Politique agricole
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Publié le 26 février 2025
L’agriculture française est placée devant un défi majeur : la moitié de ses paysans vont prendre leur retraite dans les dix ans à venir. Toute ambition en matière de souveraineté alimentaire suppose donc d’installer chaque année des dizaines de milliers d’agricultrices et d’agriculteurs, en leur permettant d’abord de vivre décemment de leur travail.
Mais comment répondre à un tel défi, sans s’affranchir du corset libéral qui étouffe nos systèmes agricoles ?
Alors que cette question devrait être au cœur du débat public sur l’avenir de notre agriculture, tout a été fait ces derniers mois pour l’occulter. Ainsi, alors que la mobilisation des agriculteurs depuis un an portait d’abord sur la question de la rémunération et de la pérennité des exploitations, la loi dite « d’orientation agricole », adoptée au forceps juste avant l’ouverture du salon de l’Agriculture, débouche sur une série de reculs, notamment environnementaux, et de mesurettes qui servent avant tout de communication politique et de dérivatifs.
Le texte ignore superbement les politiques structurelles indispensables pour transformer nos systèmes agricoles et créer les protections dont doivent bénéficier nos paysans. Rien sur les freins les plus puissants à l’installation que sont les coûts de reprise des structures et l’accès au foncier agricole.
Rien sur la sécurisation du revenu agricole, alors que le besoin de renforcer les outils publics d’intervention sur la construction des prix et leur contrôle face aux secteurs de la transformation et de la grande distribution aurait dû constituer une priorité. Rien sur l’adaptation au changement climatique et faire face aux risques sanitaires, alors que la mise en place d’un régime public d’assurance et de prévention est impérative.
Rien non plus sur l’accompagnement de la recherche agronomique et le déploiement de ses acquis au champ, pour progresser collectivement vers des systèmes plus vertueux. Pire encore, ce texte acte une forme de renoncement sur la protection des productions durables en proposant tout simplement d’aligner les normes vers le bas, plutôt que de mettre en œuvre des politiques publiques efficaces face aux importations déloyales !
Vouloir ainsi assurer notre souveraineté alimentaire, sans agir sur les contraintes socio-économiques qui pèsent sur les agriculteurs, relève de la supercherie politique.
D’autant plus lorsque, au plan européen, les politiques libérales poursuivies les protègent de moins en moins. À commencer par la politique commerciale ouverte à tous les vents qu’impose la Commission européenne avec la conclusion de nouveaux accords de libre-échange. Le secteur agricole y est chaque fois la clé permettant d’obtenir la signature des pays tiers.
De la même façon, la nouvelle PAC avec sa renationalisation rampante des soutiens publics portée par les Plans stratégiques nationaux (PSN) ne fait qu’amplifier les mécanismes de concurrence intracommunautaires. L’urgence devrait au contraire être à une grande conférence européenne sur la souveraineté alimentaire posant la refondation d’une politique agricole et alimentaire vraiment commune, et s’imposant aux autres politiques européennes.
Julien Brugerolles
député suppléant d’André Chassaigne
Article publié dans CommunisteS, numéro 1031 du 26 février 2025.