antonio Gramsci. Le philosophe et écrivain, membre fondateur du Parti communiste italien, dont il fut un temps à la tête, passa dix années dans les geôles mussoliniennes jusqu’à sa mort, en 1937, terrassé par une tuberculose osseuse (la maladie de Pott).

Presque cent ans après la marche sur Rome et la prise de pouvoir de Benito Mussolini, un étrange retour de l’Histoire – avec son grand H – souffle sur l’Europe comme le vent dans les arbres courbés d’automne. L’Italie, troisième économie de la zone euro, vient donc de basculer dans l’obscur. Pour la première fois depuis la mort du tyran en 1945, le pays s’apprête à expérimenter un gouvernement dominé par l’extrême droite. Le triomphe du parti Fratelli d’Italia aux élections législatives, et de la coalition qu’il domine, offre à sa leader, Giorgia Meloni, la possibilité de devenir la présidente du Conseil.

Un séisme que nous avions vu venir – mais un séisme malgré tout. On la dit «post-fasciste», «nationaliste». Curieuse rhétorique, pour une femme revendiquant son héritage mussolinien et qui ne cesse de répéter son slogan, «Dieu, patrie, famille», matrice de ses projets: restriction du droit à l’IVG, défense de la «famille naturelle» (sic), guerre totale aux immigrés, etc.

Idéologie.

 Le bloc-noteur se souvient d’avoir chroniqué, en 2016, l’admirable et courageux livre publié aux éditions Demopolis. Il s’agissait de porter à la connaissance du plus grand nombre l’intégralité du tristement célèbre texte de Mussolini, le Fascisme (104 pages, 12 euros), écrit en 1932 pour la Nouvelle Encyclopédie italienne. Il constituait à l’époque le début de l’article «Fascisme», paru en France en 1933 chez Denoël, l’éditeur du Voyage au bout de la nuit, de Louis-Ferdinand Céline, et d’auteurs comme Rebatet ou Brasillach.

Pour la présente publication, Demopolis ne nous laissait pas sans repères. Outre un «avertissement aux lecteurs», dans lequel nous étions invités à ne jamais oublier que «des crimes contre l’humanité ont été commis en application de cet ouvrage» et que «les manifestations actuelles de haine et de xénophobie participent de son esprit», deux spécialistes avaient été requis pour commenter, en préface et en postface, ces lignes qui ont accouché du pire au XXe siècle: Gérard Mordillat, écrivain et cinéaste, et Hélène Marchal, historienne et traductrice. «La publication de ce livre, écrivaient-ils en préambule, doit permettre aux lectrices et lecteurs curieux, et parfois inquiets des évolutions du monde contemporain, de se forger leur propre opinion.»

Pire.

 Six ans plus tard, l’Italie a basculé. Alors relisons ce texte! Et comprenons bien que le fascisme mussolinien dont se revendique Giorgia Meloni reste une forme particulière de nationalisme, car «il n’y a pas de fascisme sans nationalisme mais il y a différentes formes de nationalisme qui ne sont pas du fascisme», expliquaient en 2016 Mordillat et Marchal.

De même, ils nous alertaient sur les contresens fréquents: contrairement au libéralisme, le fascisme selon Benito Mussolini est une forme de nationalisme qui exalte le rôle central de l’État («l’État fasciste est une force, mais une force spirituelle qui résume toutes les formes de la vie morale et intellectuelle de l’homme», écrivait le dictateur), tout en affichant un programme social et en se prétendant «ni de droite ni de gauche», ce qui ne manque pas de nous rappeler quelque chose.

Et ils ajoutaient, à propos des extrêmes droites «modernes»: «Le folklore disparaît, l’idéologie se radicalise.» À méditer, non? «Face à l’échec du libéralisme, le nationalisme offre une idéologie de rechange à la bourgeoisie en quête d’une traduction politique de ses craintes et de ses attentes», n’hésitaient pas à préciser Mordillat et Marchal, après une longue démonstration passionnante des ressorts de la crise économique et de sa sociologie parmi les classes, sans parler du cycle de renoncements des «gauches» européennes qui a fini par susciter un mécontentement ravageur et des abstentions record un peu partout. Bref, la porte ouverte au pire. Une matière à réflexion pour la France…

[BLOC-NOTES publié dans l'Humanité du 30 septembre 2022.]

Publié par Jean-Emmanuel Ducoin 

 

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