Notre société est traversée par une crise sociale et économique, mais
aussi écologique et démocratique, d’une extrême gravité. Pour nous, il s’agit d’une crise de civilisation qui remet profondément en cause la place et le devenir de l’humain.
Elle est le résultat de choix politiques, outrancièrement accentués ces
dernières années, qui ont conduit à des régressions majeures et à des renoncements dévastateurs pour la vie quotidienne des hommes et des femmes.
Les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité, pour ne citer
qu’elles, ont été allègrement piétinées.
Avec le Front de gauche, la volonté du Parti communiste français est plus
que jamais de construire un changement profond qui conteste le pouvoir des forces de la finance et fasse valoir l’humain d’abord.
Ce changement, nous voulons le construire avec notre peuple dans sa
diversité. Et pour reprendre la formule d’Aragon, avec celui qui croit au ciel comme avec celui qui n’y croit pas.
On pourrait dire qu’être croyant aujourd’hui dans notre pays expose à
deux dangers : être stigmatisé ou être instrumentalisé.
Nous refusons les polémiques malsaines et dangereuses mises en œuvre au
plus haut niveau de l’état, qui détournent la religion comme la laïcité pour essayer de faire avancer la peur de l’autre et le repli sur soi. L’indigne polémique engagée sur la consommation de
viande issue d’abattages rituels par des croyants juifs ou musulmans est un inquiétant exemple de ces dérives.
17 mars 2012
Nous voulons témoigner aux hommes et aux femmes de
confession musulmane de notre dégoût devant cette course à l’islamophobie engagée par le président de la République avec Marine Le Pen.
Ils pourront nous trouver à leur côté pour refuser ces attaques et parler
d’avenir.
Nous savons aussi que de nombreux chrétiens se sont
sentis insultés par la manière qu’a eue Nicolas Sarkozy d’essayer de s’approprier leur foi. Ce d’autant qu’ils subissent la réalité de sa politique et pour nombre d’entre eux ont été choqués par
les valeurs qu’il a foulées aux pieds ces derniers temps, avec la traque des roms, la stigmatisation des chômeurs et le culte de l’argent.
Tout cela nous renvoie à l’exercice de la laïcité. C’est pour nous un principe
fondateur. On a bien souvent voulu lui faire dire des choses qu’il ne dit pas. La laïcité établit l’égalité de droit de tous les citoyennes et citoyens, quelles que soient leurs convictions
religieuses ou philosophiques, dans un état indépendant.
Elle est une grammaire du vivre ensemble. Cette égalité de droits comprend
l’égalité entre hommes et femmes qui demeure dans toute la société un combat essentiel à mener.
Nous voyons bien que le pouvoir en place est en train d’essayer de diviser,
d’opposer, de désigner des boucs-émissaires. La laïcité est tout l’inverse de cela. Elle doit permettre un débat démocratique apaisé, parce que chacun s’y sent respecté.
Et les communistes pensent toujours que les croyants ont beaucoup à apporter dans
la construction de la société.
La foi d’un être humain ne peut suffire à le définir et à déterminer ses
choix politiques, mais nous savons la force des valeurs que peut également nourrir la foi.
C’est pourquoi nous refusons une conception de la laïcité à géométrie variable et
cette manière qu’a Nicolas Sarkozy de vouloir dicter aux croyants les cadres d’une religion-pharmacie qui serait chargée de répandre une morale publique d’appoint et de renvoyer dans l’au-delà
les attentes d’une vie meilleure. Comme nous refusons une conception de la laïcité qui se veut un instrument de combat contre la religion et cherche à formater des individus dépouillés de leurs
convictions dès qu’ils franchissent le pas de leur porte.
Ce que nous combattons, en revanche, ce sont les fondamentalismes, qui contestent
la légitimité de la République et veulent imposer des lois au nom de présupposés religieux. Ce que nous refusons, ce sont les communautarismes, qui apparaissent pour certains comme des refuges
face à la violence du monde, mais en réalité isolent et opposent.
Loin de ces replis comme des abîmes de l’identité nationale, il existe dans notre
pays une culture commune en mouvement, qui se nourrit des influences multiples advenues dans notre histoire et d’une diversité culturelle d’aujourd’hui. C’est à partir de là que nous devons
construire le vivre ensemble, en donnant corps à notre devise républicaine.
Les vraies raisons de nos difficultés ne sont à chercher ni chez celui qui croit
différemment, ni chez celui qui souffre plus encore, ni chez l’étranger qui essaye de survivre à la traque, ni chez le jeune qui ne se voit pas d’avenir. On les trouvera dans le choix de la
concurrence à tout crin, la destruction de l’intervention publique, la marchandisation de tout ce qui pourrait nous unir et nous grandir, les discriminations en tous genres, la recherche effrénée
du profit maximum quelles qu’en soient les conséquences…
Hommes et femmes du peuple, nous pouvons nous unir dans notre diversité,
face aux vraies causes et aux vrais responsables de notre mal-vie.
Nous sommes convaincus qu’il y a besoin d’autres choix politiques, radicalement
différents. Des choix politiques qui mettront l’humain au cœur des préoccupations et des enjeux pour redonner du sens au vivre ensemble. En prenant garde de ne pas tout ramener aux élections,
nous savons que les échéances présidentielle et législatives sont une occasion formidable d’avancer dans cette direction.
Nous tenions à vous adresser ces quelques mots de respect et d’espoir, après ces
années de traumatismes.
Ces quelques mots de confiance en ce que notre peuple est capable de
construire. Ensemble, prolongeons le débat et poursuivons sur des chemins communs.
Pierre Laurent secrétaire national du Parti communiste français